Voile Magazine

La mi-tempsp à Lanzarote

Après un dernier tour des pontons à Douarnenez, nous avons suivi avec passion cette première étape qui a mené la flotte jusqu’aux Canaries à un rythme soutenu. Premier constat : les favoris sont au rendez-vous !

- Texte et photos : Cécile Hoynant.

DIRE QU’UN MINI 6.50

est petit est une lapalissad­e. C’est pourtant ce qui frappe systématiq­uement quand on monte à bord et que, depuis le cockpit, l’étrave est si proche. Lorsqu’on pénètre à l’intérieur par le trou de souris qu’il est exagéré d’appeler une « descente », on doit s’agenouille­r pour avoir une certaine hauteur sous barrots. A bord des prototypes à quille basculante, pour matosser à l’avant, c’est-à-dire s’amuser à déplacer des sacs de 35 kg, il faut escalader la toile d’araignée des palans. Pour faciliter la tâche, l’intérieur tout en carbone n’est éclairé que par la lueur d’espoir d’atteindre l’autre côté de l’Atlantique ou, pour les meilleurs, de gagner. Cette lueur brille intensémen­t dans le coeur de Davy Beaudart, grand favori de cette édition en proto. Méfiance tout de même, Flexirub n’est pas le seul à avoir un gros nez puissant au reaching. Le n°888 dessiné par Mer Forte (l’écurie de Michel Desjoyeaux) lui fait de la concurrenc­e. Le numéro gagnant pourrait bien être le 8 à condition que le Suisse Simon Koster parvienne, malgré son manque d’entraîneme­nt, à tirer le meilleur parti de sa monture (équipée de dérives courbes pour un « effet foil »). A surveiller également, une poignée de prototypes au nez tranchant menés par des skippers qui ont le nez fifin. Le James Bond moderne sera peut-être Frédéric Denis, le 008, un plan Lombard ayant souvent été aux avant-postes ces derniers mois. L’édition 2015 marque aussi l’envol d’une nouvelle génération de minis de série. L’Ofcet 6.50 d’Etienne Bertrand, construit par les chantiers rochelais Prépa-Nautic et Hervé, est représenté par deux gars très sérieux : Ian Lipinski ( Entreprise­s Innovantes) et Julien Pulvé ( Novintiss). Une autre paire de skippers est attendue au tournant : Charly Fernbach et Benoît Hantzperg. Ils défendent les couleurs du chantier Structures, pour qui le succès du Pogo 3 est évidemment un enjeu majeur. Nous ne pouvons citer tous les prétendant­s au podium. Si la première étape a déjà livré son verdict, il sera toujours temps, à l’issue de la course, d’honorer les vainqueurs comme il se doit... Mais revenons à Douarnenez. A deux jours du départ, les 72 « ministes » s’attardaien­t peu sur les pronostics. Si leurs rêves voguaient déjà sur les eaux turquoise de la Guadeloupe, à 4 000 milles du Pays bigouden, la dure réalité de la « job list » ramenait les esprits vagabonds sur les pontons de Port-Rhu, que nous pourrions rebaptiser « Port-ruche ». Il suffifisai­t d’enquêter sur la longueur de la « job list » pour mesurer le stress des skippers. La profondeur des cernes indique quand celle-ci continue de s’allonger. Les nerfs de certains ont été mis à rude épreuve : c’est le cas de Nicolas d’Estais ( Librairie Cheminant) qui a démâté trois semaines avant le départ. Ou de Luke Berry ( Associatio­n Rêves) qui, à une semaine du jour J, a dû gérer la réparation du pilote automatiqu­e, de la barre et d’un hauban ! Néanmoins, malgré l’étrange pouvoir auto-régénérant de la « job-list », les skippers arrivent à bout des préparatif­s, à deux ou trois lignes près. Cela laisse du temps à Charly Fernbach, sponsorisé par Hénaff, d’installer un fumoir à saucisson. Le Belge Jonas Gerckens ( Netwerk) en profite pour planquer du chocolat un peu partout dans le bateau. Il est l’heure d’embarquer pour les peluches porte-bonheur et autres souvenirs. Un rituel qui n’est pas du goût de tous. Vincent Grison ( Roll my Chicken) avait affiché une photo de sa famille qu’il a vite retirée pour limiter les irrépressi­bles montées de larmes provoquées par la fatigue et la solitude. Car Jean Saucet, coach à La Rochelle, a beau dire qu’au vu de la météo les « ministes » partent en vacances, la transatlan­tique en solitaire mérite sa réputation de super marathon. Bien plus carrossabl­e qu’en 2013, le golfe de Gascogne a tout de même fait des éclopés. Le passage du front froid qui a succédé à la pétole du début de course a créé un rythme chaotique délicat à gérer quand on n’est pas encore amariné. A peine plongés dans le grand bain, Maxime Eveillard, Dominik Lenk ou Yury Firsov ont dû passer par la case « escale technique » à cause d’avaries matérielle­s. Parfois, c’est le corps qui a lâché. Florian Lakeman ( Gimmick) a écrasé le frein et mis les voiles sur Gijon où il s’est empressé de les affaler.

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