POLISHED
Son nom: Magda Butrym. Son talent: maîtriser suffisamment l’art du décalage pour rendre follement moderne une mode à la féminité presque vintage et au savoir-faire, comme elle, 100% polonais. Le monde adore. Par Théodora Aspart
au savoir-faire de ce pays. À commencer par les tissus artisanaux, qui n’avaient vraiment pas le vent en poupe quand j’ai lancé la marque.» De fait, tout ce qui est signé Magda Butrym est confectionné à la main en Pologne, point. L’ambition étant que «cette qualité, cette tradition, fonctionnent ensuite dans la rue, qu’on puisse mettre ces pièces au quotidien, sans occasion spéciale, martèle-t-elle. Il arrive qu’on croise des femmes un peu mal à l’aise, dépassées par des vêtements que je qualifierais de “big fashion”. Je ne veux pas que ceux que je crée soient intimidants ou représentent un quelconque challenge. J’aime qu’on me dise qu’ils sont exactement ce qu’on a envie de porter. Je trouverais passablement désagréable, au contraire, d’entendre que “l’idée” de la collection était bonne…»
Si ses créations sont tellement sophistiquées, c’est sans doute que MB n’a pas été élevée à l’école du négligé : «La manière de se vêtir a toujours eu son importance, dans ma famille. Mes parents faisaient très attention à leur apparence et à la façon dont ils nous habillaient. Je ne parle pas d’une considération particulière pour les marques, mais plutôt d’un souci du détail. Le look “saut du lit” n’était pas toléré.» À l’adolescence, elle étudie scrupuleusement les clips de MTV, décortique les panoplies de Cher, Madonna, Kate Bush et Debbie Harry. Et si elle s’interroge brièvement sur une carrière de médecin, c’est sans doute surtout pour la blouse blanche, «crissante et bien taillée». Elle prend donc l’option mode
Il y a toujours un volume quı dénote, démente, une une asymétrie, carrure une découpe bizarroïde, un sorti détail d’on en ne sait plumes où, des franges six fois plus longues que prévu...
et, à sa sortie de l’école, travaille pendant six ans pour des marques polonaises avant de lancer son propre label. Coup de chance à l’heure des réseaux sociaux, ses fidèles s’appellent Alicia Vikander, Gigi Hadid, Hailey Baldwin, Rosie Huntington-Whiteley ou Kendall Jenner, et les maniaques de la précision pourront toujours sortir leur calculette pour constater combien de millions de followers cette énumération représente. «Voir des femmes porter la marque dans les rues de Paris ou New York reste pour moi une expérience un peu surréaliste», signale la créatrice dont le champ d’action ne cesse de s’étendre (elle affiche aujourd’hui 150 points de vente dans le monde et vient de lancer des lignes de chaussures et de bijoux). En découvrant sa collection printemps-été 2019, les acheteurs ont fondu sur deux minirobes, une à manche cape drapée, l’autre à fleurs assez outrageusement décolletée, ainsi que des mules kitten heels à pois, à noeuds, à bride de cheville perlée… Des best-sellers annoncés qu’elle conseille de porter, pour briller chic, «en n’ayant jamais l’air de trop en faire et en sachant, quelque part, rester modeste».