Voile Magazine

100 milles sur la Côte d’Azur en X43, un X chic, équilibré et plus design que jamais

- Texte : Damien Bidaine. Photos : Gilles Clément.

Depuis que le chantier X-Yachts est revenu au principe d’une gamme unique, il se risque à nouveau à l’exercice délicat de la synthèse course et croisière. Il renoue ainsi avec un bel allant commercial, notamment pour ce X43 que nous avons soumis aux humeurs hivernales de la Méditerran­ée.

LES ECLAIRS TOMBENT

sur Saint-Tropez, la pluie balaye le pont et rebondit sur le petit bimini conçu pour abriter l’équipage du soleil. Pour autant, je ne laisserais ma place à la barre du X43 à personne : 9,5…, 9,7…, 9,9…, 10 noeuds ! Le croiseur danois file au débridé, porté par une bonne brise et poussé par la mer vers l’entrée du Golfe. La barre est particuliè­rement douce, ça glisse sans heurt. Je compense du bout des doigts de temps à autre l’effet d’une vague moins en phase avec notre route ; Yves, notre lecteur-équipier, le local de l’étape, surveille du coin de l’oeil mon cap car la tentation d’abattre est féroce mais la côte est là, toute proche. Ensemble, nous observons l’évolution de ces gros nuages là-bas, annonciate­urs de belles rafales. Un instant magique, une glisse sans stress pour ce dernier bord sur le X43 entre la tourelle de la Moutte qui marque l’entrée du golfe de Saint-Tropez et Sainte-Maxime où nous accosteron­s pour une dernière escale musicale… Du jazz manouche pour clôturer un essai plutôt mené sur l’air des Quatre Saisons d’Antonio Vivaldi ! Des conditions clairement hivernales nous ont cueillis dès la sortie de Port-Grimaud pour débuter cet essai. Vent d’est et mer agitée : pas le choix, il va falloir tirer des bords pour sortir du Golfe. Un exercice facile pour ce X43, premier opus d’une gamme présentée fin 2016 et déjà vendu à une soixantain­e d’unités. Les Xexp – ou Pur X selon la brochure commercial­e – viennent réajuster le positionne­ment du chantier danois sur le secteur concurrent­iel des croiseurs haut de gamme. Le catalogue X-Yachts scindé pendant un temps entre les X-Croisière (ligne classique, grosse capacité de chargement) et les X-Performanc­e (plus légers, moins habitables) souffrait de l’absence d’une gamme de bons marcheurs confortabl­es. Un croiseur intermédia­ire, grand tourisme, adoptant un design moderne à l’italienne et répondant aux attentes d’une clientèle exigeante réclamant à la fois une soute à voiles et une belle cabine propriétai­re, avec les commodités associées. Voici donc la genèse de la gamme Xexp qui compte désormais, outre ce 41 pieds (43 pieds en longueur hors tout) le 46 et le 49 en attendant la présentati­on à Düsseldorf d’un futur 40. Nous naviguons ici sur le numéro 52, le 66 sera livré en mai. Une production à un rythme d’ambassadeu­r en raison d’un mode de fabricatio­n des coques très soigné, classique chez X-Yachts mais peu productivi­ste ! L’élaboratio­n de la coque débute chez X en Pologne par la pose du gel-coat intégrant les fameuses trois bandes puis vient une première couche de tissu mat et de résine vinylester assurant une finition brillante avant que ne débute la fabricatio­n de la coque en sandwich mousse et infusion de résine époxy. Une résine bien plus chère mais plus légère, non sujette à l’osmose et générant moins d’imperfecti­ons esthétique­s qu’une résine polyester.

UN CROISEUR « GRAND TOURISME »

Une fois les tissus unidirecti­onnels infusés, la coque passe au four afin de stabiliser la polymérisa­tion des différente­s couches. Entre les temps de pose, de séchage et de cuisson, le seul moulage de la coque requiert dix jours, contre 48 heures pour un procédé classique. Et il reste beaucoup à faire avant d’aménager la coque et de poser le pont, notamment boulonner et stratifier le châssis en acier qui reprendra les efforts du mât, du gréement et de la quille. Une structure qui a fait la réputation des X. Car si la culture chez X-Yachts n’est pas aux voiliers légers, le poids gagné grâce à l’infusion permet de ne pas lésiner sur la structure, la qualité des aménagemen­ts et surtout de charger le bulbe de la quille. Un appendice ici composé d’un long voile de quille supportant une torpille suspendue à 2,50 m sous la flottaison. Un choix cohérent avec la volonté du chantier de centrer les poids (tous les réservoirs sont dans le carré) et d’abaisser au maximum le centre de gravité. Si le X43 est assez raide à la toile, notre début de navigation au près par 20-21 noeuds de vent apparent a vite démontré que ce voilier navigue naturellem­ent avec un angle de gîte de 20 à 25°. Une gîte marquée, mais anticipée par le chantier qui a judicieuse­ment placés cale-pieds et mains courantes tant dans le cockpit que dans le carré et la cuisine. Des accessoire­s parfois trop rares sur les croiseurs, que l’on a plaisir à trouver ici. De fait, la circulatio­n du carré vers le cockpit en est facilitée et prouve – tout comme la présence optionnell­e de deux cadènes dans le cockpit et une à chaque poste de barre – que nous sommes sur un voilier conçu par des marins. Une gîte prononcée qui ne gâche rien au plaisir du barreur, lequel bénéficie d’une véritable plateforme amovible pour garder l’assiette ! Cette ergonomie incite à barrer debout. Les équipiers pourront quant à eux se caler les pieds sur le support de la table amovible en fond de cockpit, qui mériterait d’être un brin plus proéminent. Partis en fin d’après-midi, nous nous préparons pour une petite navigation de nuit, cap sur Porqueroll­es à 30 milles au cap 225. Passée la Moutte qui marque l’extrémité sud du golfe de Saint-Tropez, nous abattons et retrouvons vite un angle de gîte plus proche de l’horizontal­e pour entamer une belle première séance de glisse nocturne sous grand-voile haute et grand génois (106%). Yves, détrempé par les grains, ne boude pas son plaisir et établit malgré des vents assez irrégulier­s une belle moyenne et des pointes à 10 noeuds. Notre garde-robe en North 3Di n’y est sans doute pas pour rien ! Un plaisir décuplé pour tout l’équipage lorsque la pleine lune réussit à percer les nuages et à donner un nouvel éclairage sur les caps Camarat, Taillat et Lardier. Pourtant, même dans la nuit noire, la navigation est assez esthétique sur le X grâce à l’éclairage de courtoisie rouge au niveau du plancher du carré efficace et non éblouissan­t. Encore une option, mais ô combien pratique au même titre que le chauffage à air pulsé dans les cabines et le carré. Passé le cap Lardier, nous cherchons la protection de la côte et tirons un bord vers Cavalaire pour adoucir cette mer houleuse sous l’influence depuis une semaine d’un vent de secteur est. Une navigation rase-cailloux

La rencontre avec un dauphin rend magique le mouillage déserté de Porqueroll­es.

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 ??  ?? 98 milles pour un essai « quatre saisons » sous le soleil et la pluie, dans la brise et la molle !
98 milles pour un essai « quatre saisons » sous le soleil et la pluie, dans la brise et la molle !
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On ne résiste pas à un bord sous code 0 devant Saint-tropez.

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