La Belgique veut «passer un été plus léger»
De nouvelles mesures de fermeture et de limitation de rassemblements sont mises en place pour quatre semaines
L’heure était à la gravité mercredi en début d’après-midi, au terme du Comité de concertation qui venait une fois encore de réunir les responsables politiques fédéraux, communautaires et régionaux autour de la crise sanitaire. En dépit des efforts fournis, les chiffres sont sans appel: la Belgique se dirige vers une troisième vague pandémique, si elle n’y est pas déjà, les experts hésitant sur la sémantique.
Le Premier ministre Alexander De Croo a d’emblée évoqué la montée en flèche des infections tout en appelant les Belges à continuer à adhérer aux règles sanitaires «pour passer un été plus léger, et c’est à portée de main». «Nous sommes conscients que ces nouvelles mesures constituent une déception. Mais les conséquences seraient désastreuses si on ne prend pas de mesures. Cela menacerait notre système hospitalier et sa capacité à soigner d'autres maladies.»
Le libéral flamand ajoute que «le variant britannique est devenu dominant dans notre pays. On pourrait dire que l’on est entré dans une nouvelle phase. Ce n’est pas une augmentation exponentielle, mais ça ne veut pas dire qu’elle n’est pas inquiétante car même une augmentation linéaire devient intenable».
637 personnes en soins intensifs Pour le ministre-président wallon, le socialiste Elio Di Rupo, «la semaine pourrait devenir catastrophique pour des personnes qui sont simplement malades. Les mesures ne sont pas prises de gaieté de coeur, mais pour sortir le plus rapidement possible de la situation actuelle».
Ces mesures, les Belges les connaissent bien pour les avoir déjà expérimentées durant l'année écoulée, même s’il y a des variantes. Ce sont les magasins non essentiels qui devront se limiter à des activités de livraison et à des rendez-vous avec la clientèle, avec un maximum de 50 personnes en même temps, dans des créneaux horaires définis. C’est la limitation à quatre personnes (contre dix actuellement) pour les rassemblements en extérieur. Ce sont le renforcement des contrôles visant à sanctionner le non-respect du télétravail par les entreprises et la (re)fermeture des métiers de contact (coiffeur, tatoueur, etc.).
Enfin, les cours de tous les niveaux d’enseignement sont suspendus à partir de lundi, sauf pour la maternelle. Des examens peuvent avoir lieu durant la semaine précédant les vacances de Pâques.
Des chiffres alarmants, on l'a dit, sont à la base de ces décisions. Les contaminations connaissent une forte hausse qui ramène la Belgique à un niveau égal à celui d’octobre dernier, au début de la seconde vague pandémique. 637 personnes sont actuellement en soins intensifs, soit le double d’il y a cinq semaines. Elles pourraient être un millier à la fin du mois, si la tendance ne s’inverse pas.
Mardi, le cabinet de la Santé publique avait estimé «inquiétant» le taux d’occupation des services de soins intensifs. «Dans quelques jours, nous manquerons de places pour les soins aigus covid ou non covid à moins d’ouvrir des lits supplémentaires, tout en freinant les soins réguliers afin de réattribuer les ressources humaines nécessaires», prévenait-il.
Au cours des dix derniers jours, le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke a ferraillé pour revenir vers des mesures de confinement plus dures. Vendredi dernier, lors d’un précédent comité de concertation, il avait toutefois échoué, notamment en raison du refus des ministres communautaires de l’Education de fermer l’école avec une semaine d’avance sur les vacances de Pâques. Ceuxci avaient formulé en échange une série de mesures minimalistes censées stopper le virus désormais très présent chez les moins de 20 ans.
Les secteurs touchés furieux
Mais Frank Vandenbroucke n’en a pas démordu. Pour le socialiste flamand, pour se donner une chance de rouvrir les écoles en présentiel après les vacances de Pâques, un gros effort devait être produit immédiatement. Ce n’est qu’à ce prix, a-t-il dit, que pourrait être mis en oeuvre le calendrier de déconfinement initialement prévu à partir du 1er mai (réouverture de l’horeca, du secteur culturel…).
Mardi soir cependant, un conseil des ministres restreint a prôné un lockdown plus mesuré, non une nouvelle fermeture totale. Cette option a prévalu.
Inutile d'ajouter que les secteurs touchés par ce reconfinement sont furieux. Et que l’adhésion de la population que réclame le Premier ministre De Croo ne tient plus qu’à un cheveu.