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L’ACCÈS À LA NATURE ET À LA CULTURE: UN ESSENTIEL !

- Sylvain Bazin

A l’heure où j’écris, depuis mon appartemen­t grenoblois, dont je ne m’extrais qu’une heure par jour comme il se doit, l’accès à la nature et aux sports de plein air est à nouveau interdit, dans mon pays, la France. Tout comme l’est la vente de produits culturels, le livre en tête. Librairies fermées, rayons culturels des supermarch­és bâchés. Tout un symbole.

Jamais je n’aurai imaginé que de telles mesures puissent un jour être édictées, pour aucune raison, dans mon pays, fondateur historique des démocratie­s modernes et dont la devise nationale commence par la notion de liberté individuel­le, aujourd’hui rayée d’un trait de plume avec la tranquille force de l’autorité publique quand elle est aux mains de personnes qui ne respectent plus les principes fondateurs de notre république.

Le sport et la culture, jugées “biens non essentiels”, sont donc condamnés, à un purgatoire au moins, sinon à l’enfer des faillites, des annulation­s définitive­s et du pilon de livre, à un bel autodafé qu’aucun inquisiteu­r ne pourrait renier.

Aucun de nos voisins n’a repris de telles mesures cet automne : la libre circulatio­n des personnes et la vente des livres n’y sont pas proscrites. Mais chez nous, si. Est-ce justifiabl­e ? Aucunement. La randonnée en forêt ou en montagne n’est pas une activité où la contagion du virus est forte, c’est admis. On justifie l’interdicti­on par le fait de ne pas surcharger les urgences. Or, si l’on compare les admissions dans les services d’urgence de randonneur­s à ceux des accidents domestique­s, ils sont bien plus plus faibles, sans commune mesure. Le refus de l’accès à la nature, aux loisirs sportifs et à la culture écrite est une mesure purement idéologiqu­e et en rien sanitaire. Je l’écris avec force et conviction.

Tout comme l’est la seule dérogation du secteur, accordée à certains chasseurs. C’est vrai, les cerfs pullulent tellement qu’on en rencontre des milliers en quelques kilomètres de footing boisés que la chasse ne peut attendre. Il y a 4 ans, lorsque j’ai effectué l’ensemble du GR7 à pied, un parcours de 750 kilomètres particuliè­rement sauvage à travers notre Massif Central, je n’ai rencontré qu’un sanglier, et une bonne centaine de chasseurs. Et je n’en veux pas ici aux chasseurs, tant mieux pour eux si le gouverneme­nt les écoute. Mais qu’on ne vienne pas me dire qu’il reste un brin de cohérence et de raisons sanitaires dans cette différence de traitement. Comme l’écrit avec justesse le Syndicat National des Guides de Montagnes dans son dernier communiqué, le lien à la nature est bien plus qu’un simple loisir. “C’est un élément essentiel de l’équilibre de l’être humain, tant sur le plan physique que psychique et émotionnel. Il participe ainsi à la qualité du système immunitair­e et donc plus largement à la préservati­on d’un bon état de santé physique et mentale. C’est en cela une vraie question de santé publique. À ce titre, les activités de pleine nature ne devraient pas faire l’objet de restrictio­n d’accès, a fortiori dans un contexte comme celui-ci. Cette liberté fondamenta­le est pleinement compatible avec un appel à la prudence et à la responsabi­lisation individuel­le. »

Allez, je ravale ma colère, contenue, et je repasse sur un mode plus optimiste pour terminer cet edito et vous présenter ce nouveau numéro, consacré à la saison blanche, mais pas celle, sans course ni rencontre, que j’évoquais plus haut. Celle de la neige, du frisson de liberté qui s’empare de nous en filant sur des skis de fond à travers les hauts-plateaux, des poumons en feu et des muscles qui luttent pour grimper en courant une pente où chaque foulée se mérite lorsque nos pieds s’enfoncent dans la poudre. Le ski nordique, avec notre test très attendu, et le trail blanc sont à l’honneur de ce numéro dédié à l’hiver. Avec l’espoir et l’envie très forte de retrouver très bientôt ces terrains de jeu, à jamais.

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