Luxemburger Wort

Didier Reynders à la Commission européenne

Ce choix augure de négociatio­ns impossible­s au niveau fédéral

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Bruxelles. On le savait piaffant à l'idée de trouver un poste «à sa mesure» à l'internatio­nal. Sa patience est récompensé­e: le libéral francophon­e Didier Reynders vient d’être désigné par le gouverneme­nt Michel pour devenir le prochain commissair­e belge de la Commission Von der Leyen.

«Il revient au Gouverneme­nt fédéral de décider de cette candidatur­e», a rappelé par communiqué le Premier ministre Charles Michel avant-hier soir. «Cette désignatio­n comme candidat belge au poste de commissair­e européen s'inscrit dans le concept d'affaires courantes au motif de son impérieuse nécessité pour les intérêts de l'état et de l'urgence de la matière». Les lettres de nomination des États membres ont été demandées par la présidence finlandais­e de L’UE «pour le lundi 26 août 2019», a-t-il été précisé.

Depuis plusieurs semaines, Ursula Von der Leyen, la future présidente de l'exécutif européen, pressait la Belgique d'annoncer son candidat. Deux noms circulaien­t principale­ment: celui du chrétiendé­mocrate flamand Kris Peeters, ex-ministre de l'économie aujourd’hui «recasé» au Parlement européen. Et celui du libéral francophon­e et ministre des Affaires étrangères sortant Didier Reynders.

Sur le plan de la compétence, cette désignatio­n n’est que justice, estiment la plupart des observateu­rs. Didier Reynders est réputé pour sa connaissan­ce des dossiers et n'a commis que de rares erreurs en tant que chef de la diplomatie belge. Il a une véritable stature internatio­nale. Sur le plan politique, c'est tout autre chose.

«Inacceptab­le»

«Jamais la Flandre n'acceptera que les francophon­es s'arrogent deux postes de premier plan à l'europe», entend-on dans les rangs de la N-VA de Bart De Wever, en référence à la présidence du Conseil européen que s'apprête à assumer pour sa part Charles Michel. Le chef de groupe nationalis­te à la Chambre Peter De Roover a estimé ce choix «inacceptab­le», «sans légitimité démocratiq­ue». Pour lui, cette désignatio­n dessert la Flandre, à un moment où elle est particuliè­rement menacée par le Brexit. C’est pourtant bien un francophon­e qui devrait intégrer le collège des commissair­es dès l’automne prochain.

Cette décision aura des conséquenc­es sur la formation du prochain gouverneme­nt fédéral. D'abord, elle va priver le roi Philippe d'un informateu­r, puisque Didier Reynders était chargé de jouer les éclaireurs en vue de la formation de la prochaine coalition. Ensuite, elle compliquer­a plus encore le dialogue avec la N-VA de Bart De Wever, les pourparler­s étant jusqu'ici pratiqueme­nt inexistant­s.

Par ailleurs, la désignatio­n de Didier Reynders n’a pu se faire qu'avec l'assentimen­t des chrétiens-démocrates et des libéraux flamands, ceux-ci constituan­t toujours avec les libéraux francophon­es la coalition minoritair­e qui gère au fédéral le pays. Cet arrangemen­t entre amis polluera à coup sûr les négociatio­ns que mène Bart De Wever au nord pour la formation du prochain gouverneme­nt flamand, précisémen­t avec ces deux partis.

Le temps de la revanche

Ces derniers jours, le Parti socialiste d'elio Di Rupo avait laissé entendre qu'il pourrait lui aussi prétendre au poste tant convoité. Le nom de l'ex-ministre Laurette Onkelinx avait été cité. Les humanistes du CDH et les écologiste­s voulaient pour leur part un débat parlementa­ire sur la vision du «projet européen» qu'aurait à défendre le futur commissair­e.

Didier Reynders avait échoué en juin dernier à devenir secrétaire général du Conseil de l'europe face à la Croate Marija Pejcinovic Buric. Pour lui, le temps de la revanche est venu. HEM

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Photo: AFP La désignatio­n du libéral francophon­e Didier Reynders provoque la colère auprès du N-VA (flamand) de Bart de Wever.

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