Un nouvel examen psychiatrique pour Dutroux
La justice belge désigne un collège d'experts pour évaluer la dangerosité et le repentir du «monstre de Marcinelle»
Le Tribunal d'application des peines devait se prononcer hier sur la désignation d'un collège de psychiatres chargés d'examiner à nouveau Marc Dutroux. Une mission double: déterminer l'état de dangerosité de l'«homme le plus haï de Belgique» ainsi que les conséquences de sa mise à l'isolement pendant 23 ans.
Verdict: Marc Dutroux sera bien entendu par des psychiatres pour déterminer s'il pourrait récidiver, mais aussi pour jauger l'impact de sa détention, comme le demandait son avocat, Me Bruno Dayez. Des réponses à ces questions dépendra – peut-être – sa libération conditionnelle. En fonction des résultats de cette expertise, les avocats de Marc Dutroux pourraient en effet introduire une telle demande. Me Bruno Dayez n'a jamais caché qu'il espérait voir son client libre à l'horizon 2021.
Un verrou légal
Le «monstre de Marcinelle» n'est toutefois pas près de sortir de prison. Dutroux est à l'ombre depuis son arrestation en 1996. En 2004, il a été condamné à perpétuité pour le viol et l'assassinat de Julie et Melissa, ainsi que d'an et Eefje. Il avait également enlevé deux autres jeunes filles, Sabine Dardenne et Laetitia Delhez, auxquelles il aurait probablement réservé le même sort s'il n'avait été arrêté avant de pouvoir passer à l'acte.
En Belgique, la perpétuité se traduit en réalité par trente années d'emprisonnement. Dès 2013, Marc Dutroux a pu avoir accès comme tout autre détenu à la procédure de libération conditionnelle, laquelle lui fut alors refusée une première fois.
La peine à laquelle fut condamné Marc Dutroux en 2004 est toutefois assortie d'une mise à disposition du gouvernement pendant dix ans. Depuis, une réforme de la justice a remis cette mesure entre les mains du Tribunal d'application des peines, une juridiction composée de cinq magistrats spécialisés dans la répression et la réinsertion sociale. L'unanimité y est requise. Elle le sera plus que jamais pour libérer ou non Marc Dutroux. Ce double garde-fou est la garantie qu'il passera sans doute encore de longues années en prison.
Les efforts déployés ces dernières semaines par les avocats de «l'ennemi n°1 des Belges» ont provoqué un vaste émoi dans le pays. A contrario, l'échec de la «marche noire» du 20 octobre dernier est dû au fait qu'elle avait été organisée par des partisans de la peine de mort, proches parfois de certains milieux d'extrême droite. 400 personnes seulement y avaient participé.
Comme pour rappeler chacun à la dignité, Carine et Gino Russo, les parents de la petite Melissa laissée pour morte par Marc Dutroux en 1996, ont publié une carte blanche en début de semaine dernière. Non pour contester la légalité de la procédure qui permet à Dutroux d'espérer la libération conditionnelle, mais bien pour dénoncer la stratégie mensongère du psychopathe et de son avocat. Leur texte relève l'absence d'amendement de Dutroux qui a toujours minimisé son rôle dans la mort de Julie et Mélissa.
Coïncidence: au même moment décédait Michel Nihoul. Ce Bruxellois connu pour ses escroqueries et ses parties fines avait été à l'époque de l'affaire Dutroux considéré comme le chef du réseau que le pédophile était censé alimenter en enfants. Toutefois, cette thèse n'aura jamais été prouvée.
L'erreur de Michel Nihoul avait été de croiser Marc Dutroux à un mauvais moment, par l'intermédiaire de son complice Michel Lelièvre. En 2004, Nihoul avait été acquitté de peu de tous les faits liés aux enlèvements d'enfants, mais avait écopé de cinq ans de prison pour trafic de drogue et association de malfaiteurs.
En Belgique, la perpétuité se traduit en réalité par trente années d'emprisonnement.