«On ne voulait pas copier les écoles internationales, mais reconstituer ce qui fait l’identité parisienne de la mode.»
L’IFM et l’École de la chambre syndicale n’étaient-elles pas déjà de grandes écoles de mode ?
Les choses étaient morcelées, il n’y avait pas de vision d’ensemble. L’IFM, lorsqu’il a été créé en 1986, était une école essentiellement basée sur le management. Or, quand on regarde le niveau international, la Central Saint Martins, la Parsons School ou La Cambre, toutes ces écoles sont tirées, comme la mode dans son ensemble d’ailleurs, non pas par le management mais par la création. Une grande école de mode doit former les jeunes et les talents aux métiers de la création, ce qui n’était pas au coeur du projet de l’IFM qui n’en proposait qu’un cursus marginal. De l’autre côté, il y avait l’École de la chambre syndicale qui, depuis 1927, est basée sur la technique et les savoir-faire et qui recrute principalement des profils locaux. L’attractivité internationale vient de l’image et de la notoriété de l’école. L’IFM étant bien coté dans les classements internationaux, notamment celui de BoF, nous avons capitalisé sur la marque IFM et gardé le nom pour la nouvelle entité créée.
Comment, en réunissant une école technique et une école de management, obtient-on une école de création ?
Au-delà du rapprochement juridique de ces deux écoles, le projet de l’Institut français de la mode repose sur de tout nouveaux cursus de création avec une nouvelle équipe qui vient de La Cambre, spécifiquement pour développer des programmes de bachelor et de master. Ce ne sera pas un enseignement satellite mais le coeur du projet. Nous sommes la seule école à reposer sur ces trois piliers, management, savoir-faire et création et proposer des parcours spécifiques, autonomes mais connectés.
Vous pensez que cette spécificité tricéphale est liée aux besoins de l’industrie parisienne ?
La réputation, l’image, l’attractivité d’une école comme d’une maison, c’est la création. Mais quand je regarde Paris – où sont les plus gros recruteurs du secteur – et les besoins de l’industrie, je constate qu’il y a une identité, une différence et, par conséquent, une préférence. On ne voulait pas copier les grandes écoles internationales, mais reconstituer ce qui fait l’identité parisienne de la mode. Il est légitime de créer, à Paris, une grande école de mode qui soit adaptée aux besoins des grandes maisons qui sont à Paris, d’où un taux d’employabilité de 93 %.
Est-ce une nouvelle façon d’envisager les différents métiers de la mode autour de la création? Il y a aujourd’hui dans certaines maisons de nouveaux profils de designers qui viennent du monde de l’art, de l’image, de l’architecture : ils ont une sensibilité créative mais pas forcément appliquée à la mode. Ils orchestrent une image globale et les maisons ont besoin de plus en plus d’installer autour d’eux des gens capables de transformer ces impulsions créatives en vêtements, des gens qui connaissent la technique, qui savent reconnaître la qualité d’un tissu… L’industrie aujourd’hui souhaite que les studios créatifs, les ateliers, le management soient peuplés de personnes qui connaissent le langage des autres. Il faut faire travailler ces gens ensemble, c’est structurant pour les profils de demain. Il faut savoir manier les formes, les silhouettes, les coupes, le modélisme 2D et 3D et dépasser les étiquettes, que vous soyez au studio ou au merchandising. Nous sommes absolument convaincus que la maîtrise de la technique est un élément clé dans la formation des créatifs. Et même pour les élèves en management, nous offrons la possibilité d’un double diplôme modélisme pour réconcilier les valeurs des métiers de la main et de l’esprit.
Dans les locaux de l’IFM, les élèves disposent de nombreux ateliers pour aborder les différentes disciplines et techniques de la couture.