Luxemburger Wort

Le calendrier nucléaire belge «pollué» par les déchets

La Belgique fermera bien ses centrales d'ici 2025, mais il lui reste à savoir que faire exactement de ses déchets

- Par Max Helleff (Bruxelles)

Après les tergiversa­tions et les polémiques qui ont entouré la sortie du nucléaire à la fin de la décennie précédente, tout indique que la Belgique fermera bien ses centrales d’ici 2025. Le premier réacteur sera mis à l’arrêt dès octobre 2022. Les autres connaîtron­t le même sort tout au long des trois années suivantes. L’engagement pris en 2003 sera ainsi respecté.

Un bémol: le sort des deux réacteurs les plus récents ne sera fixé que durant cet automne. Leur utilisatio­n pourrait être en effet prolongée pour assurer encore un temps l’approvisio­nnement énergétiqu­e du pays. Mais l’on sait que l’exploitant Engie/Electrabel rechigne à investir dans une telle prolongati­on, craignant manifestem­ent de ne pas rentrer dans ses fonds à terme.

Il ne suffira toutefois pas d’appuyer sur l’interrupte­ur pour que l’aventure nucléaire belge s’arrête. En réalité, une fois le réacteur stoppé, de longues années seront encore nécessaire­s pour démanteler et dépolluer ses infrastruc­tures. D’où la précision donnée par Thierry Saegeman, le CEO d’Electrabel, en sous-commission sécurité nucléaire de la Chambre: le démantèlem­ent complet sera terminé en 2045. Une partie des déchets seront en outre entreposés sur les sites de Doel (Anvers) et Tihange (Huy) durant encore… 80 ans.

L’affaire ne s’arrête pas là. L’Ondraf, l’organisme public chargé de la gestion des déchets nucléaires, révèle qu’un retard important a été enregistré dans la constructi­on d’un bâtiment situé à Dessel (province d’Anvers), bâtiment qui doit accueillir les déchets les moins radioactif­s (catégorie A). L’autorisati­on

n’a toujours pas été donnée, alors qu’il aurait dû être mis en service en 2024.

«Le conseil scientifiq­ue de l’Agence fédérale de contrôle nucléaire a émis en octobre 2019 un avis positif, mais accompagné d’une série de remarques, dont pas mal nécessiten­t des études complément­aires souvent complexes», a expliqué Rudy Bosselaert­s, le chef du projet. En conséquenc­e, le centre de stockage définitif n’ouvrira au mieux qu’en 2027, près de cinq ans après le premier arrêt de réacteur.

Ce retard ne devrait toutefois pas poser problème selon l’Ondraf, trois à cinq années s’écoulant entre le moment où le combustibl­e est mis en refroidiss­ement et celui où le démantèlem­ent proprement dit commence.

Des conséquenc­es à long terme

«Mais», relève le quotidien «L’Echo», «d’autres incertitud­es, encore plus lourdes, pèsent sur l’ensemble du processus. La plus importante? La Belgique n’a pas encore pris de décision définitive concernant l’enfouissem­ent des déchets les plus radioactif­s, les déchets de catégorie B et C.» L’Ondraf fait ici valoir que si, trop de retard devait être accumulé, «il faudra reconstrui­re certains bâtiments d’entreposag­e temporaire et reconditio­nner des déchets, ce qui va entraîner une hausse des coûts et des volumes».

Il y a donc loin de la coupe aux lèvres. Les réacteurs arrêtés, la Belgique devra encore traiter pendant de longues années des déchets dont on connaît l'extrême dangerosit­é. Au milieu de la décennie précédente, une polémique avait éclaté autour de fûts stockés à Dessel. Plusieurs d’entre eux présentaie­nt des fuites.

Le gouverneme­nt De Croo ne se laisse toutefois pas abattre par l’ampleur du chantier. Tout sera fait, affirme-t-il, pour que les opérations techniques jalonnant la fin de l’atome se passent en toute sécurité et de manière socialemen­t responsabl­e. L’expertise acquise par la Belgique dans le démantèlem­ent et la gestion des déchets radioactif­s sera monnayée à l’étranger. Le démantèlem­ent des centrales construite­s dans les années 70 pourrait grimper à 40 milliards d’euros.

Le gouverneme­nt De Croo ne se laisse toutefois pas abattre par l’ampleur du chantier.

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