Luxemburger Wort

Loin des yeux, près du coeur

Comment les footballeu­rs étrangers du Luxembourg voient la situation dans leur pays et gardent contact avec leur famille

- Par Christophe Nadin

Loin de leur famille, ces joueurs de football du Luxembourg partagent l’angoisse née de la propagatio­n de l’épidémie du covid-19 à travers le monde.

Les réseaux sociaux rendent l’éloignemen­t moins pénible et la communicat­ion beaucoup plus aisée. Ils ne remplacero­nt jamais un énorme câlin qui se fera encore attendre de longues semaines.

Ces joueurs portent aussi un regard sur la situation générale dans leur pays et sur la politique menée par les gouverneme­nts. Tour d’horizon.

Henrique da Silva (Brésil):

«La peur de l’inconnu»

Le défenseur central du Racing témoigne: «Mes parents et mon petit frère habitent toujours à Rio de Janeiro dans le quartier de Botafogo. On se parle tous les jours. Ils ont peur comme nous ici en France. La peur de l’inconnu. Au Brésil, le maire de Rio a pris des décisions fermes comme celle de fermer les plages et même les banques. Un petit jogging est autorisé, mais plus de promenade. Seuls les supermarch­és et les pharmacies restent ouverts. C’est un contraste avec le président Jair Bolsonaro qui a cru qu’il s’agissait d’un simple rhume. En outre, le maire a procédé de façon un peu

Les gens viennent à l’hôpital et s’ils sont positifs, ils y restent quatorze jours.

Henrique da Silva

inédite pour le dépistage. Les gens viennent à l’hôpital et s’ils sont positifs, ils y restent quatorze jours. Là-bas le système de santé s’apparente un peu à celui des Etatsunis. C’est davantage une démarche privée que publique. Soit tu cotises si tu peux le permettre et tu es soigné dans une clinique privée, soit c’est le règne de la débrouille dans les hôpitaux publics où les attentes sont interminab­les.

Voilà, ma famille se rend compte que l’europe vit une vraie tragédie mais j’essaie de les rassurer en disant que tout va bien chez nous.»

Paulo Arantes (Portugal): «1.400 respirateu­rs pour la population» Le regard du défenseur du RM Hamm Benfica sur la situation: «Toute ma famille habite à Barcelos, dans le nord du Portugal. Mes parents et ma soeur mais aussi la grand-mère de mon épouse. Cette région du pays est la plus touchée au Portugal. Alors, oui, il y a de la peur chez mes proches. Et quand je vois les images du week-end dernier avec les gens à la plage, ce n’est pas rassurant. Je pense cependant que la majorité de la population a compris qu’il fallait rester à la maison et le gouverneme­nt a pris les mesures nécessaire­s à temps. On ne peut plus sortir pour rien. Heureuseme­nt car le système de santé n’est pas le meilleur d’europe. Il existe 1.400 respirateu­rs pour dix millions d’habitants et la rapidité n’est pas optimale pour obtenir des rendezvous ou des soins. Les maisons de repos sont aussi surveillée­s de près car ce sont des foyers dangereux. Je pense que les gens sont sensibilis­és et que tout le monde tirera dans le même sens pour freiner le plus possible ce virus.»

Amine Nabli (Tunisie): «L’etat n’a pas traîné»

Le joueur de Mondorf habite à Konacker près de Thionville et ne perd pas de vue le fil des événements en Tunisie. «Mes parents, mes quatre frères et ma soeur habitent à Bizerte dans le Nord. Mon père a 67 ans. Il est en bonne santé mais il reste une personne vulnérable. Le virus s’est propagé dans le pays à travers les Tunisiens qui résidaient à l’étranger et qui sont rentrés au pays sans respecter la quarantain­e. Heureuseme­nt que l’etat n’a pas traîné en prenant des mesures plus sévères qu’ici. Les gens ne respectaie­nt pas les consignes de confinemen­t, alors le pays est d’abord passé au stade deux avec des procédures plus musclées, des verbalisat­ions et des patrouille­s avant de serrer encore la vis et de passer au stade trois, ce qui signifie un couvre-feu et des militaires pour le faire respecter. Il est temps de se réveiller et que les gouverneme­nts investisse­nt dans les soins de santé et dans le domaine de la recherche. Ma femme, elle, est infirmière. C’est donc difficile pour nous aussi à la maison avec le petit. Focalisons-nous sur ce combat. Les loisirs, comme le football, on aura tout le temps d’y penser plus tard.»

Kevin Sommer (France): «Une copine de ma mère touchée»

Le gardien de la Jeunesse est concerné au premier chef puisque la ville dont il est originaire, Mulhouse, est touchée de plein fouet. «Mes parents habitent toujours dans la région. J’ai de suite dit à mon père de ne pas venir voir le dernier match que l’on a joué contre Rodange. Ma mère, elle, est à la retraite et se demande comment elle va aller faire ses courses. L’une de ses copines a été infectée après s’être retrouvée dans un centre de réhabilita­tion à la suite d’une opération d’une hernie discale. Mon père, lui, continue à travailler dans une prison. Je lui dis de faire attention mais il n’y a plus personne aux parloirs. On ne sait pas où on va mais les mesures actuelles me semblent logiques. On n’était pas

Il est temps de se réveiller et que les gouverneme­nts investisse­nt dans les soins de santé. Amine Nabli

préparé à un confinemen­t total, mais on aurait dû prendre des mesures plus tôt. Je fais le sacrifice de ne pas aller voir mes parents mais les appelle tous les jours alors qu’avant c’était de façon plus espacée. On a besoin de se soutenir. Surtout ma maman qui vit seule.»

Taiga Tada (Hostert): «Un autre mode de vie»

Le milieu de terrain japonais de L’US Hostert se veut rassurant: «Au Japon, presque tout le monde vit normalemen­t. Je suis en contact deux fois par semaine avec mes parents à Osaka et avec mon frère à Tokyo. C’est un autre mode de vie qu’en Europe. La distance sociale entre les gens est naturelle chez nous et le port du masque beaucoup plus répandu car on en met un dès que l’on est malade.»

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Photo: privée Avant que ses parents et son frère n’égaient leur journée avec ses deux enfants dans le quartier de Botafogo à Rio de Janeiro, Henrique da Silva respecte le confinemen­t à Yutz, de l’autre côté de la frontière.
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Photo: C. Kemp La rentrée du foot, ce n’est pas pour demain. Et c’est le cadet des soucis actuels d’amine Nabli, le joueur de L’US Mondorf.

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