Vivre Côté Paris

ALLÉGORIES DE PAPIER

LES DESSINS ÉPHÉMÈRES D’ERNEST PIGNON-ERNEST S’EMPARENT D’ÉLÉMENTS DE FICTION, TRAVAILLEN­T LA MÉMOIRE, CROISENT LA SYMBOLIQUE D’UN LIEU RÉEL ET UNE HISTOIRE FANTASMÉE. LE TEMPS D’UNE EXPOSITION, L’ATELIER GROGNARD REND HOMMAGE À L’AVENTURE BAROQUE D’UN TR

- PAR Cécile Vaiarelli

L’Atelier Grognard de Rueil-Malmaison rend hommage aux dessins d’Ernest Pignon-Ernest.

L’exposition «Papiers de murs» organisée à l’Atelier Grognard de Rueil-Malmaison, en partenaria­t avec la galerie Lelong & Co retrace le parcours singulier d’Ernest Pignon-Ernest, des années 1970 à nos jours. Dans ce processus créatif si personnel, si expressif que la définition de street art ne saurait à elle seule l’enfermer, près de deux cents oeuvres, soit la quasi-totalité des estampes de l’artiste, ses esquisses, photograph­ies et travaux préparatoi­res composent l’édifice d’une pensée généreuse et engagée. « Au début il y a un lieu, un lieu de vie sur lequel je souhaite travailler, dit-il. J’essaie d’en comprendre, d’en saisir tout ce qui se voit: l’espace, la lumière, les couleurs et dans le même mouvement tout ce qui ne se voit pas, ne se voit plus : l’histoire, les souvenirs enfouis, la charge symbolique. » De Paris à Naples, du Chili à Soweto, d’Alger à la Palestine… l’insertion de collages de silhouette­s de papier en dimensions réelles dans un lieu vivant capture l’imaginaire. Dans les pleins et déliés d’un dessin l’on croise Arthur Rimbaud vagabond, Antonin Artaud, Pier Paolo Pasolini assassiné, Jean Genet, les expulsés de Paris, les fusillés de la Commune, une pietà à Soweto…

Entre chair et papier, les territoire­s de l’exil physique ou intellectu­el façonnent le récit de destins individuel­s et composent une pensée collective. Chez Ernest Pignon-Ernest, inutile d’opposer exigence éthique et trait classique, art contempora­in et engagement politique. Son extraordin­aire faculté à « habiter poétiqueme­nt le monde », l’artiste la vit au quotidien, suspendu à des réalités qu’il transforme en rituels, comme un homme de son temps, libre de défier toutes les frontières. Suivant une chronologi­e de cinquante ans, c’est en arpenteur et observateu­r que l’exposition salue ses rencontres comme autant de présences charnières entre l’image dessinée et la rue.

La fragilité du papier qui se fane et emporte la trame dessinée, trouble la mémoire et l’oubli. Reste le voyage d’une humanité silencieus­e suspendue aux tumultes de l’histoire.

ATELIER GROGNARD

«Papiers de murs», jusqu’au 14 mars 2021. 6, avenue du Château de la Malmaison, 92500 Rueil-Malmaison.

Tél. 01 47 14 11 63 et culturueil.fr

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1. Les dessins de figures grandeur nature d’Ernest Pignon-Ernest occupent l’espace urbain jusqu’à s’y fondre. « Derrière la vitre » est une expérience artistique qui cadre un décor autant qu’une fiction. La vérité du dessin nous rend acteurs d’une troublante scène de rue. 1978, une apparition émouvante d’Arthur Rimbaud. Jeunesse éternelle d’un poète de papier, fugitif et errant, ancré dans l’instant présent au coeur de Paris, et dialoguant avec la réalité du monde qui l’entoure.
1. 1. Les dessins de figures grandeur nature d’Ernest Pignon-Ernest occupent l’espace urbain jusqu’à s’y fondre. « Derrière la vitre » est une expérience artistique qui cadre un décor autant qu’une fiction. La vérité du dessin nous rend acteurs d’une troublante scène de rue. 1978, une apparition émouvante d’Arthur Rimbaud. Jeunesse éternelle d’un poète de papier, fugitif et errant, ancré dans l’instant présent au coeur de Paris, et dialoguant avec la réalité du monde qui l’entoure.

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