Luxemburger Wort

Philippe répare les blessures

Le roi des Belges a tendu la main à sa demi-soeur Delphine Boël, offrant l’image d’une famille royale apaisée et moderne

- Par Max Helleff (Bruxelles)

La photo a rapidement fait le tour des médias et des réseaux sociaux. On y voit Philippe de Belgique souriant aux côtés de sa demi-soeur biologique Delphine Boël, ravie, les mains dans les poches de son jeans. Pas d’accolade, covid oblige. Mais une distanciat­ion sociale réglementa­ire d’environ 1,50 mètre.

Peu de gens s’attendaien­t à assister à une telle scène. Et encore moins à ce qu’elle soit rendue publique par un cliché diffusé par l’agence Belga. Jeudi, dans l’aprèsmidi, un communiqué du palais a pourtant officialis­é ce tête-à-tête de trois heures – qui s’était déroulé en réalité une semaine auparavant. «Ce vendredi 9 octobre, peuton lire, nous nous sommes rencontrés pour la première fois au château de Laeken. Notre rencontre fut chaleureus­e. Nous avons eu l’occasion d’apprendre à nous connaître lors d’un long et riche échange qui nous a permis de parler de nos vies respective­s et de nos centres d’intérêt communs. Ce lien va désormais se développer dans un cadre familial.»

Une page vient de se tourner

Cette rencontre a été organisée une bonne semaine après que la justice bruxellois­e a confirmé le lien de paternité biologique entre le roi Albert II et Delphine Boël. Le 1er octobre, cette décision a transformé de facto l’artiste en princesse de Belgique, lui donnant un titre nobiliaire équivalent aux autres enfants du monarque démissionn­aire, à savoir le prince

Une rencontre importante: Le roi Philippe a rencontré pour la première fois sa demi-soeur, Delphine Boël, fille illégitime du roi Albert II.

Laurent et la princesse Astrid. Philippe est quant à lui roi depuis 2013.

Une page vient de se tourner. Mais l’affaire Boël pourrait encore réserver bien des surprises. Hier soir ainsi, Albert II a fait savoir qu'il «se rallie sans réserve au communiqué que le roi Philippe et la Princesse Delphine viennent de publier.» «Mon épouse et moimême, nous sommes très heureux de ce qui a été réalisé à l’initiative du Roi, prémices de jours meilleurs pour tous et en particulie­r pour Delphine», a-t-il indiqué dans un communiqué. Albert II avait définitive­ment tourné le dos à sa fille illégitime en 2001.

Entre-temps, le roi Philippe a de nouveau marqué des points dans l’opinion. Sa rencontre avec Delphine

Boël pourrait amorcer la réunion future d’une famille royale recomposée, avec ce que ce terme recèle de modernité mais aussi de difficulté­s. Mais pour l’instant, elle donne surtout au monarque la posture d’une homme proche des gens et de leurs réalités quotidienn­es. Elle engendre un sentiment d’empathie, d’humanité, susceptibl­e de réparer ce qui passait jusqu’ici pour un triste gâchis.

Les réactions ne se sont pas fait attendre. Dans la presse, «Le Soir» estime que «Philippe se fait l’avocat de la réconcilia­tion, de l’entente et de l’ouverture que reconstrui­sent les individus, parents ou enfants, loin du mensonge et de la tyrannie des convenance­s et des statuts qui ont pollué et dicté la vie.» «De Standaard» publie lui aussi la photo de la rencontre royale en «une». Il constate que «Philippe embrasse Delphine comme un vrai membre de la famille». Quant aux réseaux sociaux, ils donnent une fois de plus aux admirateur­s de la couronne comme à ses contempteu­rs l’occasion de régler leurs comptes. Côté fans, de l’admiration. Côté critiques, des railleries sur le caractère quelque peu niais du cliché royal ainsi que sur la tenue (un brin chiffonnée) portée ce jour-là par le souverain.

Le combat s’arrête

Plusieurs questions restent toutefois en suspens: la normalisat­ion familiale sera-t-elle poursuivie par les autres Saxe-Cobourg? Les relations entre Philippe, ses parents et sa fratrie n’ont jamais été simples.

Et puis qu’en sera-t-il sur le plan institutio­nnel? Le lien entre le roi des Belges et Delphine Boël restera-t-il vraiment dans le cadre familial, comme l’affirme le Palais. Ou déboulera-t-il inévitable­ment

La rencontre donne au monarque la posture d’un homme proche des gens .

Peu de gens s’attendaien­t à assister à une telle scène.

sur la place publique, dans le jeu politique? Pour Marc Uyttendael­e, l’avocat de l'artiste, «cela veut dire que la procédure judiciaire avait sa raison d’être, qu’elle a eu son temps, et que vient maintenant le temps de la paix et de l’intimité ...»

Pour l'heure, le combat judiciaire qui a opposé Delphine Boël à Albert II s’arrêterait donc là, à un geste de bienvenue familiale, ce qui est une bonne nouvelle pour l’institutio­n monarchiqu­e. Ses défenseurs savent que tout doit être fait pour éviter de fâcher l’opposition nationalis­te et républicai­ne flamande, plus forte que jamais. Un «happy end» en quelque sorte.

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