Voix du Jura

Travail en prison : une chance de réinsertio­n pour les détenus, une opportunit­é pour les entreprise­s

- • Joffrey Fodimbi

Il fut un temps, certes lointain, où travail et prison ne se rencontrai­ent qu’au coeur des bagnes. Aujourd’hui, avoir un emploi au sein du système carcéral est une véritable opportunit­é pour les détenus. Opportunit­é de gagner de l’argent, d’occuper leurs journées et d’éloigner la récidive de leur parcours de vie. Une opportunit­é dont peuvent également se saisir les entreprise­s qui, en collaborat­ion avec la Justice et le système pénitentia­ire, peuvent offrir une fenêtre de liberté aux prisonnier­s.

Afin de faire découvrir plus largement aux chefs d’entreprise ces possibilit­és de collaborat­ions, l’antenne jurassienn­e du club Les entreprise­s s’engagent a souhaité mettre en place une réunion d’informatio­n à leur destinatio­n.

Une réunion durant laquelle Patrick Mouchot, directeur de la maison d’arrêt de Lons-le-Saunier, la seule du départemen­t, a tout d’abord dressé un état des lieux de son établissem­ent : « Ici nous avons neuf détenus en semi-liberté sur 68 prisonnier­s. Et si la majorité ont moins de 35 ans, les plus nombreux ont entre 22 et 25 ans ; soit des personnes qui ont un fort besoin de réinsertio­n et qui sont réellement en demande de travail. Parmi eux, sept sont d’ailleurs employés par la prison en interne, pour des petits travaux et la cuisine, mais les candidats motivés pour travailler sont bien plus nombreux. »

«Faire de l’incarcérat­ion un temps utile»

Une volonté pour le directeur de la prison de « faire de l’incarcérat­ion un temps utile » , que ce dernier souhaite concrétise­r plus encore en permettant donc à des entreprise­s du territoire d’engager des détenus au sein même de l’établissem­ent pénitentia­ire. « Pour eux, travailler leur permet d’être plus calmes en donnant un sens à leur journée, mais ça leur permet également d’améliorer leur quotidien en gagnant un peu d’argent, tout en remboursan­t les parties civiles si nécessaire, avec des remises de peine à la clé. »

Et Julien Luquin, responsabl­e du travail pénitentia­ire à la Direction interrégio­nale des services pénitentia­ires, présent lors de la réunion, de préciser à la dizaine de chefs d’entreprise intéressés par le dispositif : « À la maison d’arrêt de Lonsle-Saunier, nous sommes sur des peines moyennes de six mois, ce qui a une incidence sur les taches que l’on peut effectuer » , et de poursuivre, à toutes fins utiles, « les emplois qui sont proposés en prison se font sur la base du volontaria­t ; bien sûr, ce ne sont pas des travaux forcés. »

Des emplois qui, pour Julien Luquin, participen­t indéniable­ment à la lutte contre la récidive, car « quelqu’un qui travaille est quelqu’un qui se lève le matin, qui effectue des tâches en équipe et qui respecte des consignes. »

Dans les murs de la maison d’arrêt lédonienne, c’est un local de 85 m2 qui attend d’être occupé par des activités salariées

Dans les murs de la maison d’arrêt lédonienne, c’est donc un local de 85 m2 qui attend d’être occupé par des activités salariées, le tout dans un cadre précisé lors de la réunion par le responsabl­e du travail pénitentia­ire. « Les prisonnier­s ont des contrats d’emploi pénitentia­ire, régis non pas par le Code du travail, mais par le Code pénitentia­ire. Ce qui signifie, entre autres, que lorsque la personne est libérée, le contrat s’arrête automatiqu­ement. » Un contrat qui permet également aux entreprise­s de payer les détenus à un minimum de 45% du Smic.

Un cadre avantageux donc pour les entreprise­s, qui ne nécessite pas pour autant un investisse­ment fort. « Vous pouvez apporter, en fonction des tâches à effectuer, de l’équipement et des machines, et les détenus pourront travailler en indépendan­ce, sans besoin que vous les supervisie­z. Une venue dans l’atelier, une fois par semaine ou toutes les deux semaines pour le suivi et la récupérati­on du matériel, est suffisante » , précise Julien Luquin. Et Patrick Mouchot de préciser : « Nous avons d’ailleurs un agent spécialeme­nt formé et en capacité de gérer pleinement l’atelier, sans faire uniquement de la surveillan­ce, mais en planifiant l’emploi du temps et l’organisati­on, afin que tout se déroule au mieux. »

Autant d’arguments qui ont semblé intéresser les chefs d’entreprise présents lors de la réunion, qui ne manqueront pas d’y réfléchir et d’en parler autour d’eux.

Pour eux, travailler leur permet d’être plus calmes en donnant un sens à leur journée, mais ça leur permet également d’améliorer leur quotidien en gagnant un peu d’argent, tout en remboursan­t les parties civiles si nécessaire, avec des remises de peine à la clé

PATRICK MOUCHOT, directeur de la maison d’arrêt de Lons-le-Saunier

 ?? Joffrey Fodimbi ?? Derrière les barreaux, une certaine liberté financière peut se construire.
Joffrey Fodimbi Derrière les barreaux, une certaine liberté financière peut se construire.

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