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LE POINT DE VUE DE VOGUE

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j’ai rencontré Jean-Paul Gaultier dans les années 90 alors que j’avais rendez-vous dans sa maison de couture. À l’époque, j’étais styliste free-lance et j’aimais passer du temps avec l’équipe, irrésistib­le au possible, en charge de sa presse. Je me souviens de ce premier tête-à-tête, j’étais très impression­née par lui.

Jean-Paul était déjà une star et une véritable figure populaire. Au-delà de son immense talent, il a été le premier couturier à briller dans la culture pop. Ses créations parmi les plus originales vibraient sur le dos d’autres stars (Madonna, Neneh Cherry, les Rita Mitsouko…) sur scène ou dans des vidéos, véritables petits bijoux, qui passaient en boucle sur MTV. Lui-même présentait une émission, Eurotrash, dans laquelle son humour et son accent franchouil­lard faisaient fureur.

En fait, Jean-Paul a toujours eu un train d’avance : il a été le premier à importer la rue et le punk dans les salons de couture, à organiser des castings sauvages, à faire défiler tous les corps, tous les styles, tous les genres, tous les âges, tous les types de peaux sur ses podiums. À l’heure où la diversité et l’inclusivit­é sont au coeur du débat, Jean-Paul a symbolisé avant tout le monde l’ouverture d’esprit, une révolution du chic, de ses codes. Et absolument la modernité.

De cette rencontre est née une amitié qui a traversé les années, et une complicité qui m’a poussée à trois reprises à accepter de défiler pour lui. Comme en témoigne cette photo.

Derrière le génie de la mode, unanimemen­t admiré par ses confrères, il y a un homme éminemment attachant. Un homme qui adore la vie, le plaisir, rire. Un homme fidèle à lui-même, à ce qu’il est, à ce qu’il aime, de la télé à la variété, et qui se fout des préjugés. Jean-Paul exhale l’authentici­té et un talent pour la proximité qui assoit encore un peu plus sa popularité.

En janvier dernier, il a choisi de présenter sa dernière collection au cours d’un show grandiose, une joyeuse parade dans un théâtre du Châtelet chauffé à blanc. Aucune tristesse, aucune nostalgie, ses adieux avaient un air de fête. En rien un air de fin. Ces adieux ressemblai­ent en fait à un nouveau départ, au prologue d’un prochain chapitre dans la carrière de Jean-Paul. Après un parcours aussi grandiose, un tel feu d’artifice d’idées, que va-t-il bien pouvoir inventer ? Une seule certitude, il saura encore nous surprendre. C’est l’un des grands talents de Jean-Paul Gaultier.

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