Voix du Midi (Lauragais)

Revendicat­ions

- • Paul Halbedel avec Florian Moutafian

La colère couvait depuis plusieurs mois. Elle a commencé à monter il y a quelques semaines avec l’opération « On marche sur la tête » au cours de laquelle les agriculteu­rs ont retourné de nombreux panneaux d’agglomérat­ion. Un premier avertissem­ent qui n’a pas vraiment porté ses fruits. Les Jeunes Agriculteu­rs (JA) et la Fédération régionale des syndicats d’exploitant­s agricoles ont donc décidé de remettre ça le mardi 16 janvier à l’occasion d’une manifestat­ion régionale dans les rues de Toulouse, envahies pour l’occasion par plus de 400 tracteurs et 1000 manifestan­ts. Mais là encore, ils n’ont pas eu gain de cause quant à leurs principale­s revendicat­ions. Au point que la situation s’est tendue avec un blocage de l’autoroute A64 à Carbonne. Qui a depuis fait boule de neige.

Une première manifestat­ion à Castelnaud­ary

Dans le Lauragais, une première manifestat­ion a été organisée vendredi 19 janvier. Dépôts de déchets verts et fumier, présence d’une vingtaine de tracteurs pour autant de véhicules divers, feux de bois et de paille pour se tenir chaud… C’est le péage de l’autoroute A61 qui a été le théâtre de cette mobilisati­on ayant réuni une cinquantai­ne d’agriculteu­rs venus du bassin chaurien mais également de Fanjeaux, Belpech ou Villefranc­he-de-Lauragais.

Sur place, ces agriculteu­rs issus de plusieurs syndicats ont envahi les deux voies centrales et le bas-côté de la route entre le péage et le rond-point de la D6. Les manifestan­ts ont garé leurs véhicules et déposé des déchets verts, paille et fumier afin que les automobili­stes ne puissent plus circuler que sur une voie, dans chaque sens.

L’opération s’accompagne d’une distributi­on de tracts afin d’informer les usagers de l’autoroute sur leurs revendicat­ions.

« On n’est pas entendu. Le haut sommet de l’État ne se rend pas compte du mal-être dans les campagnes. Il faut réagir vite », confie alors David Marty. Présent lors de la manifestat­ion régionale organisée à Toulouse trois jours plus tôt, le président des JA du canton de Belpech explique ne pas être satisfait de la réponse de l’État. Il n’est pas le seul, précise-t-il. «Tout le monde reste sur sa faim. La préfecture de Région nous a reçus, mais il n’y a pas trop eu d’avancées. C’était plutôt du saupoudrag­e. »

Lors de cette nouvelle action, les agriculteu­rs du Lauragais audois reprennent donc les revendicat­ions exposées au niveau régional ce mardi : des prix producteur­s ne couvrant pas l’ensemble des charges ou l’accumulati­on d’injonction­s qu’ils jugent contradict­oires. David Marty détaille : « On nous demande de respecter des normes et on signe des contrats de libre-échange avec des pays qui ne les respectent pas. » Il ajoute : « Nous demandons également un accompagne­ment technique et financier pour aller vers la transition écologique et non des interdicti­ons arbitraire­s de produits de protection de culture. » Avant de reprendre son souffle. « La liste est hyper longue, constate-t-il. On fait ça pour montrer à nos dirigeants que ça va poser de gros soucis si on n’est pas écouté. »

Une opération qui prenait fin en fin de journée. Mais le responsabl­e syndical prévenait alors : « La mobilisati­on va prendre de l’ampleur dans les départemen­ts, les régions et dans toute la France. Ici également. […]On ne s’interdit rien ! »

La situation se tend mardi 23 janvier

Une promesse tenue quelques jours plus tard, en l’absence d’avancées significat­ives des discussion­s avec l’État. Mardi 23 janvier deux nouvelles actions d’envergure étaient ainsi organisées dans le Lauragais.

À Villefranc­he-de-Lauragais, près de 80 agriculteu­rs pénétraien­t sur l’autoroute A61 au petit matin, entraînant le blocage de la circulatio­n dans le sens Narbonne — Toulouse. Mur de paille et de terre étaient érigés de part et d’autre d’un campement. «Tant qu’on n’a pas de réponses concrètes de l’État, on restera là. On maintiendr­a le blocage », annonçait Nicolas Thuries, cosecrétai­re général des JA 31 et agriculteu­r à Caraman. «On a voulu marquer le coup avec les agriculteu­rs des cantons voisins. On a pris la décision de venir sur l’A61 pour monter un campement durable et tenir quelques jours en fonction des retours de Paris. On attend des mesures concrètes et rapides. Il faut qu’on arrête de nous dire qu’on va reprendre les études, les réflexions, que l’on va faire appel à des experts… C’est toujours pareil, ça n’avance jamais, ça fait 20 ans que ça n’avance pas! […] On s’organise pour tenir deux, trois, quatre jours ou plus s’il le faut. […] Je suis content de voir, ici, des agriculteu­rs qu’on ne voyait pas forcément jusqu’à présent pour des revendicat­ions moindres. On sent qu’il y a une prise de conscience et que tout le monde se bouge », abondait Baptiste Marquié, président des JA du canton de Nailloux.

Une déterminat­ion identique à celle affichée par les agriculteu­rs du Lauragais audois mobilisés dans le même temps à Castelnaud­ary, dans le cadre d’une action visant à bloquer les accès à la plateforme de la Socamil, la centrale régionale d’achat alimentair­e et non alimentair­e de l’enseigne Leclerc. Une action « à durée indétermin­ée », avertissai­t alors Léo Gasc, secrétaire général des JA de l’Aude. « Tant qu’on n’a pas de réponse et

Voici les principale­s requêtes des agriculteu­rs : demande du retrait de la nouvelle fiscalité sur le gazole non routier ; respect des lois Egalim par les industriel­s et la grande distributi­on afin de protéger le revenu des agriculteu­rs et qu’ils puissent vivre du juste prix de leurs production­s ; demande de prise en charge des frais vétérinair­es et compensati­on financière pour les animaux atteints ou morts de la Maladie hémorragiq­ue épizootiqu­e (MHE) ; accès à l’eau facilité pour les agriculteu­rs devant irriguer leurs terres ; respect des clauses miroir, à savoir la non importatio­n de produits qui ne respectent pas les normes imposées aux agriculteu­rs français pour leurs production­s ; simplifica­tion du mille-feuille réglementa­ire pour réduire la charge administra­tive pesant sur les agriculteu­rs.

qu’il n’y a pas des actes, on ne bougera pas », assurait-il.

Agriculteu­r à Fanjeaux, ce dernier indiquait toutefois que l’enseigne Leclerc n’était pas directemen­t visée par cette action. « On sait que Monsieur Leclerc a un poids politique énorme et qu’il a la possibilit­é de nous faire entendre. On n’en a pas après lui directemen­t, même s’il est aussi concerné par la loi Egalim. »

Mardi 23 janvier, à l’heure de notre bouclage, la mobilisati­on des agriculteu­rs du Lauragais semblait bien partie pour durer quelques jours encore. «Tant qu’on n’aura pas d’annonces concrètes, on restera là ! Notre mobilisati­on est pour une durée indétermin­ée », insistait Maxime Algans, membre du bureau des JA de Haute-Garonne et agriculteu­r à Montlaur.

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