Luxemburger Wort

La compagne d’un terroriste

Après les attentats de Bruxelles, la petite amie d’Ali El Haddad Asufi a continué à travailler chez Swissport – sans jamais être inquiétée

- Par Max Helleff (Bruxelles)

Le quotidien Le Soir et l’hebdomadai­re Knack dévoilent une affaire pour le moins intrigante dans leurs éditions. Ils écrivent que la compagne du terroriste présumé Ali El Haddad Asufi «a pu travailler au sein des services de Swissport, à l’aéroport de Bruxelles-National, jusqu’à très récemment. Avec un avis de sécurité positif». L’informatio­n est confirmée par le président du Comité R, Serge Lipszyc. En Belgique, le Comité R est chargé du contrôle des services de renseignem­ents. Asufi n’est pas n’importe qui. Remis par la Belgique à la France en 2019, il est soupçonné d’être un logisticie­n des attentats de Paris et de Bruxelles. Il aurait notamment acheté des armes aux Pays-Bas avec l’un des El Bakraoui – du nom des deux frères qui se sont fait exploser le 22 mars 2016 lors des attentats de Bruxelles. Il est renvoyé devant la cour d'assises de Paris et est inculpé en Belgique dans le dossier bruxellois.

«Depuis les attentats, sa compagne n’a jamais cessé de travailler à Zaventem. Lors de l’incarcérat­ion de son petit ami en Belgique, elle lui rendait visite en prison. Mais ce n’est qu’au printemps 2020, au moment de demander le renouvelle­ment pour cinq ans de son avis de sécurité, que les informatio­ns sont parvenues à l’Autorité nationale de sécurité (ANS, l’instance chargée d’accorder les avis et habilitati­ons de sécurité)», expliquent Le Soir et Knack.

Base idéale pour placer une bombe Récemment déclarée en faillite, la société Swissport, qui fournissai­t des services de manutentio­n au sol à Brussels Airport, aurait pu constituer une base idéale pour placer une bombe dans un avion. Rien de tout cela n’est toutefois reproché à la compagne d’Ali El Haddad Asufi. Serge Lipszyc explique qu’elle est persuadée que son petit ami est innocent. Elle est «dans le déni», analyse le président du Comité R. «L’intéressée a déclaré à l’Organe d’appel que son petit ami prétendait être innocent et qu’elle le croyait. Cependant, différents magistrats arrivent tous à la même lecture du dossier. Nous avons senti qu’elle vivait dans le déni. Nous n’avons donc pas renouvelé son avis de sécurité. Nous ne remettons pas en question son intégrité, mais jugeons qu’elle peut être influencée. Et dans les aéroports, les centrales nucléaires et ailleurs, nous devons simplement éviter les risques», pondère Serge Lipszyc.

Le ministre en charge du dossier, le libéral francophon­e Philippe Goffin – «sidéré» par l’informatio­n – «a immédiatem­ent mis en place un groupe de travail au sein de l’ANS». L’interview du patron du Comité R confirme par ailleurs que l’activité des services de renseignem­ent étrangers sur le territoire belge va bon train. « C’est une vraie préoccupat­ion. Ils sont de plus en plus présents, avec de plus en plus de moyens et tentent de fragiliser les structures de l’Etat. Nous sommes une terre d’accueil», affirme Serge Lipszyc. «Terre d’accueil» notamment des communauté­s turque, marocaine, congolaise ou encore rwandaise (et d’autres, évoquées, mais non citées) mises sous influence ou sous surveillan­ce par les services secrets de leurs pays d’origine respectifs.

«On a entendu des rumeurs selon lesquelles les services russes ont été très actifs au début de la crise sanitaire», rappellent pour leur part Le Soir et Knack. Centrales nucléaires, structures atlantique­s, institutio­ns européenne­s, multinatio­nales…: Bruxelles et la Belgique passent de longue date pour un nid d’espions.

Ce n’est qu’au printemps 2020 que les informatio­ns sont parvenues à l’Autorité nationale de sécurité.

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