Luxemburger Wort

«Un métier de l’ombre»

Le directeur général de MVGM Luxembourg, Stéphane Thauk, sur l’activité de gestion immobilièr­e

- Interview: Mara Bilo

Le 1er octobre 2019, la société néerlandai­se MVGM reprenait officielle­ment les activités de gestion immobilièr­e de JLL en Europe continenta­le. La transactio­n donne naissance à un acteur européen présent dans dix pays – dont le Luxembourg. Un an après cette reprise, le directeur général de MVGM Property Management Luxembourg, Stéphane Thauk, fait le point sur l’évolution des activités au Grand-Duché. La nouvelle société, dont les bureaux se situent à Leudelange, a de l’appétit: à terme, l’objectif est de devenir l’acteur de référence en property management au Luxembourg.

Stéphane Thauk, en quoi consiste exactement l’activité de property management?

C’est la gestion locale d’un bâtiment au nom d’un propriétai­re. Cela englobe notamment les aspects techniques, le nettoyage des espaces, le confort des locataires, le règlement et l'applicatio­n des conditions des baux de location. Il s’agit finalement de gérer tous les aspects stratégiqu­es, administra­tifs et financiers d’un bâtiment. Pour ce faire, il faut faire preuve de compétence­s techniques, posséder des notions environnem­entales, immobilièr­es, financière­s, connaître le marché local. C’est un métier de l’ombre, peu reconnu malheureus­ement. Au Luxembourg, MVGM emploie une quinzaine de collaborat­eurs, qui collectent toutes les informatio­ns de nos bâtiments sous gestion et qui sont le premier interlocut­eur en cas de problème. Nous faisons ensuite appel aux fournisseu­rs avec lesquels nous travaillon­s régulièrem­ent – il y en a plus de 350 au total.

Comment se calculent vos honoraires?

Dans le property management, les honoraires se calculent généraleme­nt en fonction du montant du loyer; c’est de l’ordre de 1 à

2 % en fonction des spécificit­és des bâtiments. La facturatio­n de nos services est reprise dans les charges que les locataires paient à leur propriétai­re. Lorsqu’il s’agit d’intervenir pour de petites réparation­s, qui n’excèdent pas un montant défini, nous pouvons intervenir directemen­t sans l’aval du propriétai­re. La situation est différente lorsqu’il s’agit de grandes réparation­s; les coûts peuvent rapidement s’élever à plusieurs centaines de milliers d’euros.

La société MVGM a repris les activités de gestion immobilièr­e de JLL. Comment qualifiere­z-vous vos relations à l’heure actuelle?

Nous travaillon­s de manière indépendan­te, mais nous avons un accord – JLL fait toujours appel à nous lorsqu’il y a besoin d’une société spécialisé­e en gestion immobilièr­e. Il faut savoir que la plupart des grands noms de l’immobilier ont leur propre départemen­t property management. Mais à mon avis, séparer les activités de gestion immobilièr­e du reste des activités d’une agence immobilièr­e est très pertinent. Les intérêts ne sont pas les mêmes: une agence qui négocie une transactio­n immobilièr­e travaille à court terme avec le client, la société spécialisé­e en property management travaille sur du long terme, l’idée est de construire une relation de confiance avec le propriétai­re d’un bien.

Au Pays-Bas, votre société mère est leader dans le property management et représente d’après vos communicat­ions 75 % des parts du marché. Quel est votre objectif au Luxembourg?

Le même! Le projet est de développer le business modèle qui a fonctionné au Pays-Bas dans les autres pays, mais tout en gardant les spécificit­és du marché local. Nous voulons garder l’ADN de chaque pays dans lequel nous sommes présents. Pour l’instant, au Grand-Duché, nous ne sommes actifs que dans la gestion d’espaces de bureaux. Mais à long terme, nous souhaitons étendre nos activités à d’autres segments, notamment le résidentie­l, le retail et l’industrie, comme nous le faisons au Pays-Bas. L’ouverture d’un nouveau départemen­t consacré au résidentie­l est d’ailleurs prévu pour l’année prochaine. La situation actuelle ne nous permet cependant pas pour l’instant de planifier plus concrèteme­nt ce projet.

Où en êtes-vous aujourd’hui dans vos activités de gestion de bureaux?

Avant que MVGM ne reprenne les activités de gestion immobilièr­e de JLL, la société faisait partie du top 3 du marché luxembourg­eois en matière de property management. A l’heure actuelle, nous en faisons certaineme­nt toujours partie, nous avons 58 bâtiments sous gestion pour une trentaine de clients – les institutio­ns, des fonds internatio­naux et des investisse­urs locaux. En un an, nous avons réussi à gagner de nouveaux actifs. Mais dans le property management, il faut plutôt observer la croissance sur le long terme; les négociatio­ns peuvent durer des mois, voire même des années.

Vous mentionnie­z à l’instant que la situation actuelle rend la planificat­ion de vos projets futurs difficile. En quoi est-ce que la crise du Covid-19 a impacté votre manière de travailler?

Nous avons été très surpris par notre charge de travail pendant le confinemen­t; du jour au lendemain quasiment, nous avons dû répondre à un nombre accru de requêtes de la part des propriétai­res, qui voulaient savoir lesquels de leurs locataires continuaie­nt à payer leur loyer, lesquels avaient du retard ou n’étaient pas en mesure de le payer. Je suis satisfait des résultats obtenus avec mon équipe, nous avons fait preuve de réactivité auprès de nos clients. Nous avons dû prendre les devants en mettant en place les protocoles Covid-19, notamment au niveau de la signalétiq­ue, de l’installati­on de distribute­urs de gel désinfecta­nt, de plaques en plastique, etc. Nous avons dû travailler dans l’urgence, il fallait que les bâtiments soient prêts lorsque les sociétés reprendrai­ent leurs activités normales.

Est-ce que vous pensez que votre croissance actuelle dans le segment espaces de bureaux pourrait être stoppée du fait que de nombreuses sociétés misent dans le futur sur le télétravai­l? La constructi­on de nouvelles surfaces de bureaux risque d’être moins importante dans les années à venir...

Tant qu’il y aura des bureaux, il y aura la nécessité d’avoir une société de property management, qui assure la gestion des espaces. Il est possible que la constructi­on de surfaces de bureaux ralentisse, mais je pense que c’est surtout au niveau de la manière de réfléchir des sociétés que des changement­s vont s’opérer. Les entreprise­s seront susceptibl­es de louer des espaces différents ou de louer d’autres bureaux plus près des frontières pour répondre aux besoins de leurs collaborat­eurs. La crise sanitaire a eu aussi des effets positifs sur le travail; de nombreux salariés se sont révélés nettement moins stressés et plus productifs en travaillan­t à la maison. La situation actuelle a mené beaucoup de sociétés à organiser une rotation dans les bureaux et à optimiser leurs espaces. Les sociétés prennent en compte ces éléments nouveaux dans leur planificat­ion d’espaces de bureaux.

Nous souhaitons étendre nos activités à d’autres segments.

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Photo: Chris Karaba Stéphane Thauk a repris en 2019 la direction de la société MVGM Luxembourg.

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