LA FAB. D’AGNÈS B.
La créatrice de mode, à la tête de plus de 5000 oeuvres, ouvre sa maison d’artistes.
LA CRÉATRICE DE MODE AU STYLE À REBOURS DES TENDANCES, LA GALERISTE VISIONNAIRE, LA COLLECTIONNEUSE ENGAGÉE, À LA TÊTE DE PLUS DE 5 000 OEUVRES, OUVRE SA MAISON D’ARTISTES. UNE FAB., COMME FABRIQUE, EN ÉCHO PEUT-ÊTRE À LA FACTORY DE WARHOL. CULTURELLE, SOLIDAIRE, ELLE S’ENVISAGE AVEC « HARDIESSE », TITRE DE LA PREMIÈRE EXPOSITION.
Agnès b. a choisi le XIIIe arrondissement, celui de la BnF, de la Station F, du MK2, du street art, des facultés, des éco-quartiers en germination. «M’inscrire ici, dans ce paysage participe d’un engagement de gauche». Elle installe La Fab. au sein d’un immeuble social conçu par l’architecte Augustin Rosenstiehl. En grande partie vitrée, ce nouvel épicentre de l’art contemporain s’ouvre sur la place Jean-Michel Basquiat, clin d’oeil à l’une des premières oeuvres emblématiques de sa collection. 1400 mètres carrés, au-dessus d’un tunnel SNCF, rassemblent un espace d’exposition, la galerie du Jour, la librairie et les bureaux. Augustin Rosenstiehl et Agnès b. jouent sur quatre nuances de blanc, aux sols, murs, plafonds, installations métalliques et rompent la linéarité par un escalier circulaire. L’accrochage réalisé par Agnès b. et son équipe n’est ni chronologique, ni historique, ni géographique. Mais témoigne de son rôle de pionnière: du graffiti qu’elle ne cesse de soutenir, de l’art non occidental qu’elle montre dès les années 1980, initiée par André Magnin, co-comissaire auprès de Jean-Hubert Martin pour les «Magiciens de la terre» au Centre Pompidou en 1989, des photographes humanistes
Larry Clark, Nan Goldin, Martin Parr… Dans ce vaste lieu, des Basquiat, Warhol, Richard Prince, Keith Haring, Gilbert & George, Calder, Brassaï côtoient des photos, peintures ou installations de jeunes artistes, Vincent Laval, Thibaut Bouedjoro, récemment diplômés des Beaux-Arts de Paris. Elle a été la première à présenter Claire Tabouret, Harmony Korine ou encore Madeleine Berkhemer, dont la Maserati élastiquée de collants déchirés évoquant une féminité combattante se pose au rezde-chaussée. « Ce qui me saute aux yeux quand je regarde ma collection, c’est le goût que j’ai pour la jeunesse, pour les gens qui cherchent, qui ne sont pas sûrs, qui doutent. Mais cela peut s’appliquer aussi bien à Harmony Korine qu’au réalisateur Jonas Mekas, qui pour moi reste quelqu’un de jeune. Ce n’est pas une question d’âge, c’est un état d’esprit, une façon de voir les choses », déclare-t-elle dans un entretien avec l’historien d’art Hans-Ulrich
Obrist. La Fab., fabrique à idées !