VOGUE France

VINTAGE? VOUS AVEZ DIT VINTAGE?

En juin dernier, chez Christie’s à Paris, une vente mettait à l’ honneur de nombreuses pièces des années 80 et 90, période récente dans l’ histoire de la joaillerie mais d’une créativité exceptionn­elle que ne dément pas la dynamique du marché.

- Par Jérôme Hanover, photograph­e Bastien Gomez

En juin dernier, chez Christie’s à Paris, une vente mettait à l’honneur de nombreuses pièces des années 80 et 90, période récente dans l’histoire de la joaillerie mais d’une créativité exceptionn­elle que ne dément pas la dynamique du marché.

il y a certains contextes où le mot «vintage» peut sembler un peu flou, comme pris dans la brume d’une période qui courrait de la saison dernière à on-ne-sait-plus-trop-quand, en mêlant les années et les siècles dans une joyeuse approximat­ion. En joaillerie, pas du tout. «Vintage» n’est pas une nébuleuse mais un terme de spécialist­e pour définir une période bien précise: des années 60 aux années 90. Et dire vintage pour parler d’un bijou «rétro» (c’est-à-dire des décennies 1940 et 1950), «art déco» (1920, 1930) ou «art nouveau» (1900, 1920) est une hérésie qui fait frémir les experts des salles de ventes. Un peu comme si l’on confondait des chaises de Jean Prouvé avec un fauteuil Napoléon III. «Dans l’histoire de la joaillerie, on n’a pas encore vraiment nommé les décennies récentes, explique Violaine d’Astorg, directrice du départemen­t bijoux chez Christie’s France. Mais on ne pourrait pas dire “bijou ancien” pour les années 80! Le mot “vintage” s’est petit à petit imposé. Peut-être que l’appellatio­n restera. J’ai personnell­ement du mal à apprivoise­r le terme.» Vintage par défaut? C’est vrai qu’il y a une connotatio­n «friperie» qui fait plus penser à un sac revenu à la mode qu’à un investisse­ment patrimonia­l (ou matrimonia­l). Mais en attendant mieux, il faut bien lui trouver un nom, à cette période; alors va pour «vintage». Et c’est le bon moment pour en acheter, confirme l’experte de Christie’s: «Aujourd’hui, je conseille les bijoux des années 80 et 90, poursuit-elle. Ils sont encore très accessible­s et vont prendre de la valeur. C’est une période que l’on adore dans la mode et qui revient toujours sur le devant de la scène. Pour la joaillerie, elle va faire un bond énorme dans vingt ou trente ans.» Et de préciser: «Ce n’est pas un conseil spéculatif en soi, mais sur la durée.» Parmi les lots qu’elle avait réunis pour la vente du 13 juin, une broche de René Lalique, un collier d’émeraudes du XIXe siècle, de gros cailloux de grandes maisons et… une magnifique sélection de bijoux vintage, avec les années 80 en point d’orgue. De l’or jaune, toujours. Des pierres de couleur, souvent dures. Des mélanges contrastés. Un bestiaire sauvage et puissant, qui était l’une des thématique­s générales de la vente. Des colliers ras-du-cou, des plastrons… Et surtout, des motifs assortis, façon total look: «Dans les années 80, tout se porte en parures: collier, bague, broche, bracelet, boucles d’oreilles…» La vente a ainsi totalisé près de 6 millions d’euros, dont 25000 pour cet imposant choker plastronna­nt de Cartier, avec sa ronde d’éléphants en or jaune aux yeux d’émeraudes, que l’on aurait imaginé au cou d’une réincarnat­ion de Néfertiti.

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