PARFUMS NOSTALGIE
Ces nouvelles fragrances, comme des transpositions métaphoriques du passé, célèbrent les grandes époques dans un monde de plus en plus fluctuant.
Ces fragrances célèbrent les grandes époques, dans un monde de plus en plus fluctuant. Par Mélanie Nauche, photographe produits Bastien Gomez
Phénomène repéré ces derniers mois chez les parfumeurs: puiser l’inspiration dans le passé, refuge rassurant car immuable.
«Il ne s’agit pas seulement d’un effet de mode, mais d’une tendance de fond. Dans notre monde contemporain, les repères sont de plus en plus instables. C’est pourquoi nous recherchons des valeurs sûres, des racines communes et des mythes fédérateurs», explique Frédéric Bourdelier, directeur culture de marque et héritage Dior Parfums. Qu’il s’agisse du Paris d’avant-guerre (Diptyque), des défilés de mode des années 50 (Maison Christian Dior) ou de l’itinéraire de Louis Feuillée (Le Couvent des Minimes), l’objectif est le même: concevoir des effluves inédits et intemporels, sans copier littéralement le passé. «Pour Odeur du Théâtre du Châtelet, je suis partie d’un concept plus que d’une senteur précise. Je ne cherchais pas à reproduire l’odeur du lieu à l’identique, mais plutôt son ambiance, créative et décalée», explique Caroline Dumur à propos du nouveau parfum Comme des Garçons. Une réponse à ceux qui redoutent des jus désuets, pas vraiment modernes. «Au contraire! Il n’est pas ici question de nostalgie, mais d’une réelle appétence pour des histoires fortes et universelles, qui permettent d’ouvrir les portes de la création et d’imaginer le futur… Rien n’est figé, notre patrimoine est plutôt un vaste territoire de liberté. À nous de le revisiter», conclut Frédéric Bourdelier.
Sillage intemporel On connaissait déjà le mystérieux jus Coromandel évoquant les paravents laqués chers à Gabrielle Chanel. Olivier Polge en imagine la quintessence grâce à : 1) l’encens, joué en majeur, 2) les accents cuirs très concentrés du labdanum et 3) l’hyper densité du benjoin.
Coromandel L’Extrait, Les Exclusifs de Chanel, 15 ml, 230 €.
Mémoires olfactives Dernier né des Parfums Remarquables, itinéraire olfactif de Louis Feuillée (le botaniste de Louis XIV), Anori est aussi le plus cristallin. Comme si on avait capturé le vent boréal, entre un départ fusant de cardamome glacée, un coeur frais de magnolia et le fond bois salé, comme l’air de la mer. Anori, Le Couvent des Minimes, 50 ml, 49 €.
Sensation vintage En 1908, Guerlain imagine le parfum Rue de la Paix, contenu dans le tout premier flacon quadrilobé. Plus d’un siècle plus tard, la maison continue à rendre hommage à son écrin mythique. Ici, en réinterprétant son design, tout revêtu de gold. Collector. Mon Guerlain Édition 2019, 50 ml, 92 €.
Vestige parfumé Bien inspiré par les pérégrinations d’Alexandre le Grand, Yann Vasnier imagine les senteurs humées par le roi
au coeur de la province de Médie. Soit du pamplemousse, de la mandarine, du cyprès, du cèdre… Une vraie balade olfactive. Médie, Cire Trudon, 100 ml, 180 €.
Belle Époque On reconnaît d’abord les notes vertes qui s’effacent au profit d’épices caractéristiques de la marque, pour laisser place à l’effet chaud bois/patchouli. Le tout premier chypre de Diptyque est une jolie ode à la période et à la ville qui ont vu naître la maison: le Paris de l’Art nouveau. Eau Capitale, Diptyque, 75 ml, 130 €.
Esprit 50’s Rouge Trafalgar tire son nom (et son odeur) des modèles, bien souvent vermillon, qui ravivaient l’attention des spectateurs lors des très longs défilés Dior dans les années 50. Ce qui explique ce mélange ultra-vivifiant de fruits rouges et pamplemousse. Rouge Trafalgar, Maison Christian Dior, 125 ml, 198 €.
Senteur rétro À l’occasion de la réouverture du théâtre du Châtelet après trois ans de travaux, Caroline Dumur retranscrit avec brio son ambiance très XIXe siècle via des notes à la fois enveloppantes (musc, cashmeran, fleur d’oranger) et survoltées (poivre noir, essence de rose, accord café).
Odeur du Théâtre du Châtelet, Comme des Garçons, 200 ml, 120 €.