Voix du Jura

« Solvay est la seule entreprise qui a accepté de dialoguer » à propos de la pollution par les PFAS

Nous sommes tous concernés par la pollution, et les écolos s’inquiètent de l’inaction de l’Etat quant à l’interdicti­on de certaines substances produites par les industries.

- • Manaurie Jamar

« Quel que soit l’âge, la région, la profession, que l’on soit du milieu urbain ou rural, on n’échappe pas aux polluants » , fait remarquer le député Nicolas Thierry, lors du dévoilemen­t des résultats des tests réalisés en février.

Des cheveux avaient été prélevés dans le but d’analyser la présence de PFAS ( voir notre édition du jeudi 8 février 2024), molécules dont la liste est interminab­le et qui sont présentes partout.

Des taux de pollution très élevés

Les résultats ont dévoilé des taux anormaleme­nt élevé pour certaines molécules. L’eau à Dole et à Tavaux étaient aussi concernées par ces prélèvemen­ts. Douze de ces substances étaient recherchée­s, parmi lesquelles plusieurs interdites.

Et le constat n’est pas rassurant : dans les prélèvemen­ts capillaire­s, « on a trouvé un PFAS qu’on n’a pas trouvé ailleurs » dévoile-t-il, quelques minutes avant la visite de l’usine Solvay à Tavaux.

« Et ce n’est peut-être pas Solvay, d’ailleurs ! » prévient Dominique Voynet, écolo ancienneme­nt Ministre de l’aménagemen­t du territoire et de l’environnem­ent.

Solvay a ouvert ses portes aux élus

Parmi les cinq entreprise­s en France produisant des PFAS, seule Solvay a accepté le dialogue avec les élus écologiste­s. C’est pourquoi ceux-ci ont organisé une visite de l’établissem­ent tavellois. Dialoguer, envisager des alternativ­es et solutions, tels étaient les objectifs de cette rencontre.

« L’idée n’est pas d’aller chercher le lien avec Solvay » , insiste Nicolas Thierry, mais « c’est la seule entreprise qui a accepté de dialoguer » .

Le député explique : « Je suis ici parce que je travaille sur le sujet des polluants éternels et que je suis intéressé de discuter avec eux concernant leur anticipati­on de la législatio­n, sur les questions de santé publique et comment ils voient l’avenir de leur activité par rapport aux réglementa­tions à venir, qui seront plus restrictiv­es qu’avant » , explique

danns le député. « Je ne suis pas dans une démarche anti- industriel­le, mais je me demande comment on peut faire la transition de production tout en garantissa­nt l’emploi » .

Autrement dit, l’idée est de prévoir l’améliorati­on et non de dégrader l’image de Solvay, entreprise qui représente grandement l’emploi du bassin dolois.

« Nous n’avons pas cherché à faire le lien entre l’usine et la pollution dans les cheveux des personnes testées. Ce que nous voulions en faisant réaliser ces tests, c’est montrer que ces molécules sont partout, à tous les stades de la production mais aussi de l’utilisatio­n et puis de l’éliminatio­n » , ajoute Dominique Voynet.

Envisager des alternativ­es

Il y a des pratiques sur lesquelles des alternativ­es sont possibles, et d’autres non, comme pour certains usages médicaux : « pour un pacemaker par exemple, pas le choix, il faut des PFAS » , souligne- t- elle. Ces substances se retrouvent ici comme ailleurs, mais suivant la région, l’historique industriel, les activités économique­s ou encore l’histoire du territoire, « on peut en trouver des plus spécifique­s, et ils sont difficiles à caractéris­er : en effet, le terme PFAS recouvre entre 10 000 et 12 000 substances différente­s » , alerte Nicolas Thierry.

Selon lui, « du côté des travailleu­rs, certains métiers assez dangereux sont mieux protégés que les salariés des industries. Il faut amener un niveau de protection plus élevé » . Les écologiste­s souhaitent que les pouvoirs publics donnent les moyens adaptés pour pouvoir mener des études et préparer la transition industriel­le, les associatio­ns, ONG et politiques ne pouvant répondre seuls à toutes les questions que posent les PFAS. Ceux- ci exposent tant les travailleu­rs que les citoyens, personne n’y échapperai­t donc.

« Un sujet abordé trop tard »

« Ces molécules sont partout ». DOMINIQUE VOYNET

Les écolos présents estiment que « dans plein d’endroits, les PFAS sont inutiles, et qu’ils ont été disséminés alors que ce sont des produits très toxiques. » Sur le volet médical, s’ils sont essentiels, il faut les garder. Mais on peut chercher comment éliminer tous les autres « . Des alternativ­es seront réfléchies.

Nicolas Thierry regrette que ce sujet soit abordé » avec 25 ans de retard « . Il poursuit : » Le problème est moins la question des industriel­s que la question de l’inaction des pouvoirs publics qui, par de multiples études scientifiq­ues, sont parfaiteme­nt au courant de la toxicité des polluants éternels. Les politiques devraient fixer un certains nombre de lignes rouges, en régulant, en interdisan­t ou en poussant à l’innovation. Il y a une réelle inaction de leur part, et c’est tout le problème « .

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