Deutsche Welle (French Edition)

Un procès sur fond de grève des avocats

Le procès de plus de 400 personnes arrêtées après les manifestat­ions du 20 octobre se déroule à Koro Toro sans les avocats des prévenus.

-

Ce sont 401 prévenus sur 621 en tout qui comparaiss­ent ce mardi. Les 220 autres, sur lesquels pèsent des accusation­s plus graves, seront présentés plus tard.

Mais cette audience se déroule sans les avocats qui ont décidé de suspendre leur activité dans tout le pays pendant la durée du procès. Les avocats dénoncent la déportatio­n illégale des prévenus à plus de 500 kilomètres, en violation selon eux des règles régissant les limites des ressorts territoria­ux des juridictio­ns.

Ils dénoncent aussi l’audition des personnes emprisonné­es sans l’assistance d’un avocat.

‘’On me dit que mon ࢆls est à Koro Toro et que ce sont les gens de la Croix Rouge qui prennent soin de lui, mais est-ce que c’est vrai ou ce n’est pas vrai ? Je ne sais pas. En tant que père ça m’inquiète beaucoup puisque sans avocats, comment vont-ils les juger ? Ils n’ont rien fait, ils ont manifesté juste pour leur droit’’ explique Grégoire Ousmane le père d’Ousmane Andjafa, un jeune homme de 22 ans arrêté à la suite de la manifestat­ion du 20 octobre.

Cette situation n’honore pas la justice tchadienne, estime le politologu­e Evariste Ngarlem Toldé. Selon lui ''évoquer les audiences foraines pour faire un jugement à Koro Toro n’honore pas notre justice. Il est temps que le gouverneme­nt puisse comprendre que cette façon de faire risque de crisper encore davantage la situation. Ce sont des prévenus, ils ont droit à une justice équitable. Ce qui se passe à Koro Toro est une manière d’éloigner les victimes loin des parents et des curieux qui veulent assister à ces audiences".

"Une parodie de justice"

Pour l’avocat Max Loalngar, porte-parole du mouvement citoyen Wakit-Tama, l’une des organisati­ons à l’origine des manifestat­ions du 20 octobre dernier, qui vit depuis lors dans la clandestin­ité, le gouverneme­nt devrait simplement reporter le procès.

"L’absence des avocats à un procès est une parodie de justice. On ne saurait concevoir un procès sans que la cause des personnes inculpées ne soit défendue. Les autorités judiciaire­s, tout comme les autorités politiques, doivent tenir compte du refus des avocats de se présenter à cette audience et reporter purement et simplement cette audience. Ramener les prévenus à N’Djamena, permettre l’ouverture d’une enquête véritablem­ent indépendan­te pour, s’il y a vraiment une insurrecti­on comme ils le soutiennen­t, qu’on ouvre la voie à un procès équitable’ précise t-il.’

Contactés par la Deutsche Welle, ni le ministre de la Justice, Mahamat Ahmat Alhabo, ni le porte-parole du gouverneme­nt tchadien, Aziz Mahamat Saleh, n’ont souhaité réagir à ce sujet.

 ?? ?? Des jeunes mobilisés lors des manifestat­ions du 20 octobre.
Des jeunes mobilisés lors des manifestat­ions du 20 octobre.

Newspapers in French

Newspapers from Germany