VOGUE France

FLASH-BACK

Linda Evangelist­a par Bill King, Vogue Paris, septembre .

- Par Charlotte Brunel

’est une image qui cadre mal avec l’idée que l’on se fait de la haute couture et de ses robes du soir, belles à regarder mais dif ciles à vivre. Il y a d’abord le grain de folie de Linda Evangelist­a, sourire magnétique et pose de danseuse de amenco, prête à vous capturer dans sa cape en plissé de soie.

Le top canadien, découvert trois ans plus tôt, nage dans le bonheur : avec ce numéro dédié aux collection­s de haute couture, elle fait sa première couverture pour Vogue Paris. Derrière l’objectif, l’oeil de Bill King, célèbre pour ses images pleines d’énergie, d’humour et de glamour, saisit au vol cette vitalité plus grande que nature. Comment faire autrement avec une robe Emanuel Ungaro? Avec elle, les femmes n’ont plus peur de danser, même sur les volcans. En 1987, le Français, qui a fondé sa maison vingt-deux ans plus tôt, est au faîte de sa gloire. Avec ses modèles couture et sexy qui rajeunisse­nt le vestiaire traditionn­el du soir, l’ancien élève de Balenciaga offre aux femmes des années 80 une féminité jusqu’au bout des seins. Jackie Kennedy, Liliane Bettencour­t ou Isabelle Adjani sont folles de sa mode maximalist­e qui ose les couleurs vives et les clashs d’imprimés – il se fera pourtant assassiner par la presse pour avoir introduit ces mélanges dès 1967 –, cultive des volumes audacieux, use et abuse des volants, plissés ou drapés sur une même silhouette et fond pour les tissus les plus sensuels. Les hommes aussi adorent et c’est tant mieux… ou faudrait-il dire, exprès. «J’ose af rmer qu’aucun homme ne peut résister à l’envie de prendre une femme dans ses bras si elle porte cette étoffe», con ait Emanuel Ungaro en caressant une faille de soie dans un reportage télévisé réalisé la même année. Le couturier, ls d’un tailleur des Pouilles venu s’installer à Aix-en-Provence pour fuir le fascisme, pourrait-il assumer aujourd’hui sa réputation ( atteuse à l’époque), «d’obsédé sensuel»? Sans doute pas. Reste, malgré sa disparitio­n en décembre 2019, un sublime discours amoureux tissé pendant plus de vingt-cinq ans avec les femmes et que vient rappeler cette image de Linda Evangelist­a au charme fou. Reste aussi l’idée que la création doit passer par le risque et donc par l’excès. Les mix & match d’imprimés, les jeux de proportion­s démesurées et autres volants géants qui font le miel d’un Gucci ou d’un Balenciaga prouvent que cet adage a trouvé ses héritiers. L’insoucianc­e en moins.

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