Nouvelles règles au centre : ce qui va changer
Vendredi 29 mars, le Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV) a été voté lors du conseil municipal de Toulouse. Un document d’importance pour le futur du centre-ville.
C’est un vaste plan pour le centre-ville de Toulouse. À partir de 2025, la Ville rose va, en effet, pouvoir disposer d’un Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV) qui va s’appliquer sur un périmètre de 256 hectares englobant l’intérieur des anciens remparts de la ville, et le faubourg de SaintCyprien.Soit 12 700 immeubles, selon les données fournies par la Ville de Toulouse, mais aussi deux sites inscrits à l’Unesco, la basilique Saint-Sernin et l’HôtelDieu, 155 monuments historiques, dont 2/3 appartiennent à des propriétaires privés, et 16 sites classés comme la Garonne, les Canaux et leurs abords.
Évolutions urbaines
« Le PSMV, c’est un document d’urbanisme qui prend en compte la démarche de protéger et de mettre en valeur le patrimoine de Toulouse, entreprise par la Ville de Toulouse il y a dix ans. C’est aussi un outil de planification urbaine. Par ce document, on ne figera pas le patrimoine du centreville, et l’on verra comment on peut l’intégrer à ce qui se fait en termes de construction au centre-ville », résume le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc. Sur le périmètre de 256 hectares, ce PSMV se substituera au Plan Local d’Urbanisme intercommunal de l’Habitat (PLUiH) qui est, lui aussi, en cours de rédaction. Fruit d’un travail de longue haleine, la réalisation de ce nouveau règlement a permis de mieux connaître les caractéristiques, l’état, et la richesse patrimoniale, parfois cachée, du centre-ville. Le diagnostic, débuté il y a plusieurs années, a, en effet, engendré 6 542 visites de sites en centre-ville. Cette étude lourde a permis d’identifier de ce qui visible et ce qui l’est moins au centre-ville, pour ensuite établir des classifications d’immeubles.
Désormais, 28,9 % des immeubles sont considérés comme devant être protégés aussi bien pour leurs extérieurs et intérieurs. À ce titre, ils peuvent être restaurés, mais sans modification de l’existant. 27,7 % sont considérés comme devant être protégés pour leurs extérieurs, avec des modifications tolérées à l’intérieur. 41% des immeubles pourront faire l’objet d’évolutions architecturales, être rehaussés par exemple. Le futur PSMV « énoncera, immeuble par immeuble, des prescriptions sur les extérieurs (toitures, façades, cours…) et les intérieurs (appartements, cages d’escalier, boiseries…), aussi bien dans les parties communes que dans les parties privatives », détaille Toulouse Métropole. L’entrée en vigueur de ce PSMV aura des conséquences pour les habitants du centre-ville, puisqu’elle entraînera « la création d’un droit opposable » mais aussi d’un « droit de regard » par la collectivité, a expliqué il y a quelques jours Jean-Luc Moudenc. « Cela va se traduire par le dépôt obligatoire de permis de construire pour les parties communes et privatives des immeubles », où les propriétaires seront tenus de réaliser des expertises structurelles. Avec, à la clé, un effet très concret pour les occupants – propriétaires comme locataires – qui vont par exemple bricoler à leur domicile ou sur leur lieu de travail : « Pour tous les travaux d’un appartement, les occupants devront obligatoirement déposer une déclaration préalable ». En contrepartie, tous les immeubles de ce périmètre vont se retrouver éligibles à la loi Malraux, les propriétaires pourront donc désormais obtenir des aides et défiscaliser des travaux en centre-ville de Toulouse.
Mieux anticiper les fragilités
Mieux connaître le bâti du centre-ville, son patrimoine (caché) pour mieux en accompagner les évolutions, c’est l’esprit de ce vaste plan qui doit aussi permettre de mieux anticiper certaines fragilités du bâti, et, peut-être, éviter d’autres effondrements du type de celui de la rue Saint-Rome. « Ce périmètre va nous permettre d’anticiper les évolutions urbaines, et d’avoir une politique du logement. Nous avons déjà remarqué des situations anormales qui ont donné lieu à 25 arrêtés pris en 2018 et 2022. L’idée, c’est aussi d’analyser l’offre commerciale, et d’évaluer les évolutions possibles », détaille Jean-Luc Moudenc. Ce plan de sauvegarde qui doit amener les autorités à mieux connaître l’hyper-centre, pour mieux encadrer ses évolutions vient combler une lacune. Depuis 1986, par un arrêté ministériel, Toulouse possédait son secteur sauvegardé, soit le périmètre de 256 hectares sur lequel va être appliqué le PSMV, mais il n’était régi par aucune règle d’urbanisme particulière. « Il n’y a jamais eu de définition d’un projet pour ce centre-ville », rappelle le maire de Toulouse.
Les réserves de l’opposition
« Ce plan de sauvegarde, réagit Isabelle Hardy, conseillère municipale d’opposition, c’est quelque chose qui va dans le bon sens, et qui est important pour la Ville de Toulouse », mais l’élue du groupe écologiste s’inquiète aussi de « points d’alerte ». « Quand on voit toutes les urgences qu’il y a à traiter, il faut mettre en oeuvre des mesures correctives d’urgence, pour contraindre », dit-elle, « les propriétaires à rénover ». La conseillère municipale d’opposition s’inquiète aussi de « la problématique des moyens » alloués à ce dossier :« Quels seront-ils précisément ? Pour mettre en oeuvre ce plan de sauvegarde à l’échelle d’un si grand périmètre, s’il n’y a pas les moyens adéquats, ça ne servira à rien. Vu l’ampleur du phénomène, ce n’est pas avec deux personnes qu’on va parvenir à contrôler la situation ! ».
Le processus amenant à la création de ce PSMV n’est pas terminé. Une délibération a été votée vendredi 29 mars 2024 en conseil municipal de Toulouse. Une deuxième délibération sera mise au vote au conseil de la métropole en avril 2024. Viendra ensuite le temps de l’enquête publique. Les élus seront ensuite amenés à délibérer au premier trimestre 2025, après avoir tenu compte des avis, et peut-être des réserves, exprimés dans le cadre de l’enquête publique. Le document sera alors stabilisé et envoyé sur le bureau du préfet qui prendra un arrêté qui rendra le document opposable aux tiers, c’est-à-dire devant être respecté par tout un chacun. Une fois le PSMV approuvé, l’État et la mairie de Toulouse feront appliquer cet outil réglementaire.
La direction du Patrimoine de Toulouse Métropole continuera quant à elle les visites des immeubles et renseignera la partie descriptive du fichier « Immeubles » pour parfaire la connaissance et anticiper une évolution future du document.