N'oublions pas l'histoire
A propos de ceux qui s’attaquent à des statues
Un peuple qui oublie son histoire n’a pas d’avenir.
Sir Winston Churchill
Le 15 de ce mois, Stéphane Bern présentait dans son émission «Secrets d’histoire» successivement les portraits de Charles de Gaulle et de Winston Churchill, ces deux géants de l’histoire du XXE siècle. Deux jours plus tard, le «Luxemburger Wort» titrait une page entière: «Der Bildersturz geht weiter» en faisant référence à l’éditorial de ce même jour qui traitait lui aussi ce sujet.
En effet, les statues de ces deux politiciens d’exception venaient d’être salies par des paroles infâmantes de «raciste». Ces attaques absurdes ne furent ni ne sont point les seules, et font suite à d’autres. L’origine, on le sait, est la mort violente d’un malheureux Noir, littéralement assassiné par un policier aux Etats-unis.
Si je puis parfaitement comprendre les manifestations (pacifiques!) qui réclament justice pour la victime, ainsi qu’une refonte générale de l’organisation de la police aux Etats-unis qui en a grandement besoin, je ne peux me rallier aux braillards qui veulent abolir tout simplement toute organisation policière, non seulement outre-atlantique, mais également en France et ailleurs. Par contre, je tire mon chapeau à tous les policiers qui sont chaque jour sur la brèche face à une populace de plus en plus agressive.
D’autre part, je condamne de la façon la plus absolue ceux qui s’attaquent à des statues. Même si certaines ont été érigées en souvenir et à la gloire de personnages qu’on considère aujourd’hui comme peu recommandables, elles sont et restent un témoignage historique valable.
Si on les a dressées, c’est qu’à un certain moment de l’histoire, on les considérait dignes d’un tel honneur. En les renversant, on ne s’attaque pas seulement à ceux qu’elles représentent, mais aussi à ceux qui les ont dressées, et à travers eux, à l’histoire d’un pays.
Devrions-nous déboulonner la statue de Guillaume II au Knuedler parce que son prédécesseur et son successeur ont traité les Luxembourgeois comme des moins que rien, oui, comme des serfs médiévaux, des esclaves qu’on pouvait vendre à Napoléon III à vil prix? La même question se pose quant à l’appréciation de l’attitude de certains compatriotes durant la Seconde guerre mondiale. Condamner ou glorifier a posteriori est chose bien délicate.
Or, vouloir nier l’histoire, la considérer uniquement sous l’angle du présent, est signe de bêtise criante et d’inculture parfaite. Malheureusement ces gens se retrouvent en bonne compagnie. Les iconoclastes de l’empire byzantin, les «Bilderstürmer» de la Réforme en Allemagne, les révolutionnaires de 1789 en France, Lénine et les bolcheviques de 1917, Mao et sa trop fameuse «Révolution culturelle», en sont parmi d’autres la triste référence historique.
On aurait pu espérer que le XXIE siècle serait un petit peu plus raisonnable, sinon plus cultivé. Il n’en est rien, et nos professeurs d’histoire (j’attends d’ailleurs toujours une réaction officielle de mes collègues), y compris moi-même semblons avoir fait bien mal notre devoir. Il est vrai que l’histoire ne compte point parmi les branches les plus considérées, ni par nos dirigeants, ni par les parents, ni par nos élèves, et la parole de Churchill risque fort de se réaliser face à une génération qui a adopté ellemême la devise de: «No future!» Raymond Schaack,
Luxembourg