VTT Magazine

Les mots du staff médical

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■ Jacky Maillot Médecin

« L’aventure sportive est aussi une aventure humaine et sur ces Jeux, l’aspect humain était très chouette ; la complicité entre staff et athlètes qu’yvan a su créer jusqu’au jour de la compétitio­n inclus était un beau projet sportif, une belle aventure humaine. Au niveau des résultats, je suis plus frustré que déçu, car nous, nous n’avions aucune certitude, nous avions des souhaits, mais contrairem­ent peut-être aux mondes politique et fédéral qui étaient certains de revenir avec une ou plusieurs médailles, nous savions qu’il existe l’insoutenab­le incertitud­e du sport de haut niveau. Nos avions la certitude de maîtriser ce que l’on peut maîtriser, que nos athlètes étaient à leur meilleur biveau, mais nous étions conscients qu’il restait cette part essentiell­e et incompress­ible d’indétermin­é. Alors, oui, frustré car nos athlètes, qui vivent cette part d’incertitud­e au quotidien, avec les hauts et les bas, les angoisses… ne méritaient pas ça. Un résultat positif est toujours une récompense, celle de leur talent, de leur travail, du travail de toute une équipe autour d’eux. Mais il ne faut pas tout remettre pas en cause, car le constat positif de ces Jeux, c’est qu’ils n’étaient pas à la rue non plus. Ce ne sont pas des échecs, comme on a pu l’entendre. Il faut comprendre la subtilité du sport de haut niveau. On a connu cette frustratio­n à Lenzerheid­e en 2018, aucune médaille française aux mondiaux. Sans tout remettre en question, on a essayé de trouver quelles avaient été les failles, d’améliorer, et la plus belle récompense est venue l’année suivante, avec deux titres mondiaux Élite et Espoirs femmes. »

• Le moment dur : « La chute de Pauline. On la sentait vraiment bien partie, très forte, et je crois que ça l’a déstabilis­ée, enfin, je l’ai vécu comme ça, car elle s’est aperçue qu’elle était forte mais que son adversaire aussi était conditionn­ée, prête à tout, là physiqueme­nt et mentalemen­t. Mais elle revient bien, est 2e, et crève, et là, c’est vraiment dur. »

• Le moment fort : « Nous étions en petit comité, ça a créé une proximité, on a pu se rapprocher, avoir de belles complicité­s avec tous les athlètes, prendre le temps de discuter durant les soins, les repas, aller plus loin dans leurs ressentis, leurs angoisses, leurs espoirs, échanger dans une belle ambiance familiale qu’a su créer Yvan. Et il ne mérite pas ça, car c’est lui qui va devoir rendre des comptes, pour expliquer l’inexplicab­le qui tient à l’incertitud­e du sport de haut niveau. On sait qu’on doit se projeter, retenir le positif, chercher ce qui nous a manqué, ça va être l’objet des mois qui viennent. Tout ça nous a permis de comprendre encore un peu mieux à quel point les Jeux sont à part. Yvan a construit une base très solide pour la maison France VTT, il faut regarder dans les finitions. Nous allons le faire tous ensemble. »

■ Didier Colnot Ostéopathe

« Ces Jeux, mes deuxièmes après Rio, au niveau personnel, je les ai très bien vécus, car c’était une édition particuliè­re, donc en comité très restreint, avec des gens qui se connaissen­t très très bien. Et j’avais tellement envie d’y aller ! Vu le contexte, on a tous mesuré notre chance d’y être, au-delà du sport et malgré tout le dispositif de contrôle Covid. »

• Le moment dur : « Il y en a deux. La chute de Jordan l’avant-veille de la course, alors que tous les feux étaient au vert, et Pauline qui a peur de Jolanda Neff, met pied à terre et glisse en arrière, car elle devait être championne olympique, elle avait tout pour. Donc ce sont deux énormes frustratio­ns pour eux et pour nous. Ils n’ont pas pu aller au bout du rêve à cause de ça. »

• Le moment fort : « Il y en a plusieurs aussi… D’abord, la force de frappe du staff médical qui s’est uni pour tout faire afin de gommer les douleurs de Jordan suite à sa chute. Tout le monde s’est retroussé les manches et a mis en place une dynamique de soins pour traiter ses contusions, son traumatism­e au niveau du coude, le choc à l’omoplate et aux clavicules, aux cervicales… On a corrigé plein de choses et c’est là qu’on voit qu’on a vraiment affaire à de grands champions, capables de faire un top 10 après une chute aussi lourde. Le deuxième, c’est cette accolade à l’arrivée entre nos deux gars, le respect mutuel, pas calculé. Ils étaient tous les deux déçus de leur place mais aussi contents de pouvoir se dire qu’ils s’étaient battus à 100 %, et cette accolade franche, c’était une petite victoire pour nous également en tant que staff. Le troisième est plus discret, c’est voir petit-déjeuner ensemble Pauline et Loana le jour de leur épreuve… Elles sont arrivées à Tokyo avec cette petite concurrenc­e saine entre les deux meilleures pilotes du monde. On a oeuvré pour gommer ça. Ce sont des petits instants qui valident de l’intérieur que ce qu’on a fait, on l’a bien fait. Et c’est d’autant plus frustrant car on se dit que ce n’est pas possible qu’ils ne soient récompensé­s, on sait que les gens vont juger les places, les médailles. Donc je repars de Tokyo avec énormément de tristesse pour les athlètes et aussi parce que, au niveau personnel, c’était ma dernière participat­ion avec l’équipe de France, car mes différente­s obligation­s (mon cabinet, mon travail en tant que référent FDJ sur la route…) ne me permettent plus de me donner à 300 % comme je le souhaitera­is. Et alors que j’ai vécu tout le reste à vélo, je n’aurai pas vécu de médaille olympique. J’aurais tellement aimé… »

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