VOGUE France

Keren 5 questions à Ann

La chanteuse revient pour un nouveau disque mélancoliq­ue, tiré à quatre épingles. Rencontre express et littéraire.

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Pourquoi ce retour à l’écriture en français après quinze ans? Le choix de la langue vient naturellem­ent, il correspond aux endroits où je me trouve. Lorsque j’habitais à New York, les mots venaient en anglais. Je vis à Paris depuis plus de trois ans, ma fille est scolarisée en France, donc mon inspiratio­n est francophon­e. Et puis, j’ai cette fois principale­ment composé au piano, et les harmonies plus élégantes demandaien­t des textes plus ciselés, plus adaptés au français. L’album s’appelle «Bleue». Pour l’omniprésen­ce de la mer dans les titres ? Bleue, ce n’est pas vraiment une couleur, c’est une sensation. J’ai relu Les Vagues de Virginia Woolf, et j’ai été frappée par son écriture fluide, qui a un vrai rapport au son. On entend les scènes décrites dans le livre. Je voulais essayer à mon tour de transcrire le trouble : le bleu, c’est à la fois la marque sur la peau, c’est la mer, c’est ressentir le blues… Le disque est lent, comme s’il souhaitait ralentir le temps. C’est l’intention ? Complèteme­nt. J’ai grandi dans une maison où l’on écoutait des vinyles dans le salon comme on regarde un film, posé dans un fauteuil à côté de la platine. J’aime me dire que l’auditeur doit aussi s’arrêter un instant pour apprécier la musique, même si aujourd’hui, c’est un luxe un peu désuet! On trouve dans ce nouvel album un duo étonnant avec David Byrne. Comment est née la collaborat­ion ? En 2011, je donnais un concert à New York, et je l’ai reconnu dans le public. Deux ans plus tard, il a repris avec Anna Calvi une de mes chansons, Strange Weather, et c’était très beau. J’ai compris que nous nous plaisions mutuelleme­nt. Sa voix dans les Talking Heads est avec moi depuis l’enfance. Je n’avais pas encore écrit le titre, mais je l’ai contacté pour lui proposer de chanter en français ; il a accepté tout de suite. On s’est découvert une vraie complicité. Pourquoi avoir confié les photos et la pochette du disque à la créatrice de mode Bouchra Jarrar ? C’est sa première réalisatio­n dans la photo. C’est une amie de longue date, elle m’avait déjà habillée pour certains concerts. On discute beaucoup, et j’apprécie son esthétisme. Nous avons parlé de la sensation bleue, et on avait toutes les deux l’idée du noir et blanc, et de la peau. Il me semblait logique de lui confier le visuel, et elle a relevé le défi. «Bleue» (Polydor/Universal)

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