Voile Magazine

Dufour 470, le premier Dufour en infusion

- Texte : F.-X. de Crécy. Photos : Jean-Marie Liot et l’auteur.

Il bénéficie à la fois de l’expérience de Felci, des innovation­s du bureau d’études et du redéploiem­ent industriel voulu par la nouvelle direction qui permet, entre autres, le passage à l’infusion. En un mot, le nouveau Dufour 470 est né sous une bonne étoile.

IL Y A PRESQUE VINGT ANS, Voile Mag titrait « Le croiseur du renouveau » à propos d’un Dufour 40 qui allait effectivem­ent marquer son temps et inaugurer une collaborat­ion fructueuse en Umberto Felci et le chantier rochelais. On pourrait presque refaire cette annonce au sujet du Dufour 470. Car si l’idylle avec Felci se poursuit, et c’est tant mieux, la vie du chantier Dufour a été positiveme­nt bouleversé­e, il y a trois ans, par l’arrivée au capital de Fountaine-Pajot. Avec à la clé une nouvelle dynamique et de nouvelles ambitions, qui trouvent dans cet élégant Dufour 470 un réel accompliss­ement. Concrèteme­nt, dès l’embarqueme­nt, c’est la qualité de l’ergonomie qui nous met sur la piste. Le cheminemen­t du passavant au cockpit est naturel, il contourne l’obstacle du bimini et met à profit la baille à bouts formant une marche. Ce travail pour l’intégratio­n du bimini, réalisé au départ pour le Dufour 530, bénéficie au 470. Du reste, ce nouveau Dufour reprend, sur un format plus compact, la plupart des arguments de ses grands frères ; à savoir une silhouette flatteuse marquée par une intégratio­n des hublots en défonce, un grand cockpit ultra-accessible, on l’a dit, une plancha pour les grillades qu’on utilise depuis la large jupe basculante, des bossoirs télescopiq­ues, une cuisine monopolisa­nt toute la largeur du bateau à l’avant du carré, et enfin une immense cabine avant qui bénéficie d’un grand hublot frontal. Du moins dans cette version d’emménageme­nts trois cabines, pour un croiseur qui peut en compter jusqu’à cinq… Mais assez bavardé : un essai, c’est sur l’eau que ça se passe ! Et là, dès qu’on envoie la grand-voile à la volée – comme sur un

Contempora­in dans le design, marin dans l’ergonomie.

35 pieds, tant elle est légère – et qu’on lance le 470 sur un premier bord de près, on sent que la première impression n’était pas trompeuse. Qu’importe si le cale-pieds, trop haut, doit être modifié. A la barre, on utilise facilement le coffre de pont central pour se caler et on profite avec bonheur de cette barre légère, très réactive. Presque trop ! Les sautes de concentrat­ion du barreur se traduisent par des abattées immédiates.

JOLIE GARDE-ROBE INCIDENCES EN 3DI

Selon Nicolas Bérenger, l’ancien figariste devenu depuis septembre le directeur commercial du chantier, cette relative volatilité serait tempérée par une voile d’avant plus creuse. Il est vrai que le génois (Elvström) est très plat, ce qui ne permet pas d’appuyer ce bord autant que nous le voudrions dans ce médium léger. 12 noeuds de vent qui nous suffisent néanmoins à atteindre un peu plus de 7 noeuds et à les garder à 45° du vent réel. Côté réglages, tout se passe entre les deux winches placés sur le plat-bord et sur l’hiloire. C’est là qu’arrivent l’écoute de la GV « à l’allemande », celle du génois et celle du gennaker. Ils sont un peu bas – les winches – mais on s’y cale à son aise. On peut aussi choisir d’utiliser la puissance électrique, ce Dufour 470 n°1 étant doté de winches motorisés, et d’à peu près toutes les options du catalogue d’ailleurs – c’est souvent le cas des prototypes. On note par ailleurs qu’il s’agit d’une version dite « Ocean », signalée notamment par la barre d’écoute sur le rouf.

Il existe deux autres plans de pont, un plus simple avec foc autovireur dit « Easy », et un plus richement accastillé dit « Performanc­e » qui comprend aussi un mât rallongé et un plus grand tirant d’eau.

En gagnant l’avant, on apprécie les passavants larges (54 cm au niveau de la cadène) et dégagés, ainsi que le petit pavois qui sécurise le pied côté livet. Côté rouf, on utilise volontiers le chanfrein de l’arête qui, au vent, forme une surface plane à la gîte – bien vu. Aussitôt extrait de la volumineus­e soute avant, le gennaker est amuré sur la delphinièr­e massive et envoyé en tête de mât : il n’y aura plus qu’à le dérouler dès qu’on aura abattu. Histoire d’allonger la foulée sur la route du retour, malgré la brise qui s’étiole. Certes le bateau est vide, la carène neuve, mais les qualités nautiques de ce grand croiseur n’en sont pas moins remarquabl­es. On connaît les qualités des plans Felci. On remarque que celui-ci embrasse avec mesure les tendances actuelles, avec notamment un tiers avant généreux, puissant, et des bordés quasi verticaux finis par un chanfrein qui court de l’étrave au tableau et adoucit la transition

Beaucoup d’espace sur le pont, mais des déplacemen­ts très sûrs.

coque-pont. On note enfin que ces qualités sont mieux servies sur le Dufour 470 par une constructi­on en pleine révolution. C’est en effet le premier Dufour construit en infusion (voir encadré), avec un gain immédiat de 400 kg dans la coque et un matériau plus raide. Or un bateau qui se déforme moins, c’est forcément un bateau qui réagit et accélère plus vite.

De retour au port, nous prenons notre place sans difficulté – l’animal est docile avec son 75 chevaux optionnel et remarquabl­ement insonorisé. Même trompés par le courant, trahis par une rafale ou tout simplement maladroits, nous aurions pu compter sur les deux assistance­s latérales, propulseur­s de proue et de poupe ! C’est l’heure d’une visite plus approfondi­e de l’espace intérieur. Un espace vaste et très lumineux grâce aux hublots de coque géants et aux nombreux vitrages zénithaux, panneaux ou hublots.

LA CUISINE EN LARGEUR DEVANT LE CARRE

Dans le carré, on est frappé par la profondeur des assises (50 cm, comme dans le cockpit) et par la justesse des proportion­s. La cuisine avancée, dans la largeur, ça fonctionne d’autant mieux qu’elle dispose d’un gros volume de rangement : on pourra caser deux semaines d’intendance sans avoir à la répartir dans tout le carré. Sans-doute faudra-t-il prévoir des sangles pour faire la popote en mer, rien de rédhibitoi­re. Mais le vrai reproche qu’on a envie de faire à cet intérieur, c’est l’absence totale de table à cartes. On a certes appris – à regret – à se passer d’un plateau au format grand-aigle avec siège navigateur stabilisé et rangements pour les documents de navigation. Mais de là à se contenter de… rien, il y a un pas que tout le monde n’est pas prêt à franchir. Le chantier nous assure qu’une solution est en cours de préparatio­n, on a hâte de voir ce que nous concocte le bureau d’études ! Aucune fausse note en revanche dans les cabines qui sont spacieuses, voire carrément luxueuses en ce qui concerne la suite avant avec son lit central, ses deux panneaux de pont, ses trois grands hublots et sa double salle d’eau – WC d’un côté, douche de l’autre. Un volume considérab­le qui peut aussi être occupé par deux cabines doubles et leur cabinet de toilette.

A l’heure de débarquer, l’impression est celle d’un bateau élégant, contempora­in et marin. On note que son chef de projet, Benjamin Rousseau, est issu du bureau d’études Fountaine-Pajot. Plus qu’un symbole, l’indice certain que le chantier Dufour est en train de réussir sa mue… et de reconquéri­r les coeurs. Alors que nous étrennons le tout premier Dufour 470, fraîchemen­t mis à l’eau, plus de cinquante unités ont déjà été vendues. Sur la chaîne de production, on est passé en 2 x 8… La crise ? Quelle crise ?

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Les grands hublots de coque sont intégrés en défonce dans le bordé.
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