ENTRÉES EN MATIÈRE
LA GALERIE NEGROPONTES S’AGRANDIT. TROIS PERSONNALITÉS REJOIGNENT SOPHIE NEGROPONTES À L’UNISSON DE SON AFFECTION POUR LA MATIÈRE, À LA RECHERCHE DE CES MÉTAMORPHOSES QUI LA SUBLIMERONT. À L’AFFICHE, ERWAN BOULLOUD, MAÎTRE DANS L’ART DU MÉTAL, GIANLUCA PACCHIONI, ORFÈVRE À GRANDE ÉCHELLE, ET JEAN-CHRISTOPHE MALAVAL, SCULPTEUR DE BIJOUX. «La galerie Negropontes est ce lieu où on peut regarder au-delà de la fonction de l’objet, en direction de son versant sculptural.» Sophie Negropontes ne parle pas de designer mais d’artiste et d’artisan. Elle entend revenir au mot d’origine, grec, kallitechnis, celui qui fait bien la technique. « Les artistes font des pièces uniques issues de leur propre imaginaire. » C’est avec eux qu’elle collabore dans un dialogue constant jusqu’aux allers-retours chez les artisans, la conception de leurs expositions, l’élaboration des éditions, les liens avec les musées. « J’ai toujours voulu être dans le monde de l’art, grâce ou à cause de Brancusi », qu’elle découvre intimement dans les photographies de son père Dan Er. Grigorescu. Il représentera avec elles la Roumanie à la Biennale de Venise en 1982. Sophie Negropontes revendique une vision contemporaine des arts décoratifs, une recherche du beau, « qui nous reconnecte avec le meilleur de soi, qui nous ressource». Les trois derniers arrivés la comblent. Ils ont en commun ce travail du métal, du bronze ou de l’argent avec des approches différentes mais avec cette même préciosité de joaillier. Quand elle présente le miroir cerné, nervuré d’un aluminium cuivré « rosé du matin, dans l’évocation de l’instant précis où le soleil éclaire la grisaille » de Gianluca Pacchioni, elle parle « de sobriété et d’extravagance à la fois, de baroque minimaliste, d’une belle digestion de la Renaissance italienne ». Elle est sa complice quand il trouve une pierre rare par sa taille ou sa couleur, ses méandres ou ses reflets: onyx orange, quartz rose, qu’il sertit en sellette. Elle aime la polyvalence d’Erwan Boulloud, magicien de toutes les matières, métal, bois, laiton, ciment. Il leur insuffle une vie intérieure, le processus à l’oeuvre se laisse entrevoir dans les soudures et cicatrices toujours apparentes. Jean-Christophe Malaval est le seul à concevoir à petite échelle, dans un rapport au corps qui portera ses créations en argent ciselé, patiné. Mais avec Sophie Negropontes, ses bijoux gagneront peut-être une autre échelle, une autre matière. « Ma théorie, chacun doit aller jusqu’au bout de soi-même, c’est ce que je fais avec les artistes.»