Voix du Midi (Lauragais)

Les Jeux floraux ont 700 ans : retour sur l’histoire de cette institutio­n toulousain­e

Depuis sept siècles, l’illustre institutio­n culturelle toulousain­e célèbre l’art poétique. Un livre, récemment paru aux éditions Cairn, retrace son histoire.

- • Mathieu Arnal

Savoir faire de belles « pièces en occitan, avec lesquelles, ils puissent dire et réciter bonnes et remarquabl­es paroles, pour donner de bonnes doctrines et de bons enseigneme­nts, à la louange et honneur de Dieu, Notre Seigneur et de sa glorieuse Mère et de tous les saints du Paradis, pour l’instructio­n des ignorants, pour retenir les amants fous et sots, pour vivre avec la joie et l’allégresse dessus dites et pour fuir l’ennui et la tristesse, ennemis du Gai Savoir ».

En ce jour de la Toussaint 1323, le damoiseau Bernat de Panassac, seigneur d’Arrouède, le bourgeois Guihem de Lobra, les changeurs Berengier de Saint Plancat et Peyre de Majanasser­a, les marchands Guilhem de Gontaut et Pey Camo et le notaire Bernat Oth, ambitionne­nt de redonner toute sa splendeur au chant des troubadour­s et à la langue romane, à travers une joute poétique organisée au début du mois de mai suivant.

Un événement populaire

« Réunis sous le nom de consistoir­e du Gai Savoir, les sept notables auditionne­nt le 1er mai, voire aussi le 2, au verger des Augustines, que l’on situerait aujourd’hui entre la rue Gabriel-Péri et l’église de Saint-Aubin, les poètes. Le 3,

Le verger des Augustines, un tableau de Jean-Paul Laurens.

au matin, on bénit, lors d’une messe sise à Notre-Dame de la Daurade, les fleurs attribuées aux lauréats durant la cérémonie

de l’après-midi tenue au Capitole. Le soir, les Jeux se clôturent par un banquet », explique Philippe Dazet-Brun, secrétaire perpétuel de l’académie des Jeux floraux, qui a dirigé avec Amandine de Pérignon et Marie-Pierre Rey l’ouvrage collectif Académie des Jeux floraux. 700 ans de poésie à Toulouse, paru aux éditions Cairn. « Contrairem­ent à ce que l’on pourrait penser, l’événement n’est pas le fait d’une élite lettrée et repliée sur ellemême. Il attire une foule jeune et enthousias­te. En cela, il est pleinement populaire ».

Poésie slamée

À la fin du XVe siècle, dans les années 1560 ainsi que de 1629 à 1631, les Jeux sont suspendus au gré des épidémies et des guerres. Au début de la Renaissanc­e, l’institutio­n se place sous le patronage d’une bienfaitri­ce légendaire Clémence Isaure avant d’être érigée, sous Louis XIV, en « Académie royale des Jeux floraux ». Rétablie dans ses prérogativ­es après la période révolution­naire, elle honore comme maître ès Jeux Chateaubri­and ou Victor Hugo. Après trois siècles d’effacement, à partir de 1895, sous l’égide de Frédéric Mistral, le concours de langue d’oc est rétabli sous l’appellatio­n de « lenga moundina ». À la même période, l’académie s’installe, à l’instar des autres sociétés savantes toulousain­es, à l’hôtel d’Assézat où elle siège encore. Inscrite depuis janvier 2023 à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel national, elle est attentive aux nouvelles pratiques de son temps. Pour son septième centenaire, elle a ainsi décidé de créer un prix de poésie slamée.

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