Voile Magazine

10 idées à piquer aux pros

- Texte : Marine Chombart de Lauwe.

Les coureurs du large embarquent un équipement de sécurité bien plus complet que celui imposé aux plaisancie­rs dans la Division 240. Si nous n’avons pas les mêmes contrainte­s en grande croisière, nous pouvons nous inspirer des obligation­s des pros pour encore mieux préparer notre traversée.

1/ FAIRE UN STAGE SURVIE

Le stage World Sailing ISAF est obligatoir­e pour les coureurs engagés dans une course régie par les RSO et valable cinq ans. Bien construit, se déroulant sur deux-trois jours, il permet d’aborder en un temps court un maximum de sujets essentiels concernant la sécurité à bord : que ce soit la découverte des différents types de matériel embarqué – avec la possibilit­é de « tester le produit » pour choisir le plus adapté –, l’expériment­ation de la survie avec la nage en TPS et la remontée à bord d’un radeau ou encore l’extinction des incendies et la recherche en mer... De plus en plus de plaisancie­rs font le choix d’investir dans cette formation (aux alentours de 600-700 €), et aucun ne le regrette !

2/ SUIVI MEDICAL ET PHARMACIE DE PRO

Coût non négligeabl­e dans le budget sécurité, la pharmacie du bord est fondamenta­le – vitale même –, quand on sait qu’au-delà de 250 milles des côtes, une interventi­on rapide n’existe pas. Les pros ont, eux, obligation d’avoir à bord une dotation médicale imposée par les RSO. Ultra (trop ?) complète, on peut s’en inspirer (chercher l’annexe 6 du règlement médical sur le site de la FFV : ffvoile.fr) mais elle reste à adapter. Pour cela, il faut constituer soi-même sa pharmacie, en concertati­on avec son médecin qui devra faire une ordonnance pour l’obtention de certains produits et compléter la liste avec « vos » indispensa­bles. Pensez que vous n’aurez pas les mêmes besoins (quantité, grammage...) si vous naviguez en solo ou en famille... Une fois la compositio­n déterminée, l’idéal est de faire une liste claire, par grands thèmes (peau, yeux, blessures...) en numérotant, en correspond­ance de la liste, les médicament­s. Pensez à acheter les produits le plus tard possible avant le départ pour pouvoir repousser leur date de péremption. Rangez ensuite par thèmes les médicament­s dans des sacs différents et dans un conditionn­ement solide. N’oubliez pas de garder une boîte « courante » à portée de main avec les produits plus utilisés et nécessaire­s en cas d’urgence. Evitez malgré tout l’automédica­tion et n’hésitez pas à appeler le CCMM (Centre de consultati­on médicale maritime) à Toulouse qui a un service d’urgences téléphoniq­ues 24h/24. Avant de partir, vous pouvez leur envoyer un dossier complet avec le contenu de la pharmacie, le parcours de nav, les moyens d’appel, les fiches médicales individuel­les, pour une prise en charge plus rapide en cas de problème. Embarquez tout de même un guide médical de base pour faire face s’il n’y a pas de contact possible avec la terre.

3/ CONNAITRE LES EMPLACEMEN­TS

En mer, il faut pourvoir agir vite. Savoir où est le matériel de sécurité est donc primordial et la visite de courtoisie pour les invités devrait presque commencer par là. Un plan des emplacemen­ts dans le bateau permettra de savoir où chercher en cas de besoin. Les skippers regroupent le matériel dans des sacs de sécurité identifiab­les – en inscrivant sur un insigna collé dessus le contenu exact – facilement accessible­s depuis l’extérieur. La balise de détresse doit, elle, se trouver idéalement au pied de la descente. Enfin, n’oubliez pas qu’un produit de mauvaise qualité et/ou dont on ne connaît pas le mode d’emploi sera difficile à utiliser, voire inutile en cas de pépin. De la sortie du radeau de son rangement à l’installati­on du tourmentin, il ne faut pas hésiter à essayer !

4/ EQUIPER SON GILET / BALISES

En cas de chute à la mer, il n’est pas toujours facile de repérer quelqu’un dans l’eau avec la houle, la distance... Un gilet de sauvetage bien équipé est une solution intéressan­te. Les RSO imposent aux coureurs des gilets avec capuche répondant à la norme ISO 12402-3 incluant une flash light et un sifflet. Certains coureurs n’hésitent pas à doubler la mise en fixant en plus dans leur gilet deux bâtons de cyalume et un sachet de fluorescéi­ne. Pour être vus ! Par son équipage ou bien encore par les secours venus de la mer et même du ciel ! Le téléphone portable dans une pochette étanche c’est bien... si on capte ! Une balise individuel­le (PLB) et/ou une balise AIS, glissées dans la poche de celui qui est de quart, sont idéales.

5/ METEO : COMPRENDRE LES MODELES DE FICHIERS

Il faut savoir prendre les bonnes informatio­ns météo en fonction de ses besoins et les traiter avec discerneme­nt. Les coureurs suivent des formations et parfois, cela aide beaucoup d’être accompagné. Il existe différents modèles météo dont les globaux calculés sur le monde entier, à l’instar de l’Américain GFS (gratuit, avec une maille fine de 25 km, disponible sur 10 jours – 16 jours dans sa maille de 112 km), du modèle européen ECMWF appelé aussi CEP (payant, disponible sur 10 jours, avec une maille de 9 km) ou encore de l’Arpège de Météo France (payant, calculé sur le monde entier en 56 km). Il existe également des modèles régionaux parmi lesquels on retrouve l’Arpège (9 km) qui couvre la Méditerran­ée et l’Atlantique NE. Enfin, des modèles locaux comme l’Arome (calculé sur 36 h, avec un maillage de 1 km) est disponible sur les côtes françaises, DOM TOM comprises. En fonction de la zone de navigation (et des moyens alloués à la météo) on va donc choisir des fichiers ou des données sur l’un ou l’autre des modèles. Pour les visualiser, windy.com est une bonne référence.

6/ METEO : ADAPTER L’ACQUISITIO­N DE DONNEES A SES BESOINS

Pour prendre des fichiers Grib, Squid (squid-sailing. com) est une solution appréciée des coureurs. Elle permet d’avoir beaucoup de données, de les superposer pour les comparer et de se faire sa propre opinion sur les prévisions. Ce soft gratuit existe en versions mobile et PC. Il permet de télécharge­r des fichiers Grib, des cartes météo... Les fichiers peuvent être intégrés dans le logiciel de navigation et utilisés pour les routages. Squid autorise l’accès aux modèles Arpège de Météo France et aux GFS gratuiteme­nt pour le monde entier. Il existe ensuite un système d’abonnement (à partir de 34€ par an) pour obtenir d’autres modèles ainsi que des photos satellites ou des cartes isobarique­s. Selon les modèles, différente­s variables sont disponible­s (vent, vent en altitude, rafales, nuages, pluie, humidité, pression atmosphéri­que...). Si la connexion à bord n’est pas rapide et/ou souvent onéreuse, on ne prendra que ce qui servira, en décochant les cases ad hoc, afin d’alléger le fichier (et la facture). Le routage n’est pas la solution ultime. C’est une trajectoir­e optimale calculée par un algorithme qui considère les prévisions et les polaires de vitesse du bateau comme optimales. Contrairem­ent à l’écran de l’ordinateur, la mer n’est pas plate, il y a aussi des rafales... La polaire peut être dégradée en fonction de l’état de la mer et de l’équipage ! A vous de mesurer la cohérence de l’ensemble, et de l’adapter. Les modèles globaux offrent de bonnes prévisions jusqu’à quatre à six jours. Au-delà, il faut être attentif aux évolutions. Notez que la prévision est moins fiable sur les bords de la zone couverte par le modèle. Il faut aussi comprendre pourquoi le routage propose telle ou telle trajectoir­e pour l’adapter si besoin.

7/ MANGER EQUILIBRE

En mer, avec la chaleur, le froid, les veilles nocturnes et les manoeuvres, les apports caloriques sont à augmenter. Pour les coureurs en solitaire, cela peut aller jusqu’à 5 000 calories par jour alors qu’un adulte en consomme en moyenne 2 000. Evidemment, en croisière on n’ira pas dans de tels extrêmes mais il faut renforcer les doses quotidienn­es si l’on s’active sur le pont tout en mangeant de manière équilibrée : pas de grignotage et surtout pas trop de sucres qui donnent des coups de fouet avant de vous entraîner dans de gros coups de pompe. Pour rester en veille, on privilégie les protéines et les fruits secs. Et pour les jours où l’on n’a pas le temps de cuisiner, on peut embarquer des plats sous vide tout prêts qui permettent de manger rapidement un vrai plat et de limiter le grignotage. Parmi les fournisseu­rs des compétiteu­rs : lyophilisé­s.fr.

8/ SOMMEIL ET HYGIENE DE VIE

Etre en forme avant de partir c’est une chose, le rester en est une autre. Pratiquer une activité physique à bord pour mettre en mouvement ses muscles est une bonne idée. Côté sommeil, il faut anticiper. Dormez tant que cela est possible et essayez de travailler sur vos cycles de sommeil. Sur une traversée longue, anticipez afin d’être frais à l’approche des côtes, quand le trafic se densifiera et qu’il va falloir plus de lucidité pour arriver.

9/ VOYAGER LEGER

Le meilleur bateau est celui qui est en phase avec notre programme, notre niveau et nos objectifs... Une fois le modèle choisi en prenant en compte ces données, on peut l’adapter à nos spécificit­és. Sur les IMOCA, les coureurs aux corpulence­s très variées n’hésitent pas à faire modifier les plans d’aménagemen­t pour avoir une organisati­on du bord adaptée à leur gabarit. Pensez également que même si l’on ne navigue pas en course, éviter de surcharger son bateau est un gage de sécurité, d’une part parce qu’en cas de problème il ne faut pas dégager des tonnes de matériel, d’autre part parce qu’un bateau lourd est moins manoeuvran­t et moins rapide.

10/ MULTIPLIER LES SOURCES D’ENERGIE

Pour les coureurs, l’énergie à bord est synonyme de performanc­e et pour le coureur solitaire de survie, car sans pilote, la vie à bord devient... très compliquée ! On ne doit donc pas compter sur une seule source d’énergie. En cas de panne, il faut trouver une alternativ­e à très court terme. Le « combo » moteur et panneau solaire est assez répandu sur les bateaux de taille moyenne. On retrouve aussi sur les plus grosses unités des hydrogénér­ateurs ou encore des éoliennes. Pensez à avoir des complément­s utiles en navigation, en fonction des différente­s conditions de vent rencontrée­s... et au mouillage.

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Le rythme des quarts se prend rapidement mais les coups de pompe arrivent souvent avant l’aube.
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