Les prisons belges se vident
Pour freiner la propagation du Covid-19, les autorités ont multiplié les libérations conditionnelles et retardé les mises sous écrou
Les prisons belges sont affublées d’une sale réputation. Bâtiments parfois vétustes, conditions d’hygiène déplorables, grèves des matons à répétition et surtout une surpopulation carcérale constante.
En janvier 2019, un tribunal avait ainsi déclaré l’etat belge responsable de la surpopulation carcérale existant à la prison de Saintgilles et ayant existé à la prison de Forest. Il avait été condamné à y ramener le nombre de détenus à la capacité maximale autorisée, sous peine d’astreinte. Ce n’est qu’un exemple des admonestations et condamnations infligées à la Belgique ces dernières années.
Mais ici comme ailleurs, le confinement destiné à stopper la propagation du coronavirus a des conséquences inattendues. Pour permettre l’application des règles de distanciation sociale là où la promiscuité est souvent inévitable, les autorités belges ont choisi de vider partiellement les prisons. Elles n’ont évidemment pas relâché n’importe qui: les condamnés pour faits de moeurs, de terrorisme ou ayant cumulé au moins 10 ans de détention restent derrière les barreaux. Pour les autres, c’est du cas par cas.
Les nouveaux congés pénitentiaires
sont suspendus
Début mars, 10.825 détenus, dont 490 femmes, étaient en cellule – soit un Belge sur 1.000. Deux mois plus tard, on en dénombre 9.634 (-11 %.) «On se rapproche ainsi de la capacité réelle des prisons, même s’il reste un excès de 384 prisonniers et de grandes disparités», juge «Le Soir».
Cette statistique va de pair avec une série de mesures visant à limiter la propagation du virus: les permissions de sortie et les nouveaux congés pénitentiaires ont été suspendus (pas question de laisser courir en rue d’éventuels cas infectés). En revanche, une interruption de peine a été momentanément accordée aux détenus ayant satisfait à un congé pénitentiaire sans anicroche; moins de mandats d’arrêt ont été délivrés et des ordonnances de capture ont été postposées. Les magistrats ont également multiplié les libérations conditionnelles ou sous bracelet électronique – ces derniers étant régulièrement pointés pour leur nombre insuffisant.
Les différents comptages montrent que Bruxelles a davantage relâché ses prisonniers – la capitale a le triste privilège de compter sur son territoire les prisons archaïques de Saint-gilles et de Forest.suivent la Wallonie, puis la Flandre.
La finalité des structures pénitentiaires a joué elle aussi un rôle: on a davantage libéré dans les maisons de peine, où sont incarcérés les détenus déjà condamnés, que dans les maisons d’arrêt qui ont bénéficié directement des suspensions décidées. Au bout du compte, la situation sanitaire serait sous contrôle: une quinzaine de prisonniers seulement seraient infectés, pour aucun décès enregistré. La crainte existe toutefois que certains taisent leur maladie pour conserver un droit de libération conditionnelle.
L’observatoire international des prisons voit d’un bon oeil ce désengorgement, mais il craint qu’une fois l’épidémie passée les prisons se remplissent à nouveau en réintégrant leurs pensionnaires rendus momentanément à la liberté ou en attente de purger leur peine. Quant aux magistrats, ils voudraient accélérer le rythme des procès une fois la pandémie terminée. Les avocats, dont beaucoup sont sans travail, aimeraient réduire la durée des vacances judiciaires. HEM
La capitale a le triste privilège de compter sur son territoire des prisons archaïques.