Luxemburger Wort

A travers l’Himalaya

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...en marge du texte

Peut-on parler de Bande dessinée dans une rubrique qui s’intitule «...en marge du texte» sans dépasser son cadre? Ne faudrait-il pas l’appeler alors «en marge de l’image» pour pouvoir accueillir dignement le «neuvième art»?

Mais peu importe! C’est une très bonne nouvelle que j’ai découverte sur les réseaux sociaux qui m’amène à m’exprimer cette fois-ci sur la BD, sur Jonathan, ce Suisse au cheveux longs et bouclés qui voyage sur une moto à travers les montagnes himalayenn­es à la rencontre des autres. Il me fait toujours découvrir des paysages insoupçonn­és, m’expose les conflits politiques dans lesquels le Tibet est englué, et puis il me raconte une histoire d’amour complexe et sans tabou. Eh bien, Jonathan revient! Il était temps. Il était aussi un peu absent ces dernières années, mais d’après ses fans bien informés, Cosey, son créateur, devrait publier un 17ième album à la fin de cette année. Son nom: «La piste de Yéshé». Tout ce qu’on peut savoir pour l’instant, c’est que «Yéshé» est le mot tibétain pour la sagesse, aussi utilisé comme nom, tant pour des garçons que pour des filles, et aussi bien au Tibet qu’au Bhoutan. Alors où la moto de Jonathan va-t-elle nous emmener? Au Tibet ou bien au Bhoutan? On le saura à l’automne, et il nous reste ce temps pour relire toute la saga. Cosey vient de dépasser ses 70 ans. Honoré du grand prix de la ville d’Angoulême en 2017, le plus grand prix de la BD, il est retourné il y a peu au Tibet, où il a effectué tout au long de sa vie une demi-douzaine de séjours. Chez lui, dans ses montagnes suisses, il s’est remis à sa table à dessin pour composer cette nouvelle aventure de Jonathan. Cela pourrait être l’ultime, pour boucler la boucle et pour se souvenir.

Car tout a commencé par le souvenir, par une amnésie. Le premier album qui fait suite aux premières parutions dans le journal «Tintin» dès 1975, s’appelle «Souviens-toi, Jonathan...». Il sort en 1977. C’est une histoire d’amour et de sagesse, une belle aventure, un peu romantique et teintée de spirituali­té bouddhiste, mais surtout épique, dépaysante et triste, belle comme les illustrati­ons auxquelles Cosey a donné son coup de crayon. Ce premier tome est une magistrale entrée en matière et commence par ces mots:

«A l’époque où je fréquentai­s Jonathan, nous avions tous les deux 19 ans, et s’il est vrai qu’il n’avait rien d’un héros de BD, je ne ressemblai­s guère à l’idée qu’on se fait d’un dessinateu­r. Nous partagions un goût immodéré pour la pratique du ski et de la moto de trial, la lecture des Védas – livres sacrés de l’Inde – C.G. Jung et Woody Allen, ainsi qu’une quantité industriel­le de BD. Un bon nombre de nos week-ends se passaient dans les Alpes suisses à chevaucher nos 250 cm3 avec une traduction de la Bhagavad-Gîta dans la poche, et j’avoue que j’en garde un souvenir très nostalgiqu­e...»

L’une des particular­ités des albums de Jonathan sont les recommanda­tions musicales de Cosey à la fin. Et puis dans certaines histoires, la musique joue parfois un rôle important, alors que dans d’autres le lecteur se laisse bercer par la musique des mots des haïkus ... comme par celui-ci dans «Atsuko» qui se déroule au Japon: Sur son coeur... / une croix d’argent... / Dans le mien... / son sourire. mt

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