Extension de la carrière : la polémique enfle
Alors que la Cemex étudie une extension du périmètre d’exploitation de la carrière, un collectif dénonce un projet « menaçant un site archéologique exceptionnel et unique ».
CRÉÉ À L’INITIATIVE de plusieurs membres de la Société de recherches spéléo-archéologiques du Sorézois et du Révélois et élargi depuis à plusieurs citoyens, le Collectif de défense du plateau du Causse livre depuis quelques semaines une croisade contre la possible extension du périmètre d’exploitation de la carrière de Sorèze par la Cemex. En effet, l’entreprise spécialisée dans la production de granulats cherche actuellement des solutions pour assurer la pérennité de son activité à Sorèze qui se traduit à l’heure actuelle par l’extraction de près de 300 000 tonnes de roche par an. Autorisés à exploiter une nouvelle bande de calcaire au lieu-dit « Pistre » il y a quelques années, les carriers se sont heurtés sur ce site à un gisement inalement bien moins important que celui espéré. Une mauvaise surprise qui les pousse depuis plusieurs mois à étudier l’exploitation de nouvelles bandes de calcaire au grand dam des spéléologues locaux. « Il s’agit d’une parcelle qui n’est certes pas classée mais qui fait partie d’un site archéologique unique. Ce site minier date du XIe et XIIe siècles avec des mineurs qui sont descendus à cette époque à 130 mètres sous terre et sur près de 8 kilomètres. Il y a une grotte avec des gisements archéologiques et quelques traces que nous avons recensées qui nous laissent penser qu’il y a encore quatre ou cinq sites encore non exploités. Par ailleurs, nous avons en surface un belvédère offrant une magniique vue sur la plaine. Le plateau du Causse et la grotte du Calel font l’objet de différents classements : monument historique, Natura 2000, site paysager et Zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique (Znieff). Enin, ce site abrite un ruisseau souterrain qui sort de la vallée et qui jusqu’aux années 60 alimentait Sorèze et constitue donc une ressource en eau à préserver dans le contexte hydrologique actuel. Pour toutes ces raisons, une extension de la carrière sur cette zone serait inacceptable. Au-delà de la pollution visuelle, elle menacerait de destruction des éléments majeurs de ce site archéologique unique et exceptionnel qui n’a de valeur que lorsqu’on le prend dans sa globalité » , explique JeanPaul Calvet, membre de la Société de recherches spéléo-archéologiques.
Jean-Paul Calvet : « La ligne rouge a été franchie »
Dans son argumentaire, le spéléologue dénonce par ailleurs le « manque d’anticipation » de la Cemex pour trouver d’autres solutions permettant de pérenniser son activité : « Du calcaire, il y en a ailleurs ! La Cemex n’a pas eu de vision à moyen terme et veut aujourd’hui aller au plus simple en allant sur cette parcelle que les carriers ont toujours renoncé à exploiter depuis des décennies. Et cela, quitte à bousiller ce site exceptionnel en l’exploitant pendant trois ans avant d’aller ailleurs… L’association de spéléologie a toujours été présente aux commissions de la carrière où sont prises les décisions. Ce n’est plus le cas aujourd’hui car la ligne rouge a été franchie et que nous ressentons un manque de transparence de la Cemex quant à ses projets. » Pour appuyer son combat, le collectif a lancé une pétition en ligne sur le site change.org depuis le 6 mai. Adressée à la Cemex et à la mairie de Sorèze, celle-ci a recueilli plus de 800 signatures. Une pétition en format papier a également fleuri dans plusieurs commerces de Sorèze. Fort de cette dimension citoyenne prise par cette lutte, le collectif demande depuis plusieurs semaines à la mairie de Sorèze d’organiser une réunion élargie à l’ensemble des acteurs et structures ayant compétence pour intervenir sur ce dossier. « Cela fait deux mois et demi que nous avons demandé cette réunion très large. En réponse, le maire de Sorèze explique que nous sommes des opposants systématiques » , regrette Jean-Paul Calvet.
Le collectif n’exclut pas des « actions spectaculaires »
Décidé à ce que le collectif arrive à faire entendre sa position dans ce dossier, le spéléologue n’hésite pas à annoncer « des actions spectaculaires à venir » ain de maintenir la pression. « Nous utiliserons les moyens qu’ont les ‘‘petits’’ pour se faire entendre. Il y a eu cette pétition et l’argumentaire qui va avec. L’étape suivante, ce devrait être une grande marche au mois de juin pour faire découvrir le Causse sous un aspect culturel et patrimonial. Et pourquoi pas à cette occasion faire une grande chaîne humaine qui marquerait les frontières de cette parcelle. Mais on peut faire encore mieux s’il le faut avec une action très médiatique comme une grève de la faim d’un spéléologue enfermé dans la grotte… » On l’aura compris, la détermination est de mise du côté de certains membres du Collectif de défense du plateau du Causse, bien décidés à continuer leur combat jusqu’à l’abandon par la Cemex de son projet.