Les asbl aussi doivent s'inscrire
Le registre des bénéficiaires effectifs est obligatoire pour les 8.000 associations du pays
Luxembourg. Un peu plus de trois mois après l'entrée en vigueur de la loi instituant un Registre des bénéficiaires effectifs (RBE), la conférence de presse tenue vendredi par le ministre de la Justice Félix Braz fait figure de piqûre de rappel: toute société, fondation, association à but non lucratif ou succursale constituée au Luxembourg est tenue d'enregistrer ses bénéficiaires effectifs dans le nouveau registre avant le 31 août 2019 – soit près de 129.000 entités, parmi lesquelles près de 8.000 asbl.
Une fois de plus, les entreprises ne se bousculent pas au portillon. «Le taux d'inscription reste faible pour l'instant», commente le ministre de la Justice: «au 31 mai, sur les 129.000 entités concernées, seules 7.029, soit 5,5 %, ont effectué les démarches nécessaires. Cela représente 11.539 personnes physiques, dont 7.922 bénéficiaires effectifs et 3.617 dirigeants principaux.»
Informer et sensibiliser
Le ministère sait qu'il doit redoubler d'efforts pour informer et sensibiliser les entreprises et surtout les asbl. Quatre conférences d'information ont d'ores et déjà été organisées auprès de L'ABBL, de la Chambre de commerce et de la Chambre des métiers. Le ministère a également publié deux circulaires afin d'expliquer les obligations à remplir et les démarches à effectuer pour se mettre en règle. Deux autres circulaires ciblant respectivement les fondations et les établissements publics doivent encore être diffusées ainsi qu’une brochure reprenant les réponses aux questions les plus fréquemment posées à Luxembourg Business Registers, l'organisme chargé de gérer le nouveau registre.
La campagne de sensibilisation cible plus précisément les 8.000 asbl concernées par ce registre. «Les grandes structures professionnelles connaissent bien l'exercice qui n'est pas nouveau pour elles; en revanche, pour les asbl, il s'agit d'une notion relativement complexe car elles n'étaient jusqu'ici pas confrontées à cette obligation», souligne Daniel Ruppert, conseiller de gouvernement au ministère de la Justice. «En ce qui concerne les asbl, celles-ci doivent impérativement se soumettre à cet exercice même si, dans la majeure partie des cas, aucun bénéficiaire effectif ne pourra être identifié. Les membres du conseil d'administration seront dès lors à inscrire au RBE», indique la circulaire. Mais pourquoi inclure les asbl à cette obligation de transparence? «La Commission européenne a estimé qu'elle ne pouvait pas les exclure du dispositif antiblanchiment sans risquer d'inciter les personnes ayant des intentions criminelles à se tourner vers les asbl pour leurs activités de blanchiment», explique Félix Braz. Et ajoute qu'au niveau international, «le Gafi ne s'intéresse pas seulement aux sociétés commerciales, mais aussi aux asbl qui ne sont pas neutres dans la lutte contre le blanchiment.»
Le ministre estime aussi que les asbl n'ont pas de raison de paniquer, notamment en ce qui concerne les démarches à effectuer. Un tutoriel vidéo a été mis en ligne pour détailler les formalités d'inscription à réaliser. Et, outre les informations disponibles sur le site internet du Luxembourg Business Registers (www.lbr.lu), un helpdesk téléphonique et un guichet d'assistance sont mis à disposition des usagers.
Plus de transparence
Comme le rappelle Félix Braz, le registre est le fruit de la transposition de la quatrième directive antiblanchiment qui a donné naissance à la loi du 13 janvier 2019. Le RBE apportera plus de transparence et renseignera sur le bénéficiaire effectif d'une entité. Il vise ainsi «toute personne physique qui, en dernier ressort, possède ou contrôle l'entité juridique, ou toute personne physique pour laquelle une transaction est exécutée ou une activité réalisée».
Pour une société, il s'agit notamment de «toute personne physique qui, en dernier ressort, possède ou contrôle la société, du fait qu'elle possède directement ou indirectement un pourcentage suffisant d'actions ou de droits de vote ou d'une participation au capital.» Si aucun bénéficiaire effectif n'a pu être identifié, «le bénéficiaire effectif est le dirigeant principal de l'entité immatriculée», rappelle le ministre de la Justice.
Contrairement aux autres pays européens, au Grand-duché, l'accès sera aussi public. Cependant, l'adresse et le numéro d'identification national du bénéficiaire économique ne seront pas visibles pour cette catégorie de personnes. Si les bénéficiaires économiques sont, par exemple, des mineurs ou des personnes en incapacité, la loi prévoit la possibilité «de demander une restriction d'accès» au registre.
Le registre des bénéficiaires effectifs n'est pas une révolution. «C'est un élément parmi beaucoup d'autres dans la difficile lutte contre le blanchiment d'argent», indique Félix Braz.
Sur les 129.000 entités concernées, seules 7.029 ont effectué les démarches jusqu'ici. Félix Braz