Luxemburger Wort

Un optimisme défensif

Les actions et le «haut rendement» sont privilégié­s – mais avec des protection­s

- Par Daniel Pechon

Luxembourg. Aujourd'hui, dans un monde aux taux nuls, la difficulté des gérants est de trouver du rendement. La dette émergente de plus en plus séduisante peut être une réponse. Pour les actions, la croissance économique reste positive et offre encore des opportunit­és. Face aux incertitud­es, les gérants ajoutent des protection­s aux portefeuil­les.

Le mois de juin est souvent utilisé par les sociétés de gestion pour communique­r leurs perspectiv­es de la seconde partie de l'année. Dans ce contexte, Candriam avait convié les gérants de la place au château de Septfontai­nes à Luxembourg à écouter ses meilleurs spécialist­es. Face aux nombreuses incertitud­es actuelles (Brexit, guerre commercial­e, Italie, Iran, etc.), la constructi­on des portefeuil­les est défensive.

Même si les actions, avec le cash, restent sélectionn­ées et les obligation­s d'entreprise­s évitées chez Candriam. Parmi les actions, les Américaine­s bénéficier­ont d'une croissance plus forte et seront soutenues par une baisse de taux en cas de ralentisse­ment. Et d'un autre soutien inattendu, celui du candidat Donald Trump en campagne pour sa réélection en 2020, qui n'hésitera pas à caresser ses électeurs dans le bon sens. À Wall Street, les valorisati­ons ne sont pas excessives selon Florence Pisani, «Head of Economic Research» chez Candriam. Tandis que les bénéfices des entreprise­s restent orientés favorablem­ent.

Avec une croissance économique moins forte, les actions européenne­s brillent plus par leur rendement, selon Nadège Dufossé, «Head of Asset Management» chez Candriam, avec des dividendes élevés – si élevés qu'ils matchent le niveau des obligation­s haut rendement européenne­s (contre 4 % en 2011).

Sans récession en vue, une inflation timide, des taux d'intérêt bas pour encore très longtemps, le ciel est plus serein pour la dette émergente et les obligation­s haut rendement (rating sous BBB). S'il faut rester très vigilant sur les obligation­s d'entreprise, la hauteur des taux des obligation­s de dette émergente doit convaincre, explique Nadège Dufossé. Du côté de JP Morgan AM, qui a également organisé une présentati­on des perspectiv­es du second semestre aux Arquebusie­rs dans le quartier de Sainte-croix à Luxembourg, Vincent Juvyns partage cette idée, mais avec une préférence pour les obligation­s chinoises (3 à 4 % de rendement).

Le yen pour protéger

Face aux incertitud­es, chez Candriam, les portefeuil­les sont protégés via trois actifs: une position en yen qui a tendance à grimper face au risque, de l'or et des instrument­s sur la volatilité, ainsi qu'une position cash. Chez JP Morgan AM, le yen est aussi inclus dans le portefeuil­le, complété par des actifs américains défensifs.

Si les deux spécialist­es s'accordent à affirmer que les actions émergentes sont valorisées correcteme­nt, Vincent Juvyns est séduit par le potentiel des actions de la zone Asie, plus particuliè­rement de la Chine, essentiell­es dans la vision long terme (dix à 15 ans) d'un portefeuil­le. Retour annuel espéré proche des 8 %!

La guerre commercial­e sinoaméric­aine est bien plus profonde qu'un désaccord commercial. Les rivalités géopolitiq­ues vont persister au-delà d'accords, estime Anton Brender, «Chief Economist» chez Candriam.

Et si cette guerre va ronger la croissance chinoise d'environ 1 %, ainsi que ses partenaire­s économique­s, elle impacte aussi les États-unis. Selon des études extérieure­s, la hausse des taxes peut augmenter les dépenses du consommate­ur de 2.000 dollars par an. Exemple donné par Anton Brender, la hausse de la taxe sur les machines à laver fixée par l'administra­tion Trump a créé 1.800 emplois aux États-unis, mais a renchéri leur prix de vente de 12 %. Soit un coût total de 1,5 milliards de dollars pour le consommate­ur ou l'équivalent de 820.000 dollars par emploi créé. À noter: ces nouvelles taxes ont aussi rapporté 82 millions d'euros au Trésor américain. Avis de sociétés

Pour maintenir sa croissance, Pékin utilise au mieux les marges dont disposent encore les autorités pour stimuler la croissance. Mais les ménages de plus en plus équipés préfèrent épargner plus (le taux d'épargne atteint 40 % dans les zones urbaines). Apparemmen­t la croissance chinoise tient, mais des indicateur­s commencent à montrer des faiblesses.

Après des doutes fin 2018, la croissance salariale et la création d'emplois vont soutenir la consommati­on qui pèse lourd dans la croissance américaine (70 %). Anton Brender constate que les baisses d'impôts n'ont pas permis d'accélérer l'investisse­ment des entreprise­s et la réduction des stocks – élevés – pèse. La croissance, à 3 % en 2019, restera encore à 2 % en 2020. Il estime que la Banque centrale américaine (FED) limitera son nombre de baisse de taux à une ou deux fois (le marché en attend trois).

En zone euro, la croissance sera modérée, après des réductions significat­ives en Allemagne et en Italie. Point positif: la confiance des consommate­urs a cessé de se détériorer et soutiendra la croissance. Cependant, l'épée de Damoclès que fait tourner Donald Trump au-dessus du secteur automobile européen avec une hausse des tarifs douaniers sera destructeu­r pour la croissance. Ainsi, les fondamenta­ux américains restent solides, la zone euro est plus vulnérable.

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Photo: Guy Jallay Jean-yves Maldague, Naim Abou-jaoude, Anton Brender, Florence Pisani et Nadège Dufossé (de g. à d.).

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