La friterie «vegan» est née
A Bruxelles, un établissement propose des frites de «qualité gastronomique» à prix populaire
Bruxelles. Pour faire de bonnes frites «à la belge», il faut choisir des Bintjes, les éplucher, les laver, les essuyer au moyen d’un torchon, les couper en bâtonnets, les essuyer à nouveau. Puis, il faut les faire frire une première fois à température moyenne pendant quelques minutes et laisser reposer. Enfin, les frire une seconde fois à 180 degrés jusqu’à ce que les frites soient dorées, croustillantes. Le tout dans du blanc de boeuf évidemment, la graisse produite par le vaillant ruminant …
Et c’est que le bât blesse. Pour les «vegans», il ne peut être question d'ingérer une matière d’origine animale, qu’importe si le blanc de boeuf fige selon la tradition l’authenticité des frites belges. Quant aux partisans du bio, ils voudraient être certains de manger des aliments rescapés de la maltraitance agro-alimentaire: pas ou peu de pesticides sur les plants de pomme de terre, le respect des sols, la qualité plutôt que la quantité.
C’est en pensant à eux que Patatak a ouvert il y a quelques semaines au Parvis de Saint-Gilles, une commune du centre de l’agglomération bruxelloise. «Patatak est l’aboutissement d’un rêve, peut-on lire sur son site: proposer de véritables frites avec des pommes de terre d’un producteur local, pelées et coupées sur place et embellies de sauces maison.»
La graisse de boeuf – en option La friterie propose des «frites en graisse de boeuf ou en huile végétale, sauce avec et sans oeuf. Patatak est ouvert à tous: des produits vegan, carnés et veggie, à toutes les tailles.» Le menu, précise encore la carte, «inclut des options végétariennes, végétaliennes, halal, casher, sans lactose et sans gluten.»
C’est ainsi qu’une tendance déjà solidement ancrée dans la capitale belge – où les restos bio et vegan se sont multipliés ces dernières années – est entrée dans un «fritkot». Pour mettre tous les atouts de son côté, Patatak s’est donné un décor à la hauteur: le Parvis de Saint-Gilles passe aujourd’hui pour l’un des endroits les plus branchés de la capitale, le principal haut lieu en étant la Brasserie de l’Union.
La presse belge s’est précipitée sur place pour découvrir ce projet atypique. Les fritkots à l’ancienne sont en effet en voie de disparition. Alors, pensez, une nouvelle friterie qui fait en plus dans le bio et le vegan, c’est l’aubaine. Dans les médias, le patron de Patatak répète qu’«on a de plus en plus de mal à trouver de bonnes frites à Bruxelles». Ce mets noir-jaunerouge est le plus souvent consommé dans des snacks peu regardants sur la qualité ou dans les grandes enseignes de la junk food. Si l’huile y est végétale, les pommes de terre proviennent en revanche de l’industrie agro-alimentaire. Elles sont déjà tranchées et surgelées.
Comment proposer des frites «de qualité gastronomique»? «En se fournissant chez des petits producteurs locaux. Quasiment tous mes produits viennent du coin», répond le propriétaire. Ensuite, tout est fait maison: épluchage et taillage à la main.»
Tout n’est pas vegan pour autant chez notre artisan fritier. Patatak n’a pas voulu se couper du public traditionnel des mangeurs de frites au motif d’en conquérir un autre, plus restreint. A table, deux mondes cohabitent. Bruxelles n’est pas Paris ou New York: occuper un créneau culinaire trop spécialisé, limite sectaire, serait «suicidaire», explique-t-on chez Patatak.
Les prix restent raisonnables «L'esprit du fritkot et de ses prix démocratiques est préservé», se rassure le quotidien «La Dernière Heure». Le petit cornet de frites est à deux euros, sauce comprise. La portion moyenne coûte trois euros tandis que la plus grande est à cinq euros, accompagnée de deux sauces au choix. Quant aux patates douces – autre aliment à la mode – elles sont vendues un peu plus cher. Mais sache «Manneke» qu’ici les prix n’ont pas été montés en mayonnaise! HeM