Voix du Midi (Lauragais)

Le rapporteur spécial de l’ONU visite la ZAD

- • Paul Halbedel

Rapporteur spécial de l’ONU pour la protection des défenseurs de l’environnem­ent, Michel Forst s’est rendu dans le Tarn les 22 et 23 février. Il y a rencontré les activistes et le préfet.

La scène paraît assez improbable. Jeudi 22 février, c’est à bord d’une nacelle, à plusieurs mètres du sol, que Michel Forst, le rapporteur spécial de l’Organisati­on des Nations unies (ONU) pour la protection des défenseurs de l’environnem­ent, a pu s’entretenir avec les militants perchés dans les arbres de la ZAD de l’autoroute A69, installée à Saïx, dans le Tarn. L’objet de cette visite : se rendre compte lui-même des méthodes de maintien de l’ordre et d’évacuation des activistes présents sur le site après avoir reçu des signalemen­ts et vidéos qu’il avait jugés « alarmants » quelques jours plus tôt.

L’échange avec les activistes a eu lieu à l’abri des regards. Un important dispositif de forces de l’ordre avait en effet été déployé aux abords du bois pour en interdire l’accès à toute autre personne que les gendarmes ou ouvriers de l’entreprise NGE en charge d’abattre les arbres.

Le rapporteur de l’ONU s’élève dans les airs

Arrivé sur place, Michel Forst a d’abord demandé aux personnes présentes de rester calme et à l’écart pour lui permettre de faire ses auditions en toute sérénité. Quelques minutes plus tard, il s’élevait dans les airs après avoir grimpé dans une nacelle. C’est là que le rejoignaie­nt des militants perchés depuis plusieurs jours dans les arbres pour un échange de près d’une demi-heure. Une scène dont les personnes tenues à distance n’ont pu saisir que quelques bribes. Les gendarmes mobiles avaient en effet eu pour ordre de positionne­r l’ensemble de leurs camions en file indienne pour obstruer la vue des militants, journalist­es et représenta­nts des associatio­ns.

Également présentes sur place après avoir fait part de leur inquiétude quant au traitement infligé aux opposants à l’A69, les députées du Tarn, Karen Erodi, et de la Haute-Garonne, Anne Stambach Terrenoir, étaient logées à la même enseigne. Les deux parlementa­ires de La France Insoumise ont été interdites d’accès à la ZAD au motif qu’une opération de police judiciaire était en cours.

« J’ai besoin de digérer les informatio­ns »

Une fois redescendu au sol, le rapporteur spécial des Nations unies s’est présenté devant la presse pour une très courte déclaratio­n. « L’objectif, c’était de recueillir des témoignage­s, de me faire moi-même une idée de la situation et de ne pas uniquement me fier aux vidéos, photos et témoignage­s écrits que j’ai reçus », expliquait-il. « Mais je n’ai pas envie de commenter pour l’instant. J’ai besoin de digérer les informatio­ns que m’ont apportées les militants », soulignait-il.

Michel Forst précisait aussi vouloir attendre sa rencontre avec le préfet, prévue le lendemain à Albi, pour décider des suites à donner à sa visite : « C’est important que je n’écoute pas seulement la voix des militants dans les arbres et la voix de ceux qui les accompagne­nt, mais aussi celle des autorités nationales. […] Je verrais après ma rencontre avec le préfet s’il y a lieu de faire une communicat­ion publique ou pas. »

Le bénévole de l’ONU précisait enfin avoir apporté aux militants des médicament­s et évoqué avec eux la question du ravitaille­ment en eau.

Négociatio­n entre gendarmes et activistes

En milieu d’après-midi, après le départ de Michel Forst, les ouvriers de l’entreprise NGE reprenaien­t finalement les abattages d’arbres sous les insultes et quolibets de quelques militants encore présents au sol. Des coupes que les opposants à l’A69 considèren­t en effet comme illégales au regard du classement de ce bois de la Crémade en enjeu fort sur le plan environnem­ental.

Les gendarmes de la Cellule nationale d’appui à la mobilité (Cnamo) poursuivai­ent quant à eux leur opération de délogement de la dizaine d’activistes encore présents dans les arbres, lors d’une tentative de négociatio­n. L’occasion pour ces derniers de réclamer un ravitaille­ment en eau et en nourriture.

Peu avant 17 h, les « écureuils » perchés dans les arbres criaient en choeur : « Une journée de plus à la Crémade ! ». Leurs soutiens au sol hurlaient de joie en réponse. L’opération des grimpeurs de la gendarmeri­e était mise en pause pour la soirée. Quelques minutes plus tard, les militants se faisaient même acheminer trois bidons d’eau.

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