Une année érotique
C’est agréable d’imaginer que 69 n’est pas un roman, que tout est réellement arrivé à Juliette Kahane, autrice notamment d’Une fille, où elle raconte, avec une écriture concise et ramassée, son adolescence et sa difficulté à prendre place et la parole, auprès de son père mythomane et égocentré, l’éditeur Maurice Girodias. Dans ce dernier récit, Juliette Kahane multiplie de nouveau les clins d’oeil autobiographiques tout en nous faisant glisser dans le romanesque comme sur un toboggan. Le titre 69, assorti du bandeau «Nous nous sommes tant aimé(e)s», peut se comprendre de toutes les manières possibles : le texte y explore l’après-68, la liberté sexuelle et, à la fin du livre, on y apprend que la narratrice a 69 ans – ce qui ne dure pas. Elle doit participer à un colloque, et elle apprend inopinément que l’invité d’honneur est un écrivain américain disparu, avec qui elle a eu une brève histoire passionnelle. Qu’a-t-elle vécu avec le mythique Sam Rothberg ? Rien de mieux que la lecture d’un vieux journal intime pour repartir à la découverte de ce qu’on était. Si 69 touche, c’est parce qu’il ne sacralise pas le passé, notamment en mettant en scène des amies du MLF qui se demandent comment elles peuvent être utiles à la génération #metoo. 69,