Le facteur humain
LPar Gaston Carré
e «e-learning», tel le «télétravail», ne peut être condamné ni comme principe ni comme pratique: conçu comme alternative à un enseignement «présentiel» proscrit par le confinement, le recours au numérique aura été d'une indéniable légitimité et semble fournir quelques preuves de son efficacité, quand bien même son évaluation est loin d'être achevée. L'heure toutefois est au déconfinement, et il faut en saisir l'occasion pour applaudir une dernière fois, tous ensemble, les prouesses technologiques qui ont rendu possible ces «miracles» puis revenir, à tête reposée, à une approche raisonnée du travail et de la formation. Celle-ci repose, depuis Socrate au moins, sur cet autre miracle qu'est le rapport qui s'instaure entre un «maître» et ses «élèves», prolongé puis exhaussé par les échanges entre les élèves entre eux. Or ce «rapport», loin d'être «virtuel», relève d'interactions bien réelles entre le pédagogue et ses élèves – dans une présence hors laquelle l'apprentissage est privé de ses ressorts les plus essentiels: le mimétisme, la projection, l'identification, la reconnaissance mutuelle, cet ensemble d'impondérables que l'on appelle le «facteur humain». C'est ce besoin d'interaction physique, de «présence», qui face au travail aussi rend si vaines les spéculations de tous ceux qui voudraient croire que le «homeoffice» peut se substituer, tel quel, au travail presté en communauté. La crise sanitaire certes a montré que l'on peut travailler et apprendre autrement, il faut en retenir les enseignements, mais avec discernement, et en pleine lucidité quant aux arrières-pensées que masque la pieuse apologie de la dématérialisation.