Toulouse au temps du tramway électrique
Florian Nicolas revient sur la transformation du réseau de transports en commun toulousain dans son livre « 1906. Le tramway électrique, la modernité sur les rails ».
Toulouse, le 12 août 1902. Le maire radical Honoré Serres et Firmin Pons, le directeur de la Compagnie des tramways toulousains, signent une nouvelle concession prévoyant la progressive électrification du réseau de tramway hippomobile.
Enthousiasme populaire
L’industriel, précautionneux, entreprend d’abord la transformation des lignes A (Lafayette/ Ponts-Jumeaux), F (Rue d’Alsace/ Barrière de Paris) et I (Rue d’Alsace/Barrière de Croix-Daurade), les plus fréquentées. Son entreprise, afin de supporter les coûts, est recapitalisée et devient l’été suivant une société anonyme. La Ville rose change de visage avec la pose des rails sur la chaussée et l’installation des câbles aériens accrochés aux façades des immeubles. En avril 1906, Albert Bedouce boycotte l’inauguration de la mise en service prévue le mois suivant. Le nouvel édile, qui n’a jamais caché son hostilité à Firmin Pons, déplore tout comme certains journaux locaux (Le Midi socialiste, Le Cri de Toulouse), déplore les mauvaises conditions de travail du personnel, la durée des travaux et le matériel de chantier laissé sur certains trottoirs…
Plus de 12 millions de passagers avant 1914
Les habitants, eux, ne boudent pas leur plaisir, comme le constate un journaliste de La Dépêche dans un article daté du 9 mai : « Les gens s’arrêtaient sur les trottoirs pour voir filer ce matériel flambant neuf. Les enfants surtout regardaient avec de grands yeux et persécutaient leurs parents pour en obtenir un voyage, comme ils auraient demandé un tour sur les chevaux de bois ou sur les montagnes russes ». Le succès est tel qu’une quatrième ligne, baptisée BE (Lafayette/SaintMichel, E signifiant que la ligne est électrifiée) est inaugurée six mois plus tard, en présence cette fois-ci de Jean Rieux, le nouveau premier magistrat. Le réseau se densifie d’année en année. A la veille de la Première Guerre mondiale, il compte 142 kilomètres de voies et transporte plus de 12 millions de passagers. Il est « sectorisé » en trois catégories de lignes, comme l’explique Florian Nicolas, auteur du livre 1906. Le tramway électrique, la modernité sur les rails (Editions Midi-Pyrénéennes). « Le » réseau urbain « rayonne à partir d’Esquirol, de Capitole, de Matabiau (aujourd’hui place Jeanne-d’Arc) et Lafayette (aujourd’hui place Wilson), où l’on peut faire stationner les tramways au terminus. Celui de » banlieue urbaine « relie les noyaux villageois isolés du centre-ville. Les lignes hippomobiles sont électrifiées et certaines sont rallongées pour l’occasion, comme la ligne T (Capitole/Lardenne) en 1911. Enfin, les lignes » de banlieue suburbaine « sont construites à partir de 1912, en prolongeant des infrastructures existantes vers Castanet, Colomiers et Blagnac. Dans l’entre-deux-guerres, la société Pons qui devient la Société des Transports en Commun de la région toulousaine (STCRT), privilégie le développement de lignes de bus. Après 1945, l’usage de l’automobile individuelle explose. Le réseau de tram, lui, devient obsolète et disparaît complètement en 1957.