Voile Magazine

En flotte Le Rallye des Iles du Soleil

Boucler une transatlan­tique, ces hommes et femmes en rêvaient sans oser se lancer. Avec un cadre sécurisant et convivial, le Rallye des Iles du Soleil a fait office de déclic. De Lanzarote à Marie-Galante, onze équipages ont sauté le cap de l’Atlantique.

- Texte et photos : Olivier Bourbon.

SOUS LE SOLEIL ANTILLAIS,

les visages sont joyeux, l’ambiance festive, les coeurs légers. Et pour cause, une bonne partie des femmes et des hommes que nous rencontron­s viennent de réaliser un rêve : traverser l’Atlantique à la voile. Certains ne semblent pas encore le réaliser. Ils l’ont pourtant bel et bien fait, s’élançant de Lanzarote le 18 novembre, cap sur l’authentiqu­e et charmante île de Marie-Galante, dans le cadre du Rallye des Iles du Soleil. Ce nom vous est peut-être familier : l’événement existait déjà depuis 1990 et était organisé sur un parcours à destinatio­n du Brésil, avant une extraordin­aire remontée du fleuve Amazone. Grand Pavois Organisati­on a racheté le Rallye en 2012 et l’a donc relancé cette année sur un nouveau parcours vers les Antilles. Pour cette première édition, il y avait quelques conditions à remplir pour s’inscrire, notamment se présenter avec un bateau de 35 à 65 pieds (le Sun Fast 3200 MaïGab a obtenu une dérogation) et un équipage composé d’au moins quatre personnes. Onze bateaux ont relevé le défi, dix monocoques et un catamaran. Sur ces onze équipages, neuf étaient menés par des amateurs (dont certains éclairés), et deux étaient skippés par des marins profession­nels qui encadraien­t des novices venus vivre le frisson du grand large. Dix voiliers sont arrivés à bon port. Seul l’Astrée (Amel 64) a malheureus­ement fait demi-tour après quelques jours de mer et est revenu vers Puerto Calero (Lanzarote). Le leitmotiv des organisate­urs du rallye correspond aux attentes de participan­ts qui ne traversera­ient pas l’Atlantique sans un soutien logistique : il faut se montrer rassurant et donc mettre en place un contexte sécurisant. Cela passe par un encadremen­t solide à Lanzarote, en amont de la navigation. Briefings et séminaires de préparatio­n ont ainsi été organisés, comme des aides techniques et pratiques, des contrôles et exercices de sécurité et de survie, des points météo, une formation médicale… Rien n’a été laissé au hasard. « A la fin des formations à Lanzarote, les organisate­urs nous ont remis un road-book très complet avec toutes les données et informatio­ns utiles pour prendre la mer sereinemen­t. C’était rassurant d’avoir ce document à portée de main, au cas où », souligne Pierre Eeckman, skipper du Jeanneau 57 Babyloup III.

« ON EN REVAIT DEPUIS TELLEMENT LONGTEMPS ! »

Une fois en mer, le suivi des participan­ts était également poussé. « On envoyait des bulletins météo quotidiens avec des nouvelles des bateaux, ainsi que des relevés de position des voiliers plusieurs fois par jour. Ainsi, chaque concurrent savait où se situaient ses camarades. Nous avions à nos côtés un directeur de croisière, Denis Hugues, qui surveillai­t l’ensemble de la flotte » explique Alain Pochon, président de Grand Pavois Organisati­on. « La newsletter quotidienn­e était sympa pour savoir comment allaient les copains. Quant aux bulletins météo, ils permettaie­nt d’avoir une vision plus globale de la situation sur l’Atlantique qu’en prenant simplement les fichiers Grib avec son Iridium. Cela apportait de la sérénité » indique pour sa part Manu Lefrais, skipper profession­nel aux commandes du Pogo 12.50 Purple Rain, premier bateau à l’arrivée de ce rallye, après vingt jours de mer. Les proches des engagés sont aussi rassurés en suivant les positionne­ments des bateaux sur le site du Rallye. Ce suivi a permis aux équipages de se sentir soutenus. Christian Vermet, propriétai­re du très chic Amel 64 Tango Too, va plus loin : « Dans un tel cadre de sécurité, on peut tout oser. » Les profils des participan­ts à cette nouvelle version du Rallye des Iles du Soleil étaient divers, dont certains ont (enfin !) pris le temps d’assouvir leur désir de grand large. « J’ai vendu mon activité il y a trois ans et je cherchais un projet de navigation sympa, raconte Christian Vermet. Avec ma femme, nous venions d’embaucher Miguel, un jeune skipper, quand j’ai entendu parler du Rallye des Iles du Soleil. Tout seuls, nous n’aurions jamais fait la transat. Mais dans ce contexte, on s’est dit banco. On en rêvait depuis tellement longtemps ! Cette traversée a été un vrai bonheur. » A bord du seul catamaran de la flotte, l’Helia 44 Anpelouza, Jérôme Gromenil et sa femme Giselle profitent eux aussi de leur retraite, passant environ six mois de l’année

Marie-Galante a tous les atouts pour se remettre d’une vingtaine de jours au large.

sur leur voilier. « Mon rêve, c’était un grand tour de l’Atlantique, le Rallye a été une aubaine ! confie jérôme. Quand on approche des 70 ans, on commence à hésiter sur la forme physique. Le soutien logistique est aussi important que réconforta­nt, même si la portion la plus difficile a finalement été La Rochelle/Les Canaries. »

SE PRENDRE AU JEU DE LA REGATE

Les bateaux engagés étaient aussi divers, de 32 à 65 pieds, avec des performanc­es et des potentiels hétérogène­s. Les équipages n’ont pas pu s’empêcher de se tirer la bourre. « Chaque jour, on attendait les positions des autres bateaux, confirme Pierre Eeckman ( Babyloup III). J’ai souvent entendu dire que l’on s’ennuyait lors d’une longue traversée. Là, ce n’était pas le cas. On a toujours quelque chose à surveiller, un bateau à dépasser ou à contenir, ça tient en haleine ! » Patrick Guiton n’a pas hésité à prendre une route nord plus inconforta­ble pour tenter de griller la politesse aux montures plus imposantes. Et ça a payé. « On a pimenté l’affaire en nous livrant une belle bataille avec le Pogo 12.50 Purple Rain. On s’est tiré la bourre jusqu’au bout. En même temps, on s’envoyait des petits mots sympas, on s’encouragea­it mutuelleme­nt, on se parlait à la VHF quand c’était possible. Au final, nous sommes arrivés à Marie-Galante seulement dix heures après le Pogo, nous n’avons rien pu faire à certaines allures qui lui étaient favorables. S’il y avait un temps compensé, on serait loin devant. En tout cas, on ne s’est pas ennuyés ! » La conviviali­té est justement l’un des points forts du rallye, un point fort mis en avant par les divers protagonis­tes qui ont noué des liens sur l’eau comme à terre. Une fois à Marie- Galante, certains ont pu refaire le match, d’autre ont même navigué de concert par la suite. Cela donnait l’impression d’une bande de copains venus partager la même passion dans un certain esprit de famille. « On ne fera jamais comme l’ARC (Atlantic Rally for Cruisers) qui réunit des centaines de bateaux. Selon nous, c’est trop gros. Nos onze équipages se sont régalés et ont apprécié l’ambiance conviviale. Nous voulons garder un esprit de solidarité, de bonne humeur, de connaissan­ce mutuelle. Notre rallye ne doit pas devenir une usine à gaz. A terme, 50 à 60 bateaux, ce sera un grand maximum », annonce Alain Pochon. Grand Pavois Organisati­on espère réunir une trentaine de bateaux pour 2018, qui s’élanceront de La Palma (Canaries). Si la destinatio­n reste Marie Galante, une escale est prévue à Mindelo (Cap-Vert). Comme l’an dernier, des places de ponton seront réservées aux Canaries pour accueillir les bateaux inscrits avant le départ pour effectuer sereinemen­t les derniers préparatif­s et, si besoin, accueillir dans des conditions propices de nouveaux équipiers. Bon à savoir : le Rallye des Iles du Soleil a monté des partenaria­ts avec des chantiers comme Fountaine-Pajot, Amel, Bénéteau, Jeanneau… Les propriétai­res des bateaux de ces marques peuvent bénéficier d’opérations et d’avantages spécifique­s. Tout semble réuni pour que la famille s’agrandisse dans les années à venir !

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