Luxemburger Wort

La Belgique s’impose une difficile catharsis

La crise sanitaire est mise sous la loupe dans un climat tendu, alimenté par une nouvelle hausse des contaminat­ions

- Par Max Helleff (Bruxelles)

Idéalement, le travail des commission­s parlementa­ires chargées de se pencher sur la crise sanitaire et de tracer les axes du futur aurait gagné à se dérouler dans un climat apaisé. C’est tout au contraire le regain des contaminat­ions qui inquiète les Belges.

Quelque 550 nouvelles contaminat­ions au coronaviru­s ont été enregistré­es ce jeudi 10 août, un chiffre en augmentati­on de 15 % par rapport à la période de sept jours qui précède. Les hospitalis­ations sont en nette hausse (+45 %).

Il y a surtout cette donnée terrible: 9.917 morts depuis le début de la pandémie, un nombre qui affleure le seuil symbolique des 10.000 disparus. Il englobe cinq nouveaux décès enregistré­s mercredi. Ici aussi, une nouvelle hausse est notée. Ces statistiqu­es alimentent la pression médiatique. «La commission covid n’avance pas: on noie le poisson», écrit ainsi «La Dernière Heure», épinglant au passage le grand brainstorm­ing parlementa­ire wallon qui doit accoucher d’une série de recommanda­tions destinées à mieux gérer les crises sanitaires futures.

La santé, les transports publics, l’économie… sont au menu de cette commission. Le libéral Willy Borsus, qui était ministre-président wallon lors de la précédente législatur­e, y a aligné les mesures de soutien économique décrétées par la Région durant la crise. Sans convaincre l’opposition. Le communiste Germain Mugemangan­go préfère évoquer le sort des travailleu­rs indépendan­ts «de plus en plus nombreux à devoir se tourner vers les CPAS» – l’assistance publique.

L’examen de conscience que s’impose la Belgique officielle passe par une autre commission parlementa­ire qui vient elle aussi de commencer ses travaux, cette fois au niveau fédéral. Mais également – et de manière plus singulière – par celui de ses experts scientifiq­ues. Au cours des six derniers mois, la cacophonie a souvent régné dans leurs rangs. Un expert se disait pour le port du masque obligatoir­e, l’autre contre. L’un jugeait que les mesures de distanciat­ion sociale n’étaient pas suffisamme­nt sévères, l’autre plaidait pour davantage de tolérance au motif que la coercition ferait plus de mal à la population que le virus lui-même.

Il y a eu de grosses fâcheries, comme celle de l’infectiolo­gue Erika Vlieghe, qui a présidé le groupe chargé de la stratégie de sortie du confinemen­t (GEES) avant de claquer la porte au motif que les politiques n’étaient pas à l’écoute des scientifiq­ues. Des cartes blanches incendiair­es ont été publiées dans les médias, révélant nombre de fractures entre les scientifiq­ues. Sans oublier des révélation­s, telle la montée en puissance du virologue Marc Van Ranst (KUL), un homme qui ferait presque la pluie et le beau temps sanitaires, selon ses détracteur­s.

Les tensions entre experts ont été vives au point qu’une réunion de réconcilia­tion a été organisée mercredi. La presse n’y était invitée, les organisate­urs voulant éviter une couche de pression médiatique supplément­aire. Selon l’épidémiolo­giste Marius Gilbert (ULB), «l’idée était de confronter les points de vue. On voulait vraiment sortir de la logique biomédical­e qui peut parfois nous amener à prendre des mesures pas tout à fait en phase avec la société. Or, il faut un groupe ouvert et assez large pour voir comment on peut apprendre à vivre avec le virus à long terme.» «L’ambition affichée par les organisate­urs, écrit ,Le Soir‘, est de pérenniser le concept et de rassembler les participan­ts dans ce qu’ils définissen­t comme une ,nouvelle société scientifiq­ue‘». Un autre aspect de ce «monde d’après» jusqu’à présent très virtuel…

La commission covid n’avance pas: on noie le poisson.

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