Angoisse sur les marchés
Face à la chute des actions, les investisseurs se ruent sur les obligations américaines
Vent de panique sur les bourses. En dix séances, le Dow Jones a effacé cinq mois de hausse, juste après avoir atteint un record historique. La plus rapide et pire chute de l’histoire qui a débuté d’un niveau record. Sur le marché des taux, l’histoire est la même, mais dans l’autre sens. Face à la chute des actions, les investisseurs se sont rués sur les obligations américaines, jugées «refuge» dans la tempête boursière, faisant dégringoler les rendements à des plus bas historiques, à 1,28 % de rendement pour la référence à 30 ans.
A l’origine, la crainte des répercussions économiques de la propagation du coronavirus est interprétée comme un cygne noir. Cette métaphore est utilisée pour souligner l’aspect unique et non prévisible d’un événement par les marchés. Face à cette panique, «il faut rester serein», ont expliqué les experts de Capital Group, un des trois plus grands groupes de gestion de fonds au monde, dans un exposé organisé au Cercle Cité, Place d’armes à Luxembourg. «L’acte d’investir doit s’inscrire dans une perspectives de long terme, c’est-à-dire pas à deux mois mais plutôt 24 mois, tout en privilégiant les données macro», explique Julie Dickson, directrice des investissements chez Capital Group. Même si nul ne peut prédire l’évolution que prendra le coronavirus les prochains jours. Avant la croissance a affiché une résilience, alors que l’impact négatif du virus sur l’économie sera temporaire. Et le marché de l’emploi reste robuste, ajoute l’experte.
Certes, le marché fait face à un phénomène unique: le choc de
Avis de sociétés l’offre se superpose au choc de la demande. Les chaînes de production en Chine perturbent les chaînes d’approvisionnement dans le monde entier. Et le consommateur est passé en mode prudence et est devenu plus frileux. «Notre scénario central reste une reprise en V. C’est-à-dire, après un ralentissement économique provoqué par le coronavirus, une fois le point d’inflexion de l’épidémie atteint ou l’annonce de la mise au point d’un vaccin, la confiance reviendra très vite et la croissance repartira dans un régime de rattrapage. A l’image d’un ballon qui rebondit après une chute.» Jeremy Cunningham, directeur des investissements chez Capital Group appuie ce scénario par une statistique: «L’ISM, un indicateur précurseur de l’activité manufacturière, a été supérieur de 8 % en moyenne, six mois après les phénomènes d’épidémie (au nombre de neuf) connus dans le passé. «Nous levons le pied de l’accélérateur, mais nous ne freinons pas. Nous sommes des investisseurs à long terme», insiste Julie Dickson.
Dans les taux fixes, Jérémy Cunningham tend à éviter les obligations traditionnelles mais privilégie les obligations indexées sur l’inflation. «Le marché sousestime l’inflation future», justifie l’expert.
Un autre moment d’incertitude pour l’investisseur sont les élections présidentielles américaines, début novembre. Cependant, ici aussi, les experts de Capital Group sont formels: réduire son exposition après les «primaires» pour éviter la volatilité des marchés avec l’inconnue de l’issue des élections est une mauvaise idée et endommage la performance à long terme. Selon les statistiques, un investisseur qui reste totalement investi après les primaires et durant douze mois réalise une performance de 10,2 % contre 5,8 % dans une période analogue d’une année sans élection. Et quelque soit le parti du président, démocrate ou républicain. Seules deux années d’élection ont été négatives: 2000 et 2008. Mais ces performances étaient davantage la résultante de l’éclatement de bulles de certains actifs. Autre observation, les flux vers les fonds monétaires, les plus sûrs, sont trois fois supérieurs dans une année électorale. Une fois les élections terminées, les flux reviennent majoritairement vers les fonds actions. Une dernière statistique publiée aux Etats-unis: les indices dans les 26 corrections connues depuis la Seconde Guerre mondiale ont chuté en moyenne de 13 % et quatre mois ont été nécessaires au marché pour revenir au niveau d’avant correction.
Nous levons le pied de l’accélérateur, mais nous ne freinons pas. Nous sommes des investisseurs à long terme.
Julie Dickson, Capital Group