La reine du poker interdit
Le Grand Jeu, un film d’Aaron Sorkin.
Molly Bloom, cette jeune femme devient, au début des années 2000, la reine des parties de poker privées. Elle les organise, plus ou moins clandestinement, dans des palaces californiens. Des célébrités de tous milieux sont reçues dans des lounges somptueux. Avec une mise d’entrée de 250 000 $… Ses parties deviennent célèbres et être invité par une pareille hôtesse devient un must. Faux-pas fatal cependant, Molly décide d’exporter son affaire à New York. Là elle doit faire rapidement face non seulement à la mafia russe mais également au FBI. Molly Bloom est découverte. En une savante conjugaison, le réalisateur, également scénariste, filme le combat de Molly (superbe, flamboyante Jessica Chastain) et de son avocat Charlie Jaffey (Idris Elba, assez convaincant) contre la Justice, combat, il faut bien le reconnaître, tiré par les cheveux. Ce combat est aussi le portrait d’une femme, Molly, ancienne championne de ski, qui n’hésitera pas à se mettre en danger face au juge, en ne donnant pas la liste de ses clients. Pour son premier long, Aaron Serkin frappe fort, sachant donner un rythme d’enfer à un montage fait de flash-back parfois stroboscopiques, creusant les arcanes d’un jeu de cartes où le mensonge est roi. À l’occasion un rien bavard (!), ce film s’appuie sur le livre que vient de sortir Molly Bloom et renvoie à ce monde nocturne et opaque, frelaté et, en fait, aussi pathétique que désespéré. Il tente aussi une approche psychanalytique du comportement de Molly au travers de sa relation avec son père (Kevin Costner en roue libre…). [Robert Pénavayre]