NIDS VISIONNAIRES
CES HABITATS DU 3E TYPE SE POSENT PRESQUE N’IMPORTE OÙ, SUR L E TOIT D’UN I MMEUBLE OU AU COEUR D’UN PLATANE, MAIS PAS N’IMPORTE COMMENT. ÉCO- CONÇUES, AUTOSUFFISANTES EN ÉNERGIE, AVEC UNE EMPREINTE MINIMALE AU SOL OU ENCORE I MPRIMÉES EN 3D, CES STRUCTURES, QUI PEUVENT ÊTRE AUSSI NOMADES, QUESTIONNENT L’ HABITAT.
En forme d’oeuf ou organiques, qu’elles soient pensées dans un but environnemental, architectural ou de migration, ces maisons à dimension variable révolutionnent la façon d’habiter comme de construire. Premier à s’être lancé, dès 1999, dans la création de cabane perchée à plus de dix mètres, Alain Laurens, ex-publicitaire, en compte aujourd’hui plus de cinq cents à son actif. Sa dernière-née redescend un peu sur terre, à trois mètres cinquante, conçue avec Ambroise Maggiar, responsable des projets spéciaux après une collaboration de dix ans avec Philippe Starck. Cyclope ® , la bien nommée, sa baie vitrée tel un oeil grand ouvert sur la nature, ressemble à une sculpture basculée. À Eindhoven, cinq villas prennent des allures de rochers géants. Leur aspect minéral a été permis par leur impression en 3D. Le « Project Milestone ® » des architectes Houben et Van Mierlo joue les formes libres, optimise l’usage du ciment – source importante de CO –, en réduit les coûts et les délais. Un autre type de 2 bâti, elliptique ou rectangulaire, mi-acier mi-bois, se monte en deux jours. Dessiné par les designers Fritsch et Durisotti, préfabriqué en usine, il est sur pilotis, afin de limiter l’empreinte écologique. La plus mobile de tous, reste l’« Ecocapsule » imaginée par le bureau Nice Architects basé à Bratislava en Slovaquie, à destination des campeurs de l’extrême. Elle produit son énergie, récolte l’eau de pluie et la filtre, et se pose aujourd’hui sur les tours urbaines comme en plein champ.
« Et s’il suffisait de monter dans les arbres pour gagner de la hauteur de vue ? À l’instar du professeur Keating qui proposait à ses étudiants de grimper sur les bureaux dans Le Cercle des Poètes Disparus » , interroge Alain Laurens dans son livre Rêvons perchés (La Martinière). Avec son alter ego compagnon charpentier, Ghislain André, ils construisent des cabanes sans jamais planter un clou dans un arbre, ni couper une seule branche. Leur méthode de fixation exclusive est étudiée pour protéger le chêne centenaire ou le platane du XVIIe, s’adaptant à sa croissance. De la Russie au Danemark avec un détour par les États-Unis, le même système d’escalier enroulé autour du tronc, « en rituel de passage entre le monde réel et le royaume de l’imaginaire » , amène à une structure en Red Cedar dont la surface va de douze mètres carrés à plus de cinquante. La cabane peut être destinée à observer des guépards en liberté, comme dans un domaine privé du Val d’Oise, ou bien à abriter un Jacuzzi extérieur chauffé, en pleine montagne. De la mémorable aventure de « L’Art du Jardin » au Grand Palais où ils dressèrent « le phare itinérant » sur une structure déployée en corolle sous la nef, naît « Sky Nest », un repaire à vingt mètres de hauteur qui devrait voir le ciel prochainement au Mexique. Un autre designer-architecte, italien, Marco Lavit, pourrait aussi citer Oscar Wilde : « Il faut viser la Lune, car même en cas d’échec, on atterrit dans les étoiles » . Ces étonnants nids en assemblage de pin Douglas, pesant presque quatre tonnes, peuplent le domaine du château de Raray et abritent des chambres d’hôtes. Ils se greffent au tronc, sans le contraindre, ni le blesser, et se laissent gagner par des ponts de bois. « L’idée est de faire des cabanes confortables mais en redéfinissant la notion même de confort, en osmose avec la nature, la montée est initiatique, le paysage s’envisage différemment. » Dans le respect de l’environnement.