Spécial Madame Figaro

Trésor Beyrouthin

- PAR ELGA TRAD PHOTOS ARTHAUS HOTEL

ALLIANCE SUBTILE

D’UNE ARCHITECTU­RE TYPIQUE DES MAISONS ANCESTRALE­S LIBANAISES ET D’UNE AMBIANCE CONTEMPORA­INE, DÉCONTRACT­ÉE ET DESIGN, L’HÔTEL ARTHAUS QUI VIENT D’OUVRIR SES PORTES IL Y A DEUX MOIS, S’INSCRIT PARFAITEME­NT DANS LE PAYSAGE DU QUARTIER DE GEMMAYZEH, ENTOURÉ DE DEMEURES LIBANAISES ANCIENNES.

MMAISON CHARGÉE D’HISTOIRE

Nichée dans un petit passage perpendicu­laire qui s’éloigne de 10 mètres de l’artère principale du quartier de Gemayzeh, la maison familiale convertie en hôtel est noyée par des arbres centenaire­s qui étalent leurs feuillages harmonieus­ement formant une oasis de calme et de volupté, si bien que l’on se croirait en dehors de la ville. Les propriétai­res ont souhaité réhabilite­r les lieux dans le respect de l’identité originale afin de conserver au bâtiment historique son cachet, tout en ajoutant une pointe de modernité à la bâtisse afin de lui conférer un confort répondant aux exigences modernes, d’où une rénovation à partir de matériaux typiques de l’époque en consonance avec le style de la demeure. A cela vient se greffer tous les attributs high-tech pour un maximum de confort.

Le plus impression­nant est sans doute le travail effectué sur la belle façade de cette ancestrale maison en pierre de taille férné, pierre locale caractéris­tique du Liban. On est séduit tout de suite par le charme authentiqu­e qu’elle dégage. Ravalement complet et parements ont été entièremen­t refaits grâce à des enduits grattés et lissé et des filants afin que la pierre ne s’effrite pas et pour lui permettre de conserver sa couleur naturelle. Des travaux importants ont été entrepris sur la partie structurel­le de la maison. La toiture a été entièremen­t rénovée et un énorme travail sur les balcons a été opéré de même que la réorientat­ion des espaces extérieurs. Des équipes d’ingénieurs, d’artisans, d’ébénistes se sont succédées pour en faire un îlot de tranquilli­té et de bien-être, tout en redonnant au lieu son cachet.

L’entrée principale a été réaménagée afin de pouvoir donner un accès direct et de plein pied à la piscine d’une part et à la grande terrasse qui la jouxte, ainsi qu’à la terrasse installée à l’entrée de l’hôtel qui avait longtemps été utilisée uniquement pour permettre d’avoir un simple accès à la maison. Ces changement­s ont été réalisés afin de donner davantage d’ampleur à l’espace extérieur qui a été agrandi et élargi, créant ainsi un mouvement de vie vers l’extérieur et une communicat­ion avec la nature. C’est donc dans cette perception des choses que les champs extérieurs de la maison ont été divisés en quatre zones distinctes : deux terrasses, une à l’avant à l’entrée et une à l’arrière, placent la maison au centre avec espace ouvert et grandes baies vitrées pour un maximum d’amplitude et de fluidité dans les déplacemen­ts. On retrouve alors un coin piscine, une terrasse lounge enclavée dans la verdure et un patio ouvert avec toiture. Les tables et chaises en fer forgé et rotin qui occupent la terrasse sont en harmonie avec la volonté de mêler le style contempora­in au classique.

EXPRESSION­S CULTURELLE­S ET ARTISTIQUE­S

L’hôtel est formé d’un ensemble de 5 maisons familiales appartenan­t aux aïeux des propriétai­res ce qui en fait un petit îlot indépendan­t dans le quartier. Quatre d’entre elles sont réservées pour l’hôtel et la cinquième, pour des appartemen­ts meublés. La plus ancienne date de 1790, puis est venue s’ajouter une deuxième construite en 1860 et les autres ont suivi.

Dans un désir de conserver un esprit d’authentici­té, l’aspect extérieur du bâtiment a été conservé à l’identique et a bénéficié de petits rajouts tel que abat-jours en bois naturel conforméme­nt au modèle d’origine, corniches réalisées sur base de photos d’époque, reprises des motifs et de dessins identiques à ceux existants déjà pour les rampes des escaliers en fer forgé…tous ces travaux ont été effectués dans le souci du détail et dans le strict respect des

traditions. En contrepart­ie une redistribu­tion complète de l’intérieur de la demeure a été réalisée. Les espaces intérieurs ont été pensés de façon contempora­ine, ponctués de mobilier design avec des couleurs chaudes pour faire un contraste avec la couleur de la pierre et apporter de la vivacité, de l’éclat et de la chaleur. Parmi les changement­s effectués, la cuisine et une salle à manger qui sont devenues chambre à coucher et suite, la salle de cinéma a été transformé­e en cuisine industriel­le…A l’entrée, deux arcades de part et d’autres ont été adjointes et qui sont semblables à celles existantes déjà. Elles ont été rehaussées par deux portes en bois de cèdre, hautes de plus de 4 mètres, donnant un air solennel et très élégant. Au centre, en se dirigeant vers le bar, une jolie fontaine en marbre trône au milieu et cela confère une approche très avenante et fraîche. Tout autour, des petits coins pour s’installer, créent une atmosphère avenante. Le regard se dirige vers le haut où l’on s’attarde sur une jolie ouverture formant un carré parfait auréolé d’une rampe en fer forgé, sans escalier apparent, toujours pour cette impression de communicat­ion et d’ouverture entre tous les espaces, laissant ainsi entrevoir les étages supérieurs et créant une trajectoir­e infinie.

ATMOSPHÈRE ACCUEILLAN­TE

Pour la petite histoire, dans les années 30, la grand-mère paternelle du propriétai­re voyant que le port se développai­t rapidement, a appréhendé le bruit, la promiscuit­é et la fréquentat­ion trop agitée du voisinage d’où sa volonté de déménager dans des quartiers plus haut vers Achrafieh. Sa maison se retrouve alors louée a la Croix Rouge Libanaise, de même que toutes les autres …Ce n’est qu’en 2010 que le propriétai­re rentre au pays, et décide réhabilite­r les lieux.

L’hôtel, qui s’élève sur trois niveaux, comporte 23 chambres décorées avec élégance et luxe discret. L’esprit souhaité est que ce soit une maison ouverte ‘’beit maftouh’’ , comme on dit en libanais. C’est-à-dire toute personne est la bienvenue dans une maison ouverte à tout moment de la journée pour la famille et les amis. Ici règne ici un sentiment de vivre comme chez soi, de laisser les invités évoluer avec aisance, comme on le fait en se déplaçant dans sa maison. C’est dans cette optique des choses que la déco a été sélectionn­ée avec

une attention particuliè­re et que les meubles ancestraux ont repris vie en rafraichis­sant les tissus, et ont été complétés par des meubles d’appui achetés aux puces libanaises. Les lustres chinés auprès d’antiquaire­s ou encore récupérés de maisons anciennes auprès de particulie­rs. Cela se complète avec un accrochage de tableaux représenta­nt les ancêtres et des objets archéologi­ques, des peintures, sculptures et installati­ons acquis au fil des années aux quatre coins du monde. Au sol, marbre carrare et pierre ferne, et ramlé aux murs. Bois kotrani, bois de Cèdre de Turquie pour les portes et plafonds; et dans un souci d’écologie, le bois pourri qui a été évacué a été recyclé comme par exemple d’anciennes poutres qui ont été transformé­es en cache-radiateurs.

A TRAVERS LES ÂGES

En choisissan­t le nom Arthaus , les propriétai­res des lieux ont cherché à répandre l’esprit créatif des salons culturels du XIXème siècle, en s’inspirant du Bauhaus. Ce mouvement s’est développé au début du XXème siècle suite à la deuxième guerre mondiale, mettant en relief et après beaucoup de souffrance­s, le talent et la créativité de nombreux artistes. C’est inspiré par cette approche que les propriétai­res des lieux ont désiré établir une plateforme culturelle, à but non lucratif. Une manière d’encourager, d’inciter et d’inviter les différents artistses à s’épanouir, s’exprimer et mettre en avant leurs idées et leur art. Le Arthaus ouvre volontiers ses portes et fait lieu de résidence autant pour les clients que pour les artistes et créateurs que ce soit dans les domaines de la peinture, de la sculpture , de la mode et de la musique, encouragea­nt les talents libanais et étrangers et se positionna­nt en une niche culturelle.

Depuis 2015, un grand nombre d’évènements culturels et expos sont organisés, alors qu’à l’époque cette résidence était la maison qu’habitait les propriétai­res avant de songer à la métamorpho­ser en hôtel quelques années plus tard. La dernière exposition en date, remonte à il y a un mois. Intitulée «Beyrouth année 0», le nom est tiré d’un film de Rossellini tourné en 1947 dans le Berlin d’après-guerre complèteme­nt saccagé et en plein «social realism». Alors que les projecteur­s se dirigeaien­t sur la ville en ruine, on pouvait voir les berlinois habitués à cette réalité dure et dévastatri­ce, aux gens déplacés, à l’électricit­é coupée, la pauvreté, aux restrictio­ns financière et aux privations multiples…un désastre à l’échelle humaine, qui rappelle ce que vivent les libanais depuis plus d’un an. D’où l’idée de cette appellatio­n’ ‘Beyrouth année 0» pour l’exposition. Mais aussi cela peut donner une deuxième vision et un sens positif, en considéran­t que Beyrouth a bien touché le fond et que le «0», permet donc de prendre un nouveau départ et que le compteur va démarrer au point 0 pour que le Liban prenne son envol et se relève …

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 ??  ?? Une maison au cachert typiquemen­t libanais.
Une maison au cachert typiquemen­t libanais.
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 ??  ?? Un mix réussi de classique et de moderne..
Un mix réussi de classique et de moderne..
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 ??  ?? Des chambres spacieuses et lumineuses.
Des chambres spacieuses et lumineuses.
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 ??  ?? Le lieu se veut plateforne culturelle et artistique.
Le lieu se veut plateforne culturelle et artistique.
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