Les bords de Loue inondés de décibels
Reportage ce lundi à Parcey où une free party a, pendant deux jours, réuni plusieurs centaines de personnes.
Un mur de son vraiment impressionnant ! Les personnes présentes ce week-end sur les bords de Loue à Parcey se disent de façon unanime impressionnées par le matériel qui avait été mis en place. « 40 000 watts », précisent deux jeunes filles venues de Mâcon pour l’événement.
Le rassemblement était, à l’origine, prévu sur un autre lieu tenu secret. La pluie a amené les organisateurs à venir trouver refuge sous le viaduc de l’A36 au-dessus de la Loue. Suffisamment éloigné des habitations, l’endroit offre en effet un vaste espace couvert, que les festivaliers ont inondé de décibels.
Ce lundi 8 mai, quelques fourgonnettes, vans ou même camions équipés de couchettes stationnaient encore le long du chemin menant au golf du Val d’Amour. « Beaucoup d’entre nous redescendons après avoir fait la saison d’hiver dans les Alpes », témoigne une participante.
En ce week-end prolongé, les deux soirées festives et musicales entièrement « autogérées » ont réuni 500 à 600 personnes estiment les organisateurs, sans doute davantage d’après le maire de la commune. Porteparole du collectif qui a lancé les invitations, Morgane explique que l’occupation du terrain se fait sans esprit malveillant, mais l’expérience a montré que leurs demandes seraient inévitablement refusées. « Si un paysan donne son accord, les autorités lui infligent des amendes ! »
Alors ils s’arrangent pour arriver suffisamment nombreux pour ne pas être délogés. C’est ce qui s’est passé samedi à Parcey. Des camions un peu plus gros rencontrant des difficultés pour accéder au site, les rues du village se sont soudain trouvées engorgées, provoquant même un ralentissement sur la nationale. « Sans cela, nous n’aurions pas forcément été alertés ! », confie un gendarme, dont la présence a surtout consisté à veiller, à la sortie du site, que les festivaliers étaient en état de prendre le volant.
Venus à la fois de Bourgogne et de Franche-Comté, les initiateurs de la free party font partie de collectifs de passionnés de sound system. Ils revendiquent ouvertement leur désir d’indépendance. Se présentant comme des alternatifs ou des travelers, ils font remarquer qu’aucun incident n’a été à déplorer. « On en organise trois ou quatre chaque année, principalement l’été. On ne cherche pas l’argent, on fait cela pour le plaisir », affirme Elo, qui décrit un fonctionnement très communautaire : « On ne distribue surtout pas de flyer, on ne publie rien sur facebook qui amènerait trop de mauvaises personnes. Pour que ça reste gérable, on ne fonctionne que par le bouche-à-oreille ».
Alex vient de Lyon, où il est étudiant en sciences sociales. Il apprécie l’ambiance de solidarité et d’altruisme. « On est dans la transgression des normes établies », admet-il mais ce qui est important pour lui est de « le faire ensemble » : « On retrouve le sens du collectif ». Il ajoute : « Les organisateurs sont en premier lieu des passionnés. La musique est la même que celle sur laquelle ils pourraient danser en discothèque ou sur des festivals mais cette musique, ils ont envie de la partager très librement. Même s’ils vivent en camion, ce sont des gens qui sont intégrés socialement, qui bossent, mais qui orientent leur activité pour faire la fête ». Un style de vie d’ailleurs bien souvent temporaire. « La plupart, au bout de 5, 10 ou 15 ans, réutilisent leur savoir dans un cadre plus normé ». Et si, auparavant, ils « bricolent », ce n’est pas nécessairement par choix mais aussi en raison des difficultés auxquelles leur génération est confrontée pour décrocher enfin un emploi stable, accéder à un appartement… « C’est au moins autant les conditions qui amènent à une construction politique que l’inverse », assure-t-il.
En tout cas, c’est une jeunesse joyeuse et accueillante, respectueuse de la liberté des autres, soucieuse de laisser un site au moins aussi propre qu’il l’était quand ils sont arrivés, qui, lundi, s’apprêtait à quitter les bords de Loue au terme d’un week-end qui, malgré la pluie, s’est de leur point de vue parfaitement déroulé.