Essais
L’éternel Canyon Spectral revient pour montrer qu’avec le temps, il continue de s’améliorer. Papy fait de la résistance ? Non ! Chaque fois, il revient dans une version rajeunie et en phase avec l’évolution des besoins des pilotes. Fonctionnalités innovan
Canyon Spectral 29 CF 8 Orbea Oiz M Pro TR BMC Fourstroke 01 LT ONE Nakamura Complite 950 C vs Canyon Exceed CFR LTD
Le nom nous est familier et il a de quoi. Presque sept années se sont écoulées depuis l’apparition du Spectral dans la constellation Canyon, ses concepteurs accumulant leur lot d’informations, capitalisant sur ses points forts et remettant en cause ses points faibles. La mouture 2021 se remet donc en selle avec de la nouveauté. On a désormais le choix entre le 27,5 et le 29 pouces. Ce dernier est présent exclusivement avec cadre carbone, annoncé à 2 600 grammes, soit un allègement de près de 200 grammes par rapport à l’ancienne version. Nous avons ainsi eu l’opportunité de rouler le 29 CF 8 qui dispose d’équipements plus robustes et plus lourds afin d’engager davantage. Les 150 mm de débattement du cadre sont assurés par Fox avec un DPX2 Performance Elite, qui est complété par une fourche Fox 36 Performance Elite Grip 2 procurant 160 mm. En effet, Canyon propose une monte plus légère avec des modèles équipés en Rockshox à fourreaux de 35 mm, et non de 36, et 150 mm de débattement. Pour résumer, la gamme en 29 pouces compte donc quatre modèles allant de 3 299 € à 5 999 € parmi lesquelles le 7 et le 9 sont des versions plus légères face au 8 et LTD, un peu plus capacitifs. Et aucun d’entre eux n’est disponible en aluminium. Mais cessons de faire des différences et revenons-en aux faits. S’ils ont bien quelque chose en commun, c’est l’inébranlable qualité de finition et l’attention portée aux détails dont fait preuve la marque. Le Spectral est un vélo de trail qui doit pouvoir pédaler aussi bien qu’il descend. Sur toutes les tailles, vous aurez la possibilité de fixer un porte-bidon, tandis que la forme du cadre a été travaillée pour laisser suffisamment de place afin de ranger une chambre à air ou des outils via un strap. Pour un entretien sans accroc, bon nombre d’inserts filetés sont remplaçables évitant de mettre au rebut le cadre ou de l’endommager pour des futilités de vis trop serrées ou endommagées. On retrouve également l’axe arrière escamotable évitant le recours à une BTR pour démonter sa roue. Et l’accumulation de ces détails, à la fin, ça compte. Tout comme la très bonne intégration de la câblerie. Vous l’aurez compris, on en a pour notre argent, d’autant que les Allemands n’ont pas lésiné sur l’équipement. La transmission et le freinage sont intégralement japonais avec du Shimano XT, et les jantes DT Swiss XM1700 que l’on n’a plus besoin de présenter sont très pertinemment chaussées de Maxxis Minion DHF et DHR. Enfin, pour confirmer cette volonté de solidité, les composants tels que le guidon, la potence et les poignées sont des G5, soit la déclinaison Enduro/dh des périphériques Canyon.
Un pédalage musclé
Tant d’éléments qui laissent à penser que le Spectral a des airs de Strive.
On retrouve chez lui moult caractéristiques qu’on pourrait transposer sur un enduro, mais pourtant, Canyon le place comme un vélo à tout faire, à l’aise dans n’importe quelles conditions, ultra-polyvalent en somme. Et c’est vrai que la position qu’il offre pour pédaler est tout à fait adéquate. Redressé à 76,5°, le tube de selle nous place bien au-dessus du boîtier de pédalier et, logiquement, notre buste surplombe stablement le poste de pilotage. Celui-ci n’est pas trop surchargé et c’est appréciable. Avec sa potence très compacte, son cintre de 780 mm et son angle de direction de 64,5°, on sent vraiment qu’il a un tempérament à s’engager dans la pente. Canyon a également intégré un flipchip sur ce nouveau Spectral. Facile à changer, il suffit de dévisser un axe traversant au niveau de la biellette et d’inverser les cales de chaque côté : la manipulation peut se réaliser en cours de sortie sans soucis. Ainsi, l’angle de tube de selle se voit modifié de 0,5°, tandis que la hauteur du boîtier de pédalier va varier de 8 mm. Si sur certains vélos la différence est minime, ici nous avons vu un changement de comportement principalement au pédalage. Il convient déjà de se rappeler la monte de pneus Maxxis Minion DHF et DHR qui, avouons-le, propose une adhérence conséquente mais engendre en contrepartie davantage d’efforts pour avancer et lutter contre la résistance au déplacement. . Hormis ce paramètre facilement identifiable, la position Low abaisse donc le vélo et on constate dans les montées qu’il faut vraiment s’employer pour se mouvoir. Comme s’il y avait une perte d’efficacité ou une sorte de pompage. Dans notre cas, on serait tenté de dire que le ratio de suspension est trop élevé en début de débattement. On progresse difficilement mais, en revanche, nous sommes très stables ! Et que dire de la motricité. Les roues sont collées au sol dans tous les sens du terme, rendant les relances plutôt laborieuses mais, là où on ne pensait pas passer, le Spectral continue son petit bonhomme de chemin à son rythme sans jamais patiner. Cette motricité est vraiment un point fort. Même dans les pierriers où habituellement les roues s’emballent et où nous subissons, on aurait plutôt dit que le Canyon fendait le passage et trouvait sa trajectoire. Pour imager cela, si nous posions pied à terre dans la montée même très technique, ce n’était pas dû à une perte de contrôle mais parce que physiquement nous n’assumions plus. Il ne faut pas hésiter à débourser une bonne dose d’énergie si l’on souhaite atteindre le sommet à son guidon. Son poids se fait également ressentir, surtout lorsque les montées commencent à s’accumuler. Il faut trouver son rythme et lisser son effort, rien ne sert de s’énerver avec le Spectral. Et en inversant le flip chip en position High, alors ? On ne pourrait pas dire qu’on se sent redressé, la différence de 0,5° est difficile à percevoir mais on a l’impression d’être un peu plus haut, plus maniable. Au final, les ascensions linéaires sans changement de rythme et avec une pente pas trop importante passent relativement bien, notamment grâce à un excellent confort. On est plus à l’aise dans ce type de configuration que sur un parcours vallonné jonché d’enchaînements de relances.
Vigueur et fermeté
En revanche, lorsque la pente s’inverse, cette version 8 du Spectral est une boulimique de vitesse. À faible allure, il distille peu de sensations et ne se montre guère expressif. Surtout dans la configuration Low. Il faut lui rentrer dedans, lui montrer notre enthousiasme et aller au charbon, quoi ! On sent le travail de rigidité réalisé sur le tube supérieur, exacerbé par un reach conséquent de 485 mm. L’avant est très stable et demande des prises d’angle franches et engagées pour bien tourner. Cependant, pour l’arrière et ses bases courtes de 437 mm, vous pouvez être serein, elles suivront sans broncher et sont aisées à placer en début ou en sortie de virage. Néanmoins, à vitesse modérée, quand les traces sont sinueuses, on a vite fait de tomber dans un cercle vicieux à essayer de tourner et baisser de rythme. Or, c’est à ce moment-là qu’il est nécessaire de se ressaisir, quitte à surpiloter pour maintenir le tempo et virer plus facilement. C’est assez curieux mais à la manière du yin et du yang, le Spectral a deux facettes. Un côté qu’on pourrait presque qualifier d’inerte, un peu comme un gros vélo
À la manière du Yin et du Yang, le Spectral possède deux facettes.”
nonchalant qu’il convient de réveiller pour dévoiler son tempérament plus facétieux et dynamique. Quand on commence à prendre nos repères et gagner en rapidité, il s’avère étonnamment bienveillant et pardonne nos faiblesses. Toujours en position Low, on peut vraiment lâcher les freins, laisser la cinématique encaisser les chocs. D’ailleurs, les Shimano XT 4 pistons se sont montrés infaillibles en toutes circonstances, on aurait presque été déçus de voir d’autres freins à leur place tellement ils font du bon boulot. Le regard loin, on laisse couler le Spectral quelles que soient les conditions. Guère volatil, il s’ancre dans le sol et même les racines détrempées ont des difficultés à le faire sortir de son itinéraire. Quand des sauts se profilaient à l’horizon, nous n’avions étonnamment que peu d’appréhension à son guidon. Il gommait ces passages aériens avec beaucoup de facilité, nous laissant seulement le soin d’arriver avec la bonne vitesse. Le reste, il en faisait son affaire. Tout cela ne nous étonne pas non plus et on retrouve assez bien certains axes de conception à l’instar de la suspension Triple Phase du Canyon. La première partie très sensible est largement perceptible, tandis que la phase de mi-course censée temporiser fait bien son travail. Par contre, la dernière phase de débattement impose une prise de parti. Ceux voulant rouler fort apprécieront sa fermeté et sa rigueur même dans les plus gros appuis. En revanche, pour un pilotage plus souple et moins agressif, certains auront la perception de ne pas exploiter l’intégralité du débattement ou d’avoir un vélo trop « dur ». Il conviendra alors de bien trouver ses réglages, ce qui requerra un peu de temps pour l’apprivoiser. Là où on a eu le plus de difficultés, c’est lorsqu’il fallait être vraiment actifs dans les pierriers où on pouvait difficilement pédaler. Pour jouer avec les mouvements de terrain afin de préserver de la vitesse, nous devions presque exagérer nos mouvements et nos positions. Quand la fatigue commence à s’installer, le Spectral se montre alors de plus en plus exigeant. Dans l’optique de gagner en aisance et en maniabilité, la position High peut s’avérer judicieuse. Moins de sollicitations sont nécessaires pour virer ou déclencher une action de saut ou de virage. Mais ce n’est pas magique non plus, le Spectral a son propre caractère et c’est à chacun d’y adhérer ou pas.