Une poigne de fer face aux djihadistes belges
La Justice rejoint les Affaires étrangères dans le dossier des enfants de djihadistes – Le temps des cadeaux est révolu
La Belgique est bien décidée à ne faire aucun cadeau à «ses» djihadistes. Sa politique étrangère exclut le rapatriement des Belges qui ont combattu dans les rangs de l’etat islamique ou d’autres groupes islamistes actifs en Syrie et en Irak. Ce n’est qu’à contrecoeur qu’elle a accepté récemment de prendre en compte le sort de leurs enfants.
Une décision de justice vient d’être prise qui rendra encore un peu plus difficile l’existence des Belges aujourd’hui emprisonnés dans les camps syriens, sous autorité kurde. Alors que l’etat avait été précédemment condamné à verser une astreinte de 5.000 euros par jour s’il ne rapatriait pas dans les trois mois des enfants maintenus en captivité, une autre juridiction vient au contraire d’estimer que les djihadistes «instrumentalisent leurs enfants pour améliorer leur propre situation par des tentatives de chantage» à l’encontre de la Belgique. Le juge des saisies du tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles a repoussé en conséquence dans le temps l’exigibilité des astreintes.
Dans les faits, le juge laisse à l’etat belge le temps d’obtenir la signature des mères des enfants afin qu’elles autorisent leur départ des camps. Il n’est en effet pas question, a répété à la mi-février à New York le ministre des Affaires étrangères Philippe Goffin, d’accepter qu’elles échappent à leurs geôliers au motif que les enfants ont besoin d’elles. Une fois la signature actée, la Belgique aura trois mois pour effectuer le rapatriement de ces derniers.
La partie est loin d’être gagnée. Un agent consulaire a pris contact avec les autorités kurdes, mais celles-ci ne sont pas disposées à transiger. Elles estiment de surcroît que les enfants ne peuvent être séparés de leurs mères.
La question du rapatriement
«La balle est donc désormais dans le camp des mères des enfants», conclut le quotidien Le Soir. «Soit elles acceptent leur rapatriement sous le motif de sécurité et sanitaire, soit elles refusent et l’etat belge ne pourra être tenu pour responsable du destin tragique de ces enfants.»
En début de semaine, par ailleurs, la justice belge a frappé fort dans un autre dossier lié au djihadisme. Un tribunal a condamné par défaut deux femmes originaires de Borgerhout (Anvers) et de Bruxelles. Une peine de cinq ans de prison a été prononcée contre Saïda El Mimouni et Siham Oussaïdi.
Elles avaient quitté la Belgique pour la Syrie où elles avaient rejoint les rangs islamistes. Elles écopent en outre de 8.000 euros d’amende. Là ne s’arrête toutefois pas la sanction: les deux femmes absentes lors du procès ont été privées de leur nationalité.
Depuis 2015, la loi prévoit que la nationalité d’une personne née en Belgique peut être retirée si elle a été condamnée à au moins cinq ans de prison dans le cadre de faits de terrorisme. Ce dossier évolue. Le 18 février dernier ainsi, la commission de l’intérieur de la Chambre a rejeté une proposition de loi déposée par la N-VA en vue d’accroître les possibilités de déchéance. Les nationalistes flamands souhaiteraient qu’elle ait un caractère d’automaticité, ce que critique le Conseil d’etat.
Précision: cette loi ne s’applique qu’aux personnes qui ont la double nationalité – il est interdit en raison des conventions internationales de rendre apatride une personne. Elle ne s’impose donc essentiellement qu’à ces Belges nés de parents étrangers qui ont pris à partir de 2012 le chemin du djihad, les belgo-marocains composant l’essentiel de leurs rangs.